dimanche 17 janvier 2010

Sion : la branche

On est en train d'assister à la chute d'Israël. Chute Israël? Israël chute et l'on voudrait soit hurler à l'antisémitisme impropre (dans tous les sens du terme); soit se délecter de la fin jouissive du sionisme. Évidemment, l'on pourrait applaudir à cette fin grotesque car après tout, l'existence de cet État oscillant entre le racialisme et le communautarisme populisto-religieux est un scandale véritablement antisémite. Pourquoi se désoler de la fin d'un État qui n'a cessé d'empiler les crimes depuis sa jeune et artificielle création et qui défie toujours plus les lois internationales? Pourquoi s'attrister de la fin prévisible d'un État qui promeut une démarche suicidaire et impossible, consistant à prendre la place de et à refuser les normes du réel? C'est simple : que l'on se réjouisse ou que l'on s'attriste de la fin d'Israël en tant qu'entité idéologique promue à l'état d'État-nation impossible et grotesque, la réaction disproportionnée et inopportune indique que l'on se positionne par rapport au processus impérialiste.
L'on ne peut pas se réjouir de la fin d'Israël car la destruction d'Israël signifie des morts, du sang, des larmes. Il n'est jamais bon de souhaiter le mal, même au pire des criminels. L'on ne peut pas s'attrister, car la faillite d'Israël n'est pas la faillite d'un État-nation. C'est la faillite d'un projet idéologique, impérialiste et criminel. Cruel. Sanguinolent. Toutes les idéologies détruisent et ne fonctionnent pas. Pourquoi le sionisme échapperait à cette règle? La seule solution repose sur la création d'un État laïque unique, qui engloberait les Israéliens et les Palestiniens. Pour les contrariés du rêve sioniste, désolés, mais on ne s'attriste pas de la disparition inéluctable des Boers d'Afrique du sud. On se rassure du fait qu'ils ne seront pas égorgés comme des moutons et qu'ils ne subiront pas le destin kamikaze de la vengeance.
L'affaiblissement latent d'Israël ne vient pas de l'affaiblissement interne à l'idéologie sioniste - ou de l'affaiblissement direct du grand frère américain. L'affaiblissement d'Israël vient de l'affaiblissement de ses racines. De sa matrice. De sa protection. Si vous voulez comprendre la prospérité surnaturelle d'Israël et l'impunité miraculeuse d'Israël, ne cherchez pas d'explication fondamentale du côté des États-Unis ou du sionisme. Vous n'arriverez qu'à des parcelles de vérité. Revenez à l'histoire récente et constatez : la réalisation du rêve sioniste découle directement du soutien des élites impérialistes britanniques. La création d'Israël découle de facto du protectorat britannique.
Le soutien de l'Occident à Israël ne s'explique que parce que l'Occident prospère sous la tutelle de l'Empire britannique. L'Empire britannique n'est plus une puissance coloniale et maritime d'ordre politique. La décolonisation signifie la colonisation financière. Les pirates des Caraïbes opèrent désormais depuis les paradis fiscaux et ressemblent plus à des affairistes en cols blancs qu'à des héritiers conformes de Sir Drake. Cet Empire a soutenu Israël dans la logique des désaccords de Sykes-Picots, qui fixaient l'instabilité de la région proche-orientale et la mainmise de l'Occident impérialiste sur les richesses de la région, en particulier le fameux or noir.
Les Israéliens ont servi le rêve impérialiste occidental. Les desseins impérialistes britanniques. Les Israéliens ont du sang sur les mains. L'Occident affaibli et divisé se détournera bientôt de sa marionnette désaxée, violente et terroriste. Quand on commémore avec raison le massacre de Gaza de Noël 2008, il est cohérent d'accuser les responsables israéliens à condition d'expliquer que leurs actes impardonnables et abjects n'ont pu être commis sans l'aval de l'Occident. Le grand frère défraie en faux frais - l'effroi. A cet égard, la chronique obscure et sinistre de Christophe Barbier - "Une guerre juste, juste une guerre" -
http://www.lexpress.fr/actualite/monde/proche-orient/une-guerre-juste-juste-une-guerre_731650.html
n'est pas seulement un modèle de cynisme aveugle.
C'est aussi la caution lucide et maladroite de la propagande du médium journalistique envers son protecteur l'impérialisme occidental qui se lave les mains en cautionnant les agissements criminels de son prolongement. Barbier le porte-voix de la propagande impérialiste britannique à tendance française cautionne les crimes d'Israël en expliquant tranquillement qu'ils sont inévitables. Barbier légitime les actions impérialistes de l'Occident, soit la férule financière de l'Empire britannique. Barbier est un porte-parole survolté des ultra-libéraux de gauche qui de DSK à Bruni en passant par Kouchner ne cessent de rappeler que Sarko l'ultra-libéral de droite est allé se prosterner en compagnie de son mannequin-sandwich sioniste devant la reine d'Angleterre.
Tout est dit dès les premières lignes. "C'est par-delà l'horreur qu'il faut réfléchir", nous explique Barbier pour mieux expliquer dès le sous-titre que "Israël a raison de mener cette guerre". Plus fourbe ou plus lucide, Barbier le ventriloque médiumnique confesse brutalement et trivialement que "Israël a raison de mener cette guerre et il le fait aussi pour notre tranquillité." C'est qui, nous? Plus fort ou plus fou, Barbier annonce les desseins impérialistes occidentaux en Israël. La petite nouveauté stratégique est que la France devient pro-sioniste : "Deux États en coexistence armée, séparés par des murs s'il le faut, aux économies viables : tel demeure l'objectif. " Barbier l'a annoncé, Sarko l'a déréalisé. Il suffit de lire cette brève pour s'en aviser :
http://www.voltairenet.org/article163396.html
Les militaires français aident à construire le fameux Mur de séparation qui dans le prolongement du modèle sud-africain des bantoustans espère prendre la relève du Mur de Berlin. Problème : le cynisme politique de Barbier est digne de la stratégie visionnaire des néo-conservateurs dans le cadre mensonger de la catastrophique guerre contre le terrorisme. Ces fadaises sont promises à l'échec parce qu'un mur ne saurait en aucun cas régler le problème - d'Israël : la fin de l'idéologie, la fin de l'Hyperréel, la fin de l'impérialisme.
C'est quand l'impérialisme britannique occidentaliste s'effondre que les lézardes apparaissent dans le mur - israélien. C'est quand l'impérialisme occidental s'effondre que ses marionnettes s'affrontent. Si l'impérialisme occidental est transformé en stratégie républicaine par des forces institutionnelles conscientes que le jeu de dupes ne peut se poursuivre, l'Occident a une chance de s'en sortir. Il se transformera, il cohabitera avec les puissances pacifiques qui montent en régime - mais il survivra. L'avenir du monde est en Asie, puis en Afrique. Il n'est pas en Occident. Si l'on se penche sur le miroir du Proche-Orient : l'avenir du monde est à Gaza. Il n'est pas en Israël, en Égypte ou en Arabie saoudite.

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