lundi 30 mars 2009

Monologue de sourd

Le dialogue est devenu dans nos sociétés d'immanentisme tardif et dégénéré la gageure de l'impossible, soit le gage de l'impassible. Dialoguer se révèle d'une redoutable hypocrisie. Depuis Socrate, on ne cesse de nous bassiner avec la leçon trop bien apprise : c'est à partir du dialogue que s'élaborent les conditions de constitution des sociétés humaines, leur développement et leur harmonie.
Si l'on se penche un peu sur la manie de notre époque d'immanentisme tardif et dégénéré de stade terminal, on peut voir ce que signifie le dialogue de type oligarchique et nihiliste. On sait que l'ontologie nihiliste est grande spécialiste pour se travestir en ce qu'elle n'est pas. Le pendant politique du nihilisme tient dans l'oligarchisme. L'oligarchie se tapit derrière la démocratie. Le dialogue démocratique prétend jouer le jeu : bonne foi, respect des règles du dialogue, etc.
En réalité, le dialogue oligarchique est un monologue qui fait mine d'écouter les arguments contraires pour mieux imposer ses propres arguments. Il n'y a jamais eu débat, à tel point qu'on peut lancer que les dés étaient pipés. Dès le départ. La méthode oligarchique consiste à feindre le dialogue. Le dialogue de sourds. Précisément. Entre parenthèses, l'on comprend mieux les méthodes de récupération et de diversion de la propagande occidentaliste et immanentiste quand on cerne la technique consistant à dialoguer aussi faussement. L'oligarchie pour fonctionner implique que l'on fasse mine d'entendre la contradiction.
La contradiction est utilisée quand elle peut être intégrée au processus oligarchique. La mentalité oligarchique accepte en fait toutes les contradictions qui ne remettent pas en question son fonctionnement. Elle postule que le dire et le faire sont deux actions distinctes et que le dire s'épuise en s'exprimant. Elle part du principe que tout ce qui n'est pas antisystémique est parole vaniteuse - et vaine : une contestation qui a besoin du système pour contester.
Dans cet ordre d'idées, tout ce qui ne remet pas en question le système peut être exprimé, puisque cette parole ne dépassera pas le stade de la contestation verbale. L'oligarchie craint plus que tout le dire qui engendre le faire. L'oligarchie craint tout dire qui conteste le système, parce que c'est seulement ce dire qui est de nature à détruire le système. Le reste est une contestation stérile, qui a le mérite de calmer les nerfs et les ardeurs : de réduire au néant les pseudo-contestations.
C'est ainsi que les gauchistes, altermondialistes et autres libertaires sont des faux contestataires qui ont besoin du système oligarchique pour contester. Contestation utile, qui sert en fait ce qu'elle prétend contester. Fausse contestation en ce qu'elle conteste seulement pour conforter l'objet qu'elle conteste. Contestation systémique, dont le vrai visage apparaît quand on s'avise qu'elle ne propose rien en lieu et place du système qu'elle conteste. Contestation à vide, donc.
Dans le système nihiliste/oligarchique, le dialogue est un faux dialogue, qui ne respecte pas les règles du dialogue classique : surmonter l'affirmation par la contradiction. C'est ainsi que dans le système hégélien, le dépassement final (Aufhebung) est différent de l'affirmation initiale. Où Hegel montre qu'il balance entre le système métaphysique platonicien et l'immanentisme dont il est un héraut au moins partiel, c'est que la contradiction est intégrée dans le système affirmatif; si bien que la fausse contestation sert l'affirmation.
Le système ternaire de Hegel implique une continuité entre le stade initial et le stade ultime. Cette continuité prêt à suspicion : n'est-ce pas une manifestation latente de la conception nihiliste sous le vernis de la conception métaphysique classique? En tout cas, le dialogue classique en Occident découle explicitement de Platon et de ce qu'on a appelé la maïeutique de Socrate. Les dialogues de Platon sont les plus célèbres de l'Antiquité parce qu'ils mettent en scène la méthode socratique du dialogue comme méthode qui accouche les esprits.
Cette méthode peut se résumer comme suit : suite à une bonne discussion, l'affirmation initiale peut être corrigée par la contradiction. Il en ressort une nouvelle position, qui n'est précisément pas la position initiale. La position de Hegel explique que suite à la confrontation de A et de B, il en ressort C. Il reste à préciser que selon cette trinité philosophique, C est la synthèse de A et B.
Chez Platon, Socrate se confronte à ses adversaires avec à chaque fois une constante : il n'est pas d'accord avec eux et il est dans la peau du contradicteur. L'adversaire exprime le point de vue A. Socrate explique B. Mais contrairement à Hegel, qui tente une réconciliation novatrice, la dialectique platonicienne ne propose pas de C. A chaque fois, c'est Socrate (B) qui a raison. A ne peut que se convertir aux arguments de B, soit à la sagesse de Socrate.
Pas de dépassement chez Platon. Seulement le ralliement d'un point à un autre : la conversion, donc. La maïeutique est conversion, au sens religieux du terme, à ceci près que la conversion est rationnelle, alors que la conversion religieuse est révélée. Cette différence majeure explique que Hegel soit plus un immanentiste essayant de dépasser la métaphysique classique d'obédience platonicienne qu'un métaphysicien ayant inventé une méthode novatrice. Hegel fait semblant à partir du semblant : il fait semblant à partir du nihilisme. C'est un ultranihiliste qui prétend se mouvoir dans les traces de la métaphysique classique, à ceci près qu'il a la prétention de la finir.
Dès le départ, le dialogue n'est pas conçu comme le théâtre (au sens grec) d'où surgit une vérité originale à partir de deux points de vue, mais le point de ralliement de l'erreur à la vérité. Conversion : tourner vers la vérité. C'est déjà une prétention énorme : que l'erreur puisse se rallier à la vérité, comme les adversaires de Socrate à Socrate. Conversion au sens de miracle. L'hypothèse selon laquelle la vérité surgirait de l'entrecroisement de deux points de vue antagonistes est une conception qui se forme en pleine ère immanentiste et qui n'est nullement de facture classique.
C'est une conception qui est l'adaptation rationnelle de la Trinité chrétienne. Mais la Trinité cherche à expliquer la connexion entre le sensible et l'idéal (en termes platoniciens). La Trinité survient à une période de crise religieuse (passage du polythéisme au monothéisme à l'intérieur du transcendantalisme) qui a besoin d'expliquer l'avènement de la différence, soit de la nouveauté dans le monde (sensible) du même.
Dans le christianisme, la parole est donnée par Dieu. Dieu est le garant de la nouveauté ou de la différence. Le Saint Esprit ne sert qu'à expliquer la transmission de cette parole entre Dieu et les hommes. Le Christ est le prophète qui sert cette parole aux autres hommes, si bien qu'il faut assimiler le Christ et les hommes (raison de l'expression Fils de l'homme?). A, B, C : dans cette relation monothéiste, le B n'est pas la contradiction, mais la courroie de transmission supplémentaire : le prophète de la parole d'autorité.
Trinité et dualisme sont de ce point de vue fort proches. Tandis que le système ternaire hégélien prétend expliquer la nouveauté. Dans ce système, C est nouveau. La différence s'obtient de la rencontre entre A et B, soit entre deux antagonismes. Hegel prétend expliquer l'avènement de la différence, quand pour un esprit religieux, la différence n'a pas à s'expliquer : elle est l'apanage (consubstantiel) de Dieu.
On touche ici à une différence importante entre platonisme et christianisme, entre la philosophie et la religion, entre le nihilisme et le transcendantalisme : c'est que la philosophie prétend obtenir par la raison ce que la religion obtient par Dieu. C'est dire que la raison n'est pas absente du raisonnement religieux, mais qu'elle est le raisonnement humain qui suit la révélation divine. La raison en religion suit le postulat de Dieu. L'évidence de Dieu.
Tandis qu'en philosophie, c'est la raison qui prétend parvenir à la vérité. Pour ce faire, la philosophie a besoin de justifier de résultats tangibles. On notera que Platon est un esprit éminemment religieux, qui reprend le schéma classique binaire, sauf que Socrate par le dialogue convainc son interlocuteur/contradicteur. Le fait que Hegel ait repris le schéma chrétien prouve seulement que Hegel a essayé d'adapter le monothéisme à la philosophie. Il n'a pas compris que ce faisant il adaptait en fait le transcendantalisme au nihilisme, soit la mentalité d'un religieux à un autre religieux.
Du coup, les choses deviennent complexes : la philosophie ne devient le phare de la pensée moderne que parce que les religions nihilistes (dont l'immanentisme moderne) promeuvent la philosophie, alors que les religions transcendantalistes (dont les formes monothéistes) considéraient la philosophie comme un succédané et un dérivé, voire le jumeau de la théologie. Selon cette compréhension du cours historique, l'avènement de Platon ne fait que retarder l'échéance : Platon conforte le religieux en tant qu'esprit religieux tout à fait conservateur.
Platon est un esprit empreint de religieux classique, soit de polythéisme. Il est à noter que son dualisme a plus à tenir des religions africaines, dont l'Égypte marque l'expression régionale, que des religions indo-européennes (dont les religions perses). de même, le judaïsme est une forme de monothéisme ambigu et balbutiant qui descend de l'Afrique via la Mésopotamie et l'Égypte. Platon repousse le nihilisme, qui surgit en période de crise. Les sophistes sont l'incarnation de ce courant qui traduit la crise exprimant le déclin du polythéisme.
L'action de Platon contribue à relancer le transcendantalisme et à soutenir le monothéisme des débuts. Il est primordial de saisir que le dialogue socratique s'oppose en tous points au faux dialogue oligarchique/nihiliste, dont l'expression la plus achevée et la plus biaisée réside sans doute dans la forme hégélienne. Le propre du dialogue oligarchique n'est pas de montrer qu'il est en fait un monologue forcené.
Il est de paraître sous une forme novatrice et originale, une forme qui aurait dépassé le modèle classique préexistant. Du coup, la fausse trinité immanentiste est une duperie qui cache mal le fait que le dialogue oligarchique s'ancre sur le dialogue rationnel de facture classique, dont le modèle socratique offre la plus fidèle et illustre illustration. Rien d'étonnant à ce que le dialogue soit aussi mal vu de nos jours : il est d'autant plus loué à corps et à cris qu'il est en fait totalement dénié.
Mais le malentendu et l'esquisse d'esquive ont des racines bien plus profondes que la récente modernité ou la contemporanéité malsaine et pathologique. C'est que l'origine du dialogue débute comme par hasard avec le modèle socratique. Socrate est considéré comme le précurseur de la philosophie occidentale, à tel point que l'on parle des présocratiques pour dénommer se prédécesseurs. C'est le modèle philosophique, si tant est que la forme philosophique occidentale soit originale et spécifique, qui lance le dialogue d'ordre rationnel.
Rien d'étonnant dès lors à ce que le faux dialogue oligarchique soit si rationnel, au point qu'il soit hyperrationnel. Il serait hâtif d'estimer que le faux dialogue oligarchique constitue une perversion du vénérable dialogue classique d'essence socratique et de facture métaphysico-ontologique. Au contraire, de même que l'oligarchie est la gradation de la démocratie, de même le dialogue nihiliste est le prolongement, quoique outrancier, du dialogue platonicien.
Le fondement de cet itinéraire, qui finit en démence, réside dans la raison. Dès les limbes de l'ambition platonicienne, qui est le terreau du classicisme occidental, la raison a pour ambition de remplacer l'inspiration au sens où celle-ci vous relie au divin. La raison est humaine, quand l'inspiration est aussi mystérieuse qu'imputée au divin. Le dialogue interrationnel remplace le dialogue entre le divin et l'homme. Sans doute le passage du polythéisme au monothéisme favorise-t-il ce bouleversement, ne ce que la multiplicité des visages divins interdit le dialogue humain, quand l'unicité de Dieu le rend plus proche de l'homme.
Est-ce la raison pour laquelle le dernier des monothéismes, l'Islam tant décrié en terre chrétienne, insiste tant sur la nécessité de représenter le Dieu unique comme le Tout-autre et l'Ineffable? En tout cas, le dialogue impossible de facture oligarchique n'est jamais que le résultat de l'échec programmé du dialogue en tant que tentative de remplacer l'encombrant terme du dialogue injonctif de type polythéiste par un être humain.
On sait que Dieu finira par être déclaré mort, assassiné par un homme, bien entendu. C'est le prophète de l'immanentisme tardif et dégénéré qui se collera à cette annonce fracassante. Entre temps, l'effort le plus éloquent aura été de remplacer Dieu par l'homme. Echec sur toute la ligne, malgré les efforts de Platon et malgré les tentatives furibardes de Nieztsche de rendre le problème caduc en faisant disparaître le cadavre présumé encombrant. Problème bien connu des cinéastes : on ne réussit jamais à faire disparaître un cadavre.
C'est ce qu'on appelle cacher le cadavre dans le placard ou avoir une tête de cadavre. Il n'est pas ahurissant que l'homme ressemble à un cadavre à force de tuer le principe de la vie. En tout cas, quand on ouvre le placard où gît le cadavre caché, ou quand le spectre vengeur en sort avec nonchalance et insouciance, la réaction logique du malheureux découvreur est de hurler à la mort ou de se pétrifier dans le silence. C'est bien la conception du dialogue oligarchique : planquer le cadavre encombrant, imposer le silence du témoin, faire comme si de rien n'était. Malheureusement, les choses sont - dans leurs pantoufles.

Ultraoccidentalisme

Tiens, pour ceux qui en doutaient : le parcours d'un ancien d'Occident, passé armes et bagages à la droite républicaine et démocratique. Pas n'importe quelle droite : la droite dite ultralibérale. Voilà qui en dit long sur l'évolution du libéralisme et sur le vrai visage de l'ultralibéralisme. Pas la démocratie et la liberté, comme le soulignait un jour Devedjian (ancien d'Occident comme Novelli); mais le fascisme. Ne jamais oublier que de nombreux proches de VGE, de Pasqua et maintenant de Sarkozy sont des anciens militants d'extrême-droite, notamment du groupuscule ultraviolent Occident. Par les temps qui courent, les temps de NOM, les temps de menace, de fascisme universel, ne jamais oublier que ces milieux ont fusionné peu à peu autour de Sarkozy. Longuet, ancien d'Occident, est ainsi l'un des proches conseillers de Sarkozy. De nombreux autres exemples seraient tout aussi évocateurs du lien trouble et inavouable entre fascisme et ultralibéralisme. Sans doute est-ce l'évolution naturelle du libéralisme que de virer vers l'extrémisme. Mais c'est aussi rappeler les liens consubstantiels entre libéralisme et fascisme. Entre toutes les idéologies, en fait. L'arbre de l'immanentisme pousse vers les idéologies et les relient toutes. Le communisme ou le socialisme furent les alliés historiques et explicites du fascisme, en particulier du nazisme désaxé. Eh bien, alors que l'immanentisme tardif dégénère vers ses formes terminales, il devient de plus en plus explicite : il n'est que (gros) temps d'envisager le pendant de cette relation historique : libéralisme et fascisme ont toujours été complémentaires, parce que le libéralisme est le complément naturel du communisme. Les grands capitaines des synarchies occidentales ont soutenu pour beaucoup la montée au pouvoir de Hitler. Les constantes ont la vie dure. Le libéralisme n'est pas l'antidote du fascisme. Il en est son prolongement. La preuve.


jeudi 26 mars 2009

Le Kasse : tête

Tiens, suivons les pérégrinations de monsieur Kissinger, paisible retraité en (petite) vadrouille, président de la firme de renseignements privés Kissinger Associates (c'est cela, la conception de la diplomatie selon l'oligarchie atlantiste?) et ancien secrétaire d'État. Notre bon Henry, qui sera plus tard un exemple historique oublié de la perversité atlantiste et de la subordination américaine aux valeurs financières du post-Empire britannique, se révèle décidément un sacré bourlingueur, toujours de la partie malgré son âge respectable et ses ennuis de santé.
Décidément, le temps ne fait rien à l'affaire : quand on est bon, on est bon. Pour ceux qui ne comprennent (décidément) pas : il y a la diplomatie officielle, dont Hillary est l'actuelle représentante américaine. Et puis, il y a les autres canaux de la diplomatie, de moins en moins officiels et de plus en plus officieux. Kissinger appartient à ces canaux et utilisent ces canaux depuis qu'il a quitté les affaires officielles, autour de 1977.
On notera que Kissinger a rendu visite en Russie à Poutine, Medvedev ou Primakov à la tête d'une délégation d'Américains influents, dont le Vice-Président Biden, encore un politicien impliqué dans le 911. D'ailleurs, Medvedev est réputé l'homme de paille d'un système dont Poutine serait l'homme fort.
Il est certain que la conception oligarchique de la politique que conçoit explicitement Kissinger doit coller avec le néo-nationalisme d'un Poutine. Les oligarques mondialistes essayeraient-ils de s'arranger entre eux? Mais le véritable enjeu de ces visites à répétition de Kissinger chez l'ancien ennemi russo-communiste s'explique sans doute par le projet d'édification du NOM. Sans doute est-ce aussi la raison des visites et entretiens que Kissinger a consacrés aux Chinois post-maoïstes.
Kissinger est l'un des porte-paroles des cartels financiers sis entre Wall Street et la City : il cherche à renouer les relations diplomatiques entre la Russie et l'Occident atlantiste pour mener à bien l'unité du Nouvel Ordre Mondial, la domination des élites oligarchiques dans le NOM. A côté de cette question, on comprend que les officiels soient relégués aux secondes loges. Pantin, quand tu nous tiens... Tchao! N'est-ce pas - Hillary?

http://fr.rian.ru/world/20090320/120656912.html

"Entretien Poutine-Kissinger sur les dossiers internationaux.

Le premier ministre russe Vladimir Poutine et l'ex-secrétaire d'Etat américain Henry Kissinger ont soulevé une série de problèmes internationaux au cours d'une rencontre jeudi à Moscou.
"MM.Poutine et Kissinger ont discuté, dans le cadre de la poursuite du dialogue confidentiel qui s'est établi il y a déjà longtemps, de toute une série de problèmes internationaux d'actualité", a appris RIA Novosti auprès du service de presse du gouvernement russe.
M.Kissinger a visité à l'invitation de Vladimir Poutine une exposition du peintre russe Sergueï Andriaki.
Henry Kissinger est arrivé à Moscou à la tête d'une délégation d'hommes politiques américains influents. L'ex-secrétaire d'Etat américain est également coprésident du "groupe des Sages" dont le chef de la Chambre de commerce et d'industrie Evgueni Primakov est coprésident pour la Russie.
Henry Kissinger chef du Département d'Etat entre 1973-1977 est considéré un des meilleurs experts des relations internationales, c'est l'un des auteurs de la politique de détente dans les rapports USA-Russie et USA-Chine dans les années 1970.
En 1973, Henry Kissinger a reçu le Prix Nobel de la Paix pour avoir négocié avec succès les accords de paix qui ont mis fin à la guerre au Vietnam."

http://fr.rian.ru/world/20090323/120684612.html


"Obama pourrait se rendre en Russie dans quelques mois.

Le président américain Barack Obama pourrait se rendre en Russie dans les mois qui viennent, a affirmé l'ex-secrétaire d'Etat américain Henry Kissinger dans une interview diffusée samedi soir par la chaîne de télévision russe Rossia.
"Notre président a écrit une lettre au vôtre, et le vice-président a évoqué un "redémarrage" des relations. Aujourd'hui, me semble-t-il, les relations entre nos pays sont tournées vers l'avenir", a-t-il indiqué.
Début février, lors d'une conférence sur la sécurité à Munich, le vice-président américain Joseph Biden a estimé que les relations russo-américaines nécessitaient un "redémarrage". Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton se sont ensuite rencontrés le 6 mars à Genève pour lancer un "redémarrage" symbolique des rapports entre Moscou et Washington.
L'ex-secrétaire d'Etat américain Henry Kissinger et l'ex-ministre russe des Affaires étrangères Evgueni Primakov, tous deux coprésidents du "Groupe des sages" russo-américain, ont été reçus la semaine passée à Moscou par le président russe Dmitri Medvedev."

mercredi 25 mars 2009

Le 6 t'aime

La défense du système par les peuples occidentaux est facilement explicable : c'est que les Occidentaux sont le système. On aimerait souscrire à la duplication fantomatique entre les peuples et les élites d'Occident, mais cette distinction ne tient pas la route. Non contentes de former un redoutable panier de crabes, les élites sont celles que se choisissent, au moins indirectement, les peuples occidentaux. On a les élites que l'on veut, mon prince!
A en juger par l'état actuel des élites, mélange de formatage et d'aveuglement, de déréalisation au sens premier, de démesure au sens antique, il est fort à craindre que la crise des élites ne soient tout simplement que l'expression emblématique de la crise de l'Occident. Tout court. Qui sont aujourd'hui les dominants? Les marchands. On connaît les travaux de Dumézil sur la tradition trinitaire de la civilisation. Quand ce sont les marchands qui dominent, c'est la crise qui s'installe.
En ce cas, la domination de la société de type indo-européenne, celle qui a muté en société unique et mondialiste, est inquiétante : en effet, ce sont typiquement les marchands qui dominent cette société de consommation et de crédit... Comment en est-on arrivé là? Comment des condamnés peuvent-ils défendre leur bourreau?
Seule explication : parce qu'ils ne sont condamnés que dans la mesure où ils sont bourreaux. Après le balayeur balayé, le meurtrier condamné. On a vu un moyen de défendre le système bec et ongles : dispenser d'autant plus son avis qu'on ne connaît pas le sujet. En voici un autre : ne dire que du bien du sujet (de préférence qu'on ne connaît pas). Tout ce qui conteste, tout ce qui critique, tout ce qui n'est pas d'accord est démodé. Dépareillé. Accords désaccords.
Cette manière de critiquer s'ancre sur un argument pseudo-ontologique, en réalité du mode idéologique le plus extrême : seul ce qui est d'accord est réel. C'est ce qu'on appelle en langage post-nietzschéen l'assentiment à la vie. Donne ton avis : oui, oui. On comprend pourquoi les négateurs sont assimilés aux négationnistes.
Dire non, c'est dire non au reél. C'est dire oui à l'illusion. Non : non au réel, non au nom. Dans ce cas de figure, le oui est totalitaire au nom du négationnisme contenu dans le non. Dans le type de pensée de Hegel, la contradiction est intégrée et dépassée. Au moins fait-elle encore partie du dialogue. Dans le cadre de pensée de l'immanentisme tardif et dégénéré, dont Nieztsche est le héraut prophétique, le dialogue est encerclé dans les bornes des normes, entendre : dans l'affirmation pure.
Certes, on se récriera que Nietzsche n'a pas dit ça, que c'est le déformer, etc., etc. Je rétorquerai posément que notre bon Nieztsche était d'autant plus un pamphlétaire de première qu'il entendait s'opposer, avec la virulence la plus extrême, à ceux qui ne partageaient pas ses valeurs, soit à ceux qui refusaient son parti-pris pour l'affirmation. Soit dit en passant, on s'est beaucoup moqué de W. qui entendait entamer la Croisade au nom du Bien et enfermer dans des camps de torture les terroristes étrangers à la civilisation de l'humanité, mais ce discours totalitaire fleure bon la mentalité post-nietzschéenne, dont nous avons un aperçu avec le postmodernisme.
Puisque le renversement de toutes les valeurs de Nietzsche n'est guère cohérent, mais assez explicite : toutes ces attaques consistent en gros à remplacer le transcendantalisme, singulièrement sous sa forme monothéiste chrétienne, par de l'immanentisme. Nous y sommes. Hegel, pour concilier le transcendantalisme et l'immanentisme, proposait la pensée en trois étapes. La dernière étape surmontait la thèse et l'antithèse. Nietzsche réduit le travail à une seule étape. En effet, ce n'est pas un hasard si le deux est gommé.
On passe du trois au un. En effet, le dualisme est le lieu de l'alternative, qui, une fois jaugée, donne forcément lieu à un choix : la thèse ou l'antithèse. Raison pour laquelle Hegel propose de surmonter. Pour éviter le monisme caricatural. On connaît la blague de potache qui circule sur Hegel : Hegel aurait entrepris depuis Iéna de proposer une histoire de la philosophie qui commencerait en Ionie et se finirait (opportunément) à Iéna. Ben voyons!
Le dualisme platonicien n'est jamais que l'opposition entre le sensible et l'idéal. Opposition toute relative puisque le sensible n'est que la pâle copie de l'idéal. Au final, on ne peut que choisir l'idéal. Il faudrait être fou dans le système platonicien pour parier un kopeck sur le sensible. De quoi finir hypersensible dans les flammes de l'Enfer (pavé de bonnes intentions, comme c'est le cas de Spinoza).
On remarquera aussi que le système à trois de Hegel se rapproche, non du nauséabond triolisme d'ordre sexuel, également appelé de manière savoureuse et impropre libre-échangisme (liberté d'obédience libérale?), mais du dogme chrétien de la Trinité. Les chrétiens ont vite compris que le seul moyen de ne pas en rester sur le totalitarisme (croyance en la vérité d'une seule affirmation) est de faire reposer le système sur la Trinité.
Si l'on déteste le christianisme comme l'expression de l'obscurantisme, que l'on ne s'arrête pas à son aversion du religieux, du monothéisme ou que sais-je, et que l'on s'enquière du rapprochement entre le christianisme et le système politique indo-européen distingué par Dumézil. Aucun doute : le rythme ternaire, pour reprendre une expression musicale, ne vient pas du christianisme ou du platonisme (forme élitiste de christianisme selon Nieztsche), mais du fondement même de la société occidentale, qui est probablement née en Inde, et non en Grèce.
Fondement que je qualifierais de religieux, dans un sens plus profond que philosophique, ontologique ou métaphysique - au sens où le religieux est de toute manière plus profond que le philosophique. Dumézil lui-même précise qu'il existe d'autres moyens que le ternaire d'organiser la société et de concevoir l'univers. Les formes dualistes, dont l'Égypte est une incarnation africaine évidente, ne sont pourtant pas éloignées des formes ternaires. Après tout, le dualisme platonicien est rapproché de la Trinité chrétienne. Platon présentait des influences hindoues et perses, mais aussi égyptiennes.
Dans le dualisme, tout dépend en fait des rapports entre les deux termes. Si ces rapports sont nécessaires et constants, alors le dualisme est proche du ternaire : c'est l'argument platonicien selon lequel le monde de l'idéal n'existe pas seulement ailleurs, mais est d'ores et déjà présent ici et maintenant, dans son incarnation sensible. L'idéal excède le sensible, mais lui est connexe, nullement étranger.
C'est le prolongement (antérieur) de l'argument africain, selon lequel le monde des vivants n'aperçoit pas le monde des morts, alors que les défunts sont parmi nous et que l'autre monde, d'une manière plus étendue, se trouve parmi nous. Ce dualisme pose la question : ce qui est se réduit-il ce que nous voyons?
Et il répond : en aucun cas. Ce que nous voyons n'est qu'une partie de ce qui est. Contre ce dualisme qui est fort proche du ternaire, à tel point que le dogme chrétien de la Trinité peut être entendu comme l'explicitation par la création d'un troisième mouvement du dualisme harmonieux, il faut opposer une conception du dualisme qui oppose plus ou moins implicitement les deux termes, soit l'Etre ramené au sensible et le néant. Spinoza, le saint de l'immanentisme originel, n'évoque pas la question du néant. Mais en rapportant l'Etre à l'être, il suppose nécessairement que le néant remplace l'Etre. Le néant et la Nature.
C'est seulement au sein d'une telle conception religieuse, conception nihiliste, que s'épanouit la conception totalitaire du monisme politique. Conception qui peut se résumer ainsi : il n'y a pas le choix, puisque le seul choix qui soit oppose le réel au néant. L'affirmation ou la contradiction signifie de ce point de vue : le réel ou l'illusion. Bien entendu, ce genre de raccourci présente quelques inconvénients notables, dont l'actuel guerre contre le terrorisme offre un raccourci saisissant.
On retrouve cette conception explicitement énoncée chez Rosset, l'incarnation paradigmatique, et peut-être paroxystique, de l'immanentisme tardif et dégénéré. Rosset l'immanentiste conséquent : au moins n'a-t-il pas le fard ou l'impudence de nous vendre son monisme sous les atours du gauchisme, comme s'échinait à le faire un Deleuze suicidaire bien avant le drame final. Selon ces immanentistes plus ou moins déguisés, tous spinozistes, la contradiction se retrouve cataloguée comme l'expression de l'illusion.
Le noeud du débat s'ancre dans cette conception contradictoire et intolérante, selon laquelle il ne sert à rien de débattre avec des esprits dérangés qui se meuvent dans la sphère de l'illusion. Une vraie question ontologique serait de demander à ces brillants rhéteurs comment ils font pour distinguer entre illusion et reél alors qu'ils ne sont capables de définir ni le reél, ni l'illusion. C'est un peu gênant, à moins de considérer que certains élus sont possédés par la grâce et qu'ils présentent le don de distinction ontologique adéquat.
Autant dire qu'on retombe dans un arbitraire pur et que le seul vrai critère de distinction repose sur l'élection, soit sur la force. Comme l'énonçait déjà Platon, c'est un système oligarchique pur, ce qui montre si besoin en était la correspondance entre l'oligarchie politique et l'immanentisme ontologico-religieux. Dès lors, le refus du débat, et de ce qui fait son sel et sa force, soit de la contradiction, est l'expression d'un refus du changement et de la raison au nom de l'arbitraire travesti en nécessité et autres arguties plus ou moins fumeuses.
C'est aussi et certainement la preuve que le système mental, politique et religieux qui sous-tend une mentalité aussi dégénérée se trouve dans un état de faiblesse avancée, ainsi que l'exprime l'appellation d'immanentisme tardif et dégénéré. J'ajouterai seulement que c'est au stade terminal de l'immanentisme tardif et dégénéré que se récolte des symptômes aussi criants et que cette seule constatation est peu optimiste sur l'état du système occidental actuel, qui vit l'agonie du libéralisme et qui se retrouve comme le roi mal en point : nu.

vendredi 20 mars 2009

L'homme qui en ignorait trop

Je ne sais pas que je sais.

La culture du déni est la grande caractéristique des peuples d'Occident en période d'immanentisme terminal. On prétend qu'il n'est pire sourd que celui qui ne veut entendre. Que mieux vaut discuter avec un mur qu'avec un esprit de mauvaise foi. Les peuples d'Occident se défilent avec une constante sidérante : leur incapacité éducative et constitutive à affronter les problèmes autrement qu'en pratiquant la politique de l'autruche. L'Occidental est tellement individualiste, tellement obnubilé par ses préoccupations d'individu au centre de son désir, par conséquent au centre du monde, qu'il en oublie l'essentiel : que l'avenir de l'homme passe par lui.
Toute activité qui ne concerne pas la sphère privée, la sphère individuelle, est condamnée d'avance à l'incompréhension, voire à la moquerie. C'est ainsi que l'Occident démocratique est parvenu au nom des principes démocratiques au grand déni de la démocratie. Ce déni s'exprime parfois par le refus de discuter ou par le syndrome du Titanic : s'amuser en faisant comme si le navire ne fonce pas sur un iceberg fatal.
Quand on passe une partie de son temps à essayer de faire comprendre que le fonctionnement du système occidental est pervers et mortifère, destructeur et désaxé, on est stupéfait ou ébahi de constater à quel point les gens suivent d'autant plus la version officielle dispensée par les institutions occidentales ou le pouvoir occidental qu'ils ne sont pas au courant des sujets qu'ils abordent. Ils répètent servilement. Ils préjugent mimétiquement. Ce sont des académistes fort peu académiciens.
Que penserait-on de quelqu'un qui critique vertement un livre sans l'avoir lu? Qui condamne une action sans être au courant? Qu'il se comporte n'importe comment. C'est pourtant ce que fait le citoyen occidental, en défendant de manière ignorante et éhontée l'Occident parce qu'il a intérêt à soutenir un système politique injuste et prévaricateur, qui, bien qu'il exploite ses propres populations, au sens de sujets, voire d'esclaves, leur octroie tout de même des privilèges et des avantages. Pervers. Donner un peu pour exploiter mieux.
La lâcheté du péquin occidental, de cette figure qu'on nomme depuis Solon les classes moyennes, tient dans cet aveuglement qui ne peut accepter de dire ce qu'il fait : en gros qu'il pactise avec le diable parce que le diable le protège en échange. C'est le système du proxénétisme, qui soutient ses prostituées pour mieux les exploiter. L'Occidental se compromet avec le système impérialiste, colonialiste et esclavagiste occidental (nommé par la propagande libéralisme, démocratie, capitalisme ou laïcité) parce qu'il y trouve de manière ambiguë un avantage final très relatif. Il se peut que le jour où l'Occidental perde plus qu'il ne gagne dans ce jeu de dupes, il se révolte.
Mais tant qu'il y trouvera son comptant, tant qu'il gagnera plus qu'il ne perd, il acceptera d'être exploité et manipulé. Raison pour laquelle les peuples occidentaux refusent de se révolter contre des dirigeants particulièrement violents et diaboliques. Un évènement tragique illustre cette perversion consistant à pactiser avec le monstre parce que le monstre vous nourrit, au sens où la mère ferme les yeux devant le mari qui viole leur fille.
C'est le 911. Si l'on trouve que j'exagère, que l'on considère que les commanditaires du 911 ont accepté sciemment que 3000 vies soient anéanties d'un coup, d'un seul, au nom de leur toute-puissance démesurée. Le 911 pris comme acte isolé est certes limité à sa seule existence (démentielle), mais le 911 pris dans son processus finaliste est le symptôme et l'emblème du fonctionnement du système.
Les conséquences du 911 sont la guerre contre le terrorisme, le Nouvel Ordre Mondial, la crise financière systémique. De ce fait, les conséquences sont aussi les causes, si l'on se souvient que la caractéristique du finalisme est d'être contenue dès l'origine du processus. Le jour du 911, le système a montré son visage. Le 911 est une opération de dégénéré avant d'être une opération sous fausse bannière. Le 911 marque un tournant dans l'évolution du système occidental, qui est un système non viable : à force de détruire, il finit par se détruire lui-même.
C'est ce qui s'est passé le 911, où les commanditaires n'étaient certainement pas des islamistes terroristes planqués dans des grottes montagnardes d'Afghanistan, mais des factions financières occidentales, installées principalement entre Wall Street et la City. Si l'on croit que je délire, que l'on consulte les déclarations du général Ivashov, qui était chef d'État-major russe le 911 et qui était bien placé pour voir en direct ce qui s'est vraiment passé, au Pentagone, mais aussi lors des dizaines d'exercices contreterroristes, dont certains sont passés de la virtualité préventive à l'effectivité toxique.
On pourra aussi consulter les déclarations de von Bülow, l'ancien ministre allemand. Des dizaines d'autres également. Si l'on comprend que le 911 est un évènement révélateur, un évènement qui révèle le coeur du système, le coeur du fonctionnent occidental, l'antre de la bête, alors l'on ne peut qu'être interloqué par la réaction profondément significative et signifiante des populations occidentales. Prendre position du côté du manche, du coté du plus fort, sans savoir quoi que ce soit, en répétant servilement les discours de propagande, notamment servis et relayés par les médias. En fait, cette attitude manifeste tout simplement, tout sordidement, que les gens savent, mais qu'ils n'ont pas intérêt à tirer des conclusions cohérentes de ce qu'ils savent.
Leur intérêt est de se taire. Leur intérêt est de collaborer. Le terme est fort. Il est lucide. Les populations occidentales collaborent avec un système pour la simple et bonne raison que le système occidental, c'est elles - les populations occidentales. Tant qu'on vend du rêve, du vent, du nihilisme aux malchanceux bénéficiaires de l'Occident aveuglé, ces derniers s'aveuglent. Les malheureux beuglent de bonheur. Il en faudrait beaucoup pour qu'ils refusent l'opulence matérielle qu'on leur sert comme salaire de la peur et comme compensation achetant leur silence.
Beaucoup pour qu'ils comprennent le mécanisme pervers qui leur fait accepter au nom de l'intérêt immédiat ce qui les desservira à terme. Très bientôt maintenant. En effet, le moment est venu de passer à la casse. Au tiroir-caisse. L'Occident a profité d'un système de destruction qui ne fonctionne que peu de temps, c'est-à-dire qui détruit très rapidement. L'Occident a appelé démocratie libérale un système d'impérialisme et de domination qui s'appuyait sur le progrès technique et qui de ce fait obtenait des résultats finis extrêmement spectaculaires et efficaces. Extrêmement inégalitaires et destructeurs aussi.
En réalité, quand l'Occidental moyen répète servilement les versions du pouvoir occidental, y compris quand elles sont le plus incohérentes, comme c'est le cas du cas 911. Il commence par révéler qu'il ne sait rien. Mais que signifie cette ignorance? Ignorance crasse? Ignorance de mauvaise foi? De mauvais aloi? Peut-être un peu des trois. Si l'on dépasse la stupidité de la mentalité matérialiste moyenne, consistant à se vautrer dans la médiocrité cynique et mesquine des petites plaisirs quotidiens immédiats, dont Onfray offre un exemple philosophique typique et affligeant, entre orgueil peu rationnel et vacuité proche de son éditeur J.P. Enthoven, on arrive à comprendre que l'ignorance travestie en savoir servile et stupide signifie en fait : je sais et je ne veux pas savoir. Je sais que je ne veux pas savoir.
En ce cas, et c'est le cas, il ne reste plus qu'à tirer les seules conclusions d'une pareille attitude de charogne. La politique de l'autruche ne présente pas cent cinquante remèdes et autant de solutions. T'es une charogne? Un dénieur? Un niais nieur? Va en enfer. C'est la seule issue pour ton comportement méprisable et immature. Pareil au Faust ou au héros de la Peau de chagrin, tu as vendu ton âme au diable, petit Occidental moyen. Il ne reste plus qu'à souhaiter ton effondrement, la disparition de ta mentalité individualiste. Tu es plus qu'un parasite. Tu es un prédateur. Un imposteur. Et si l'on souhaite vraiment que l'aventure humaine se poursuive et ne s'arrête pas brutalement, sur une fausse note, on ne peut qu'attendre avec soulagement que tu passes le main et que les nihilistes de ton acabit rentrent dans le rang. Reviennent à leur rang. Celui du néant.

mardi 17 mars 2009

La faim du sionisme

Deux articles fort intéressants dans le site Voltaire. L'un du général Ivashov, qui était chef d'État-major des armées russes le 911 et qui était très bien placé pour observer ce qui s'est passé réellement. Il est intéressant de noter ainsi que la propagande occidentaliste a réussi à faire prendre pour folie l'évidence : que le 911 a été commandité par des factions bancaires occidentales. Un personnage hautement qualifié exprime ainsi le point de vue des officiers russes, notamment dans le renseignement. Dans de nombreux pays de par le monde, on a compris la vérité factuelle du 911, à commencer par cette évidence qui en dit long sur le manque de jugement et la méconnaissance de ses structures par les populations occidentales : il est rigoureusement impossible pour une nébuleuse aussi limitée qu'al Quaeda d'avoir commandité des attentats d'une ampleur mondiale. A la rigueur, ces fanatiques ont peut-être participé à certains pans de l'exécution. Pas davantage.
http://www.voltairenet.org/article159301.html
Maintenant, que l'on envisage la nouvelle du renoncement de Charles Freeman, contraint par le puissant lobby sioniste à ne pas assumer ses fonctions de président du Conseil national du renseignement. On pourrait bien entendu gloser sur l'immoralité du lobby juif aux États-Unis, soit des factions les plus extrémistes et influentes de ce lobby. Mais je me focaliserai sur la déclaration de Freeman. Freeman dénonce l'influence néfaste de ces milieux sionistes extrémistes. Pourquoi? N'oublions jamais que l'élection d'Obama intervient dans le contexte de la guerre contre le terrorisme, de la crise financière et du 911.
Freeman réagit par rapport aux éléments qui montrent clairement que ces mêmes factions sionistes fondamentalistes sont impliquées dans toutes les étapes de la guerre contre le terrorisme, de la cause (le 911) aux conséquences, les guerres du Caucase, d'Irak, d'Iran, du Liban ou de Gaza (ente autres).
C'est aussi dans ce contexte que survient le rapport de la CIA sur l'avenir d'Israël, qui incrimine clairement la politique suicidaire et utopique d'Israël.
http://www.voltairenet.org/article159318.html
Le sionisme est une idéologie qui est condamnée à s'effondrer, comme les autres idéologies. Après tout. Je voudrais m'arrêter un instant sur le paradoxe de l'agonie. Nous assistons au chant du cygne du sionisme, qui avant son effondrement dilapide ses dernières forces. Coup de poker? On pourrait estimer que la nomination de Rahm Emmanuel ou le renoncement de Freeman prouvent la toute-puissance des sionistes extrémistes.
L'étude de Panetta sur l'avenir d'Israël est un avertissement très clair : les sionistes extrémistes à la tête de cet État sont aussi ceux qui ont poussé à la guerre contre le terrorisme. Nombre d'entre eux ont participé au 911. Ils sont certainement les laquais des élites anglo-saxonnes, mais enfin, on leur signale qu'ils feraient mieux de se calmer et que si un bouc émissaire devait être distingué, ce serait eux aux premières loges. Les crapules finissent toujours par livrer leur vraie identité, surtout quand elles agissent par le chantage et la manipulation et qu'elles oublient leur vraie position. Contre leurs alliés.

Opinion : à propos d'Arthur et de l'antisémitisme

TARTUFFERIE : tel est le comportement d'Arthur le pirate de la télévision, qui aimerait qu'on le respecte parce qu'il est juif. On a pourtant le droit de condamner la nullité de ses interventions d'animateur, la perversité de ses conceptions de producteur (Endémol), la caractère inquiétant de son soutien au sionisme radical, sa participation à l'instrumentalisation de l'antisémitisme. Voici une lettre qui remet les choses au point et qui éclaire :
1) la mentalité des antiantisémites;
2) le vrai visage des journalistes officiels, qui sont des propagandistes d'une mauvaise foi insupportable.

"Claude Raymond, lectrice du Nouvel Observateur, revient sur la polémique suscitée par l'annulation du spectacle d'Arthur à Vals-les-Bains

Je m’appelle Claude Raymond, c’est moi seule qui ai interpellé Arthur à Vals-les-Bains, j’ai le droit de m’exprimer face à l’emballement dément et à l’accusation d’antisémitisme dont les médias ont fait leurs choux gras depuis un mois. A Vals-les-Bains, où la configuration est particulière (casino, théâtre et bar donnant sur un hall à entrées multiples), c’est la police qui a interdit l’entrée du théâtre, et c’est Arthur lui-même qui a annulé son spectacle. Notre manifestation, sans le moindre soupçon d’antisémitisme, était pacifique et d’ailleurs la police n’a procédé à aucun contrôle d’identité. Deux journalistes du Dauphiné libéré étaient présents et ont relaté correctement l’événement dans son édition du 18 janvier 2009. La dépêche de l’AFP était également exacte. Alors, pourquoi tous ces mensonges : journalistes sans éthique ou volonté délibérée de tordre la vérité ? Mesdames et Messieurs les journalistes, c’est à vous que je pose la question !
Revenons à Vals-les-Bains, après une heure d’attente, Arthur s’est présenté en victime : « On m’attaque pour ma religion, je suis juif ». Je suis juive aussi, je le lui ai dit, il m’a regardée et c’est bien la première fois que ses yeux exprimaient un sentiment, une haine féroce. Il y a eu ensuite son texte dans Le Monde. « La haine des incendiaires des âmes », une longue pleurnicherie victimaire et pas un mot sur son soutien (ou pas) à l’Etat d’Israël. Et j’ai enfin compris. Sous son air benêt se cache un redoutable mariole, et quoi de mieux pour booster son spectacle, qui n’attire pas les foules (à ce qu’on dit), que de jouer sur le communautarisme des uns et la solidarité contre l’antisémitisme des autres. Pain bénit !
J’ai tenté, sans résultat, de joindre des rédactions pour rétablir la vérité et surtout pour faire comprendre qu’il est irresponsable d’assimiler le refus du sionisme assassin à l’antisémitisme. Les vrais antisémites sont toujours là et vous ne serez plus crédibles en hurlant au loup quand ils se déchaîneront.
Je suis juive, petite-fille de déportés morts à Auschwitz, enfant cachée pendant l’Occupation, traitée de « sale youpine » toute mon enfance et victime d’une campagne antisémite dans mon joli village de l’Ardèche il y a vingt ans, j’y ai laissé mon entreprise, une variante de « rumeur d’Orléans ». Je connais les ravages du véritable antisémitisme en France, je doute fort qu’Arthur comprenne de quoi je parle, qui n’a d’ailleurs rien à voir avec la religion dont il se réclame et qui relève de la sphère privée, je suis athée et mes grands-parents venus de Pologne, Icek et Rosa Rosenberg, n’étaient pas religieux non plus…
Je suis membre de l’UJFP (Union Juive Française pour la Paix). Les médias (presse, radios, télés) ne peuvent continuer à dérouler le tapis rouge à tous les Français sionistes sans les confronter aux Français qui ne peuvent plus supporter les massacres impunis commis par Israël, cet Etat voyou qui a perdu son âme. Si les médias n’ont pas ce courage, qu’ils ne s’étonnent pas quand nous nous faisons entendre directement, comme, au hasard… à Belfort, Lille ou Vals-les-Bains.

Claude Raymond."


vendredi 13 mars 2009

Libéral-fascisme

Allez, une petite considération sur l'esprit "de propagande", comme l'on dit "de contrebande" : le fascisme n'est pas l'opposé du libéralisme. De la démocratie libérale. Les deux sont intimement liés. En fait, le libéralisme est une idéologie, le fascisme est une idéologie, le communisme est une idéologie, le socialisme est une idéologie, le sionisme est une idéologie. J'en ai oublié. Les idéologies expriment la conception de l'idée finie et au service de la politique. Les idéologies sont l'expression immanentiste de l'immanentisme tardif et dégénéré.
Autant dire que le libéralisme mène au fascisme et que le fascisme mène au libéralisme. On pourrait tout aussi bien dire que le fascisme mène au communisme et que le communisme mène au fascisme. Ce sont les trois grandes tendances idéologiques de l'immanentisme tardif et dégénéré. Le sionisme n'est qu'une sous-tendance, qui oscille ainsi entre libéralisme et fascisme, mais qui possède aussi des racines clairement communistes.
On pourrait bien entendu affiner, dégrossir, préciser, détailler. Je voudrais simplement mettre l'accent sur une réalité qui n'est jamais présentée comme telle et qui se présente toujours sous le masque du déni et de l'antithèse. C'est le lien entre le fascisme et le libéralisme. On oppose le fascisme au libéralisme. La propagande libérale explique posément que le libéralisme est l'antidote au fascisme. Le fascisme serait ainsi une mentalité totalement étrangère à la mentalité libérale. Le libéralisme guérirait du fascisme, en grande partie par la démocratie. A la limite, mieux vaut lier le communisme au libéralisme que le fascisme. On connaît les travaux de l'historien allemand Nolte qui lie le communisme au nazisme (de manière controversée il est vrai).
En fait, il faudrait opposer dans l'immanentisme le progressisme et le pragmatisme. Tous deux mènent au fascisme. Le fascisme représente le point extrême de la violence, du chaos et de la destruction avant l'anéantissement. Le libéralisme est simplement le stade antérieur, qui incarne l'ordre, mais l'ordre menant vers le désordre, l'ordre menant vers le chaos, le déclin, la décadence, la destruction, la violence, l'apocalypse.
Il est évident que les liens historiques entre communisme et fascisme ou entre libéralisme et fascisme abondent. Les communistes ont longtemps soutenu, tacitement et implicitement, les fascismes. Les libéraux aussi. Que l'on découvre à cet égard la politique anglo-saxonne de soutien oligarchique aux différents mouvements du fascisme.
Mais si le fascisme peut être entendu comme l'apocalypse finale vers laquelle mènerait le libéralisme, il faut se défaire de la propagande immanentiste qui laisse entendre en toute candeur que le libéralisme serait la fin de l'histoire et le stade de perfection ultime de l'humanité. En réalité, le libéralisme représente ce que Nietzsche dénonçait dans le nihilisme de stade terminal. Le libéralisme mène vers le pourrissement et l'effondrement de l'humanité. En ce sens, on comprendra un jour que la seule action philosophique des postmodernes consiste à avoir établi des passerelles entre Nieztsche et le libéralisme.
Nietzsche et la gauche? Nietzsche et le libéralisme. Le fascisme peut être perçu comme la cause finale qui révèle l'ensemble de l'édifice immanentiste, en particulier son incarnation politique. Le fascisme comme acmé de la violence montre ainsi que le but du nihilisme réside bien dans le néant. Mais la fin est aussi le milieu dans el finalisme. C'est en ce sens que si l'on prend le moment libéral de l'après-guerre comme le centre de l'immanentisme, on arrive à déterminer le fascisme comme la cause (première partie du vingtième siècle) et la conséquence (basculement inéluctable de l'immanentisme dans le chaos).
Avant le moment du nihilisme de stade terminal, qui précède l'effondrement, et qui est symbolisé par le libéralisme, il est tout à fait prévisible que le fascisme surgisse comme avertissement et comme tentative désespérée et impossible d'empêcher le libéralisme. C'est après tout le projet de Heidegger, de Schmitt et de quelques autres. Je précise qu'il ne s'agit en rien de légitimer le nazisme, ni la violence, et qu'il suffira de rappeler que le nazisme est lié à la forme la plus extrême de violence : l'apocalypse.
Par ailleurs, le lien entre libéralisme et nazisme s'éclaire : le fascisme sous quelque forme que ce soit exprime l'apocalypse immanentiste, quand le libéralisme saisit, au sens culinaire, le stade terminal du nihilisme. Le dernier des nihilistes, quoi. Quelle prescience hyperrationnelle chez Nieztsche! Quelle prémonition! Dommage que ce grand nihiliste n'ait pas su sortir de son ornière toute nihiliste et n'ait pas considéré que son alternative de la mutation ontologique ne permettait en rien de sortir de l'impasse.
En même temps, si Nietzsche n'avait pas manifesté l'aveuglement jusqu'à la folie, il ne serait pas le prophète de l'immanentisme tardif et dégénéré. Quand on a situé ainsi le nazisme comme le continuité ontologique du libéralisme, quand on a compris de manière finaliste les moments du libéralsime et du nazisme, il est impossible d'opposer libéralisme et fascisme. D'un coup, s'éclaire l'alliance perverse et contre-nature entre les tenants du libéralisme, de la démocratie et du capitalisme et les partisans du nazisme le plus dur.
Sans doute les grands patrons atlantistes qui soutenaient le nazisme ne le faisaient pas ne connaissance de cause idéologique. Mais justement, c'est quand les raisons manquent que la mentalité est la plus efficiente - que les comportements sont les plus faciles à cerner. Ce n'est pas en tant que nihiliste qu'agissait le bon Ford : c'est en tant que cynique capitaliste. Cet aveuglement n'empêche nullement la pertinence consistant à mette du sens là où il fait défaut. Après tout, c'est la démarche de la psychanalyse.
C'est aussi et surtout la démarche de toute analyse, à commencer par l'analyse qui s'exprime dans la pensée humaine. Cette démarche est encore renforcée, voire redoublée, quand on se souvient que le propre de l'immanentisme est de différer le sens. Remettre du sens pour contre l'immanentisme est un acte urgent, un acte politique, ontologique et religieux. Dans cette perspective, il est fascinant d'observer l'appropriation délirante de la liberté par le libéralisme.
Si le libéralisme est le moment du nihilisme de stade terminal, précisément la sous-évolution du nihilisme tardif et dégénéré vers son stade terminal, alors la liberté immanentiste exprime une conception assez particulière de la liberté. La conception de la liberté selon le libéralisme est explicite : c'est une définition finie qu'apporte le libéralisme de type classique, selon laquelle la répartition de la liberté est finie et harmonieuse. Pour expliquer le caractère harmonieux de la répartition, le libéralisme a recours au postulat aberrant, quoique parfaitement compréhensible de la main invisible - chère à Smith et à ses affidés.
Point besoin de grands discours pour comprendre que la main invisible et harmonieuse est fausse. Il s'agit de justifier le caractère fini et nihiliste de la liberté par un tour de passe-passe conceptuel qui ne résiste pas à l'analyse immédiate. En réalité, le mensonge libéral ne peut déboucher qu'à la domination. La liberté n'est ainsi pas la répartition finie et harmonieuse, soit enfin la possibilité d'une clarification de la liberté, mais la répartition inégalitaire et finie. Définie définitivement.
La main invisible fausse, la liberté définie comme finie ne peut que déboucher sur la liberté comme inégalitarisme viscéral et domination destructrice. Cette liberté partiale et partielle est typique de l'immanentisme. C'est une liberté qui en prend pas en compte la donnée classique de l'absolu ou de l'infini et qui considère que seul ce qui est fini est reél. Que ceux qui considèrent Spinoza comme un maître de libération supérieure se lève et comprennent l'impéritie de leur considération.
En attendant, il serait temps de mettre en perspective cette liberté finie et dominatrice avec la définition des Lumières, singulièrement celle de Kant : la liberté s'arrête où commence celle d'autrui. On peut s'extasier de cette définition impeccable et estimer que les Lumières ont apporté la preuve de leur puissance révolutionnaire, qui politiquement débouchera sur les Révoltions.
Las! c'est ne pas tenir compte de l'exclusive définition marchande de la liberté, qui assimile liberté et propriété. Kant et les Lumières (qu'il représente en tant qu'emblème) proposent une définition politique dans la mesure où ils ne retiennent que la dimension marchande de la politique. Kant est ainsi typiquement un libéral, libéral sans doute modéré, mais libéral. C'est ne rien comprendre au processus libéral en tant que sous-processus immanentiste que de distinguer le libéralisme de ses formes présentées antagonistes, comme le fascisme ou le communisme.
En réalité, elles sont complémentaires ou successives, en tout cas pas antithétiques. Le fascisme, complément du libéralsime, voilà qui explique ontologiquement les dérives politiques actuelles, comme la sécurité, le terrorisme, les guerres... Il serait miraculeux que le libéralisme soit dénué de formes complémentaires. On sait que le mondialisme atlantiste et ultralibéral est une forme proche de l'internationalisme de type collectiviste - ou du continentalisme cher à Haushofer ou aux doctrines fascistes.

lundi 9 mars 2009

Quand les banques centrales se relâchent, ça sent l’hyperinflation…

http://www.solidariteetprogres.org/article5206.html

"7 mars 2009 (Nouvelle Solidarité) –Le 5 mars entrera comme une date historique dans l’histoire du XXIe siècle, celle du début de la plus grande hyperinflation des temps modernes.

Car ce jour, pour la première fois depuis sa longue existence de 315 ans, la Banque d’Angleterre, par la voix de son gouverneur Mervyn King et du Chancelier de l’échiquier Alistair Darling, a annoncé qu’elle mettait en route la planche à billets. Il s’agit d’imprimer 75 milliards de livres (environ 85 milliards d’euros), première tranche d’un total de 150 milliards de livres. Après avoir baissé son taux à 0,5%, le gouvernement Britannique estime qu’il s’agit de l’arme ultime capable d’empêcher que l’économie britannique sombre dans une grande dépression ou « souffre » d’un « excès de déflation ». En réalité, l’argent fraîchement imprimé servira à racheter des emprunts d’Etat et des obligations d’entreprise, en bref, à colmater les brèches d’un système bancaire agonisant.

Cependant, même en Angleterre, personne n’est assez niais pour ne pas y voir le spectre menaçant de la grande crise hyperinflationniste de l’Allemagne de Weimar ou celle qui a ruiné plus récemment le Zimbabwe. Un éditorialiste du Telegraph note que « créer de l’argent, après tout, est une illusion – et, en temps normaux, conduit à une hyperinflation du type Zimbabwe ».

Le fait que la mesure est qualifiée, en termes techniques, de « quantitative easing » (traduit en français comme « assouplissement », ou « relâchement » quantitatif), a réveillé le talent de plusieurs caricaturistes outre-Manche. Un dessin dans le quotidien The Independant montre Gordon Brown poussant une brouette remplie à raz bord avec des billets sous forme de rouleaux de papier hygiénique. Brown y annonce : « Je ne fais que sortir pour un peu de relâchement quantitatif »… En bref, Gordon Brown annonce la couleur, méfions-nous des odeurs !

De son côté, la Banque centrale européenne (BCE) a baissé jeudi ses taux d’intérêts d’un demi point à 1,50% et son président Jean-Claude Trichet a annoncé que la BCE n’exclut pas d’adopter à son tour des mesures d’assouplissement quantitatif pour stimuler l’économie. « Je ne veux pas en dire plus pour le moment », a-t-il indiqué, ajoutant que la BCE communiquerait à ce sujet en temps voulu.

En référence à ces propos, Christine Lagarde s’est félicitée que la BCE envisage des voies d’action « non conventionnelles » pour juguler la crise. « Ce qui est intéressant aujourd’hui, c’est de constater que, après la Fed, maintenant la Banque d’Angleterre, et peut-être la BCE -c’est en tout cas ce que laisse supposer les déclarations des uns et des autres- envisagent des mesures un petit peu alternatives et non conventionnelles », a-t-elle ajouté."

Save driver

Tiens, entende qui pourra. C'est le plus grand des chanteurs qui se produit. En public. L'esclavage, le colonialisme, l'impérialisme. Je m'excuse, mais les choses sont ainsi : la beauté ne s'obtient sans doute que par la confrontation paradoxale et profonde avec ce que le reél produit de plus dur, de plus cruel, de plus révoltant.

dimanche 8 mars 2009

Pémagogue

A François l'embrouille.



"Qu'est-ce qui distingue une phrase littéraire, une phrase de Proust par exemple, d'une phrase de tel écrivain de best seller ou de gare actuel?"
François Bégaudeau, Café littéraire, France 2.

Je viens de voir à la télé un péteux de dernière catégorie, un ancien professeur qui défend d'autant plus les billevesées style IUFM qu'il n'exerce plus depuis longtemps comme prof de banlieue et qu'au vu de sa bonne fortune fort peu littéraire, notre impétrant n'est pas près de se retrouver devant ses chers élèves... Entrent les purs... C'est ce qu'on appelle un pédagogue, dont on remarquera que le phénomène phonétique n'est pas éloigné du tout de : démagogue. Tout un programme. Bégaudeau le rigolo préfèrera sans doute parler de foot, mais pas de dopage, de froid ciné, mais pas du show business, de haute réflexion, mais pas de vraie pensée, de gauche, mais pas de droites, de collège, mais pas de collage. Bégaudeau raconte n'imp' et c'est pourquoi il fait le prof comme d'autres font les clowns ou les clones : pour nous seriner des fadaises sur l'école qui fonctionne comme sur des roulettes à condition qu'on arbore une certaine mentalité, que le niveau n'a pas baissé, juste changé (de perspective), que nous vivons une époque formidable où l'on fait du foot, du punk, de l'agrèg, enfin de la télé. Bégaudeau se foutrait-il tout bonnement de la gueule du monde? Il a raison, puisque ça fonctionne! Et l'on se rappellera que Bégaudeau est un nom très proche de Beigbeder. Les deux sont animateurs. Les deux sont écrivores. Les deux sont imposteurs.

http://www.marianne2.fr/Cannes-Begaudeau,-il-vaut-mieux-le-voir-au-cinema-que-le-lire_a87660.html


"Cannes : Bégaudeau, il vaut mieux le voir au cinéma que le lire.

Auteur du roman «Entre les murs» qui a inspiré le film éponyme de Laurent Cantet, primé à Cannes, François Bégaudeau incarne jusqu’à la caricature cette pensée à la mode qui prétend que toute faute d’orthographe est une preuve nouvelle de créativité. L’intégration suivra… L’auteur aura, au moins lui, réussi son intégration dans le microcosme médiatique.



Cannes : Bégaudeau, il vaut mieux le voir au cinéma que le lire

Télérama
adore, les Inrocks en redemandent, Le Nouvel Obs en raffole. Et Cannes, la luxuriante et frénétique, y discerne même un message politique. Bref, c’est tout Saint Germain et sa lointaine banlieue festivalière qui aime à se reconnaître dans la vision de l’école que propose François Bégaudeau, auteur du roman «Entre les murs» qui a inspiré le film de Laurent Cantet.
Clone professionnel de Beigbeder, Bégaudeau a vite fait son trou dans le Paf. Prof en disponibilité, il occupe les médias à tour de bras : auteur de papiers d'humeur dans des magazines tendance, chroniqueur télé et, désormais, acteur. Etonnante d’ailleurs que cette déclaration d'amour, que l’on voudrait croire sincère, pour le métier « d’enseignant de banlieue » quand on se met en disponibilité pour se consacrer à des activités bien plus hype comme le cinéma, la télévision, les chroniques littéraires et les débats mondains.

Prof devant les caméras
A croire que le métier de prof en banlieue n’est, en effet, jamais aussi formidable que quand on ne l’exerce plus — ou pour les seuls besoins du septième art. Car si François Bégaudeau se plaît à répéter qu’il connaît véritablement l’école et ses difficultés, il est aussi sans doute le seul prof qui attend le « ça tourne ! » du réalisateur pour commencer son cours.
Jean-Paul Brighelli, prof, essayiste et auteur de «La Fabrique du crétin», se félicite d’ailleurs de l’attribution de la palme d’Or au film de Laurent Cantet : « Je crois que Bégaudeau est en vacances de l’éducation nationale depuis deux ans. Grâce à cette Palme d’Or, il va pouvoir gagner suffisamment d’argent pour ne pas y revenir. C’est le seul vrai bon point que je vois ».

Une littérature sans estomac
Brighelli tient tout de même à faire une très nette distinction entre le film de Laurent Cantet et le livre de François Bégaudeau : « Le film est peut-être très bien. Personnellement, j’avais beaucoup aimé Ressources humaines. Dans l’histoire du cinéma, il y a des exemples d’adaptations de romans moyens qui ont donné des chefs d’œuvres. Le roman de Kessel, Belle de Jour, adapté par Bunuel en est un exemple. De même, il est fort possible que Bégaudeau soit très bon acteur dans son propre rôle car comme le disait Diderot un comédien c’est « une structure vide dans laquelle on peut faire entrer n’importe quoi » » ajoutet-il « mais le livre est à la hauteur de son auteur. C’est la description d’un monde irréel, la vision du prof qui a beaucoup à apprendre de ses élèves. Il correspond exactement à la définition que Pierre Jourde faisait de la littérature sans estomac ».

Un film à destination des vieux
Une littérature consensuelle à souhait, convaincue de faire oeuvre de salubrité publique. D’ailleurs, tout juste distingué de sa palme, suffisant comme jamais, Bégaudeau y allait de ses certitudes : « C'est plutôt un film à destination des vieux, si je peux me permettre. Il y a un discours sur la jeunesse qui est vieux comme le monde et qui a tendance à s'intensifier depuis quelque temps, à savoir: les jeunes sont cons, les jeunes jouent aux jeux vidéo, ils sont analphabètes etc. »
Un discours aussi platement binaire qu’angélique auquel on aimerait presque adhérer. Malheureusement aussitôt démenti, malgré lui, par l’un des jeunes acteurs du film, réagissant à l’attribution de la Palme d’Or au film de Laurent Cantet: « Si on nous aurait dit qu'on irait à Cannes, je l'aurais pas cru. Si on nous aurait dit qu'on aurait la Palme d'or, non plus ».
Il est des retours brutaux à la réalité.

Brûler des voitures, une preuve de puissance
Si la plupart des politiques ont salué le prix attribué au film de Laurent Cantet, à l’époque de la sortie du livre de François Bégaudeau peu s’étaient félicités de sa formidable clairvoyance : «Si on est dans la rue et qu’on brûle des voitures, d’une certaine manière, on fait preuve de puissance et on essaye de revendiquer une forme d’énergie. Et ça, ça n’est pas rien» , expliquait ainsi l'ex-prof dans un débat l'opposant à Alain Finkielkraut.
Bégaudeau ne disait pas si le constat était aussi valable quand les énergiques jeunes gens prennent pour cible l'école du quartier..."

samedi 7 mars 2009

Projection

Parole typique de pervers, qui projette sur son contradicteur sa propre perversion :

«C’est un mécanisme très pervers! C’est le même mécanisme que Faurisson. Vous prenez un petit bout de la réalité et vous dites : là il y une erreur ! une bizarrerie, une chose étrange ! On fait ça pour le 11 septembre. C’est bizarre, le troisième immeuble s’est effondré de manière bizarre !"
Laurent Joffrin, Médialogues, d’Alain Maillard et de Martine Galland, Radio Suisse Romande, mercredi matin 25 février 2008.

1) On notera pour commencer le fâcheux et constant rapprochement avec le négationnisme, la Shoah et l'antisémitisme. Quel rapport entre le 911 et la Shoah? Aucun?
2) On notera pour continuer que Laurent Mouchard (c'est son nom selon Wikipédia) est un ancien de la French American Foundation, une fondation notamment fondée par Kissinger et notamment financée par David Rockefeller. Quand on a compris quelle faction financière finançait la FAF, faut-il s'étonner que Joffrin le Magnifique (c'est son surnom selon moi) ait contribué dans la mesure de ses moyens à relayer la version officielle du 911, soit la version des dites factions financières, et des médias qui leur appartiennent, et auxquels Joffrin collabore depuis trente ans? D'ailleurs, pour qui travaille Joffrin depuis 2006? Pour Édouard de Rothschild de Libération.
3) On notera en corolaire que Joffrin s'aligne sur la même ligne que Richié l'ancien de Libération (tiens, tiens...), désormais journaliste à Rue 89. Sur une ligne que partagent (quasi) tous les journalistes des médias officiels. Richié et Joffrin sont ainsi des avatars représentatifs d'une ligne d'anciens de la FAF. Sans en déduire que la version officielle du 911 découlerait des rangs exclusifs de la FAF, on peut raisonnablement inférer de ce rapprochement idéologique patent que la version officielle est d'obédience atlantiste et que tous les relais médiatiques atlantistes propagent la version lancée par les stratèges comme Kissinger et consorts. Les inspirateurs sont les factions bancaires et les cercles financiers. Comprend-on que tous les rouages de l'atlantisme suivent comme un seul homme - ou presque?
4) On notera sur le fond que la vraie réfutation du 911 s'établit à partir de l'ensemble des faits et non d'une de ses parties. Toujours la projection? Qui fabule? Qui se trompe? Qui s'égare? Les erreurs se comptent par dizaines, à la pelle (à tarte), et ne sont pas des vétilles éparses ou des broutilles fragmentées. Ce sont les propagandistes officiels à la Joffrin qui se focalisent sur des bouts de réalité pour s'accrocher à leur version officielle aberrante et perverse. Perverse? Il est profondément pervers de bafouer la souffrance des victimes du 911 et des victimes de la guerre contre le terrorisme en accusant un suspect non inculpé et introuvable depuis huit ans. C'est cela, prendre un petit bout de la réalité : faire son Faurisson?

vendredi 6 mars 2009

Duplication systémique

"Je veux surtout pas te casser ton moral
Mais c'est le bordel quand t'entres pas dans leur panel."
NTM, Nique le CSA.

"Les ânes nés passent, pourtant tout est toujours à sa place,
Plus de bitume donc encore moins d'espace
Vital et nécessaire à l'équilibre de l'homme
Non, personne n'est séquestré mais c'est tout comme."
Adaptation (parodique et légère) de NTM, Qu'est-ce qu'on attend?

Quand on essaye d'expliquer aux gens que la version officielle du 911 est une supercherie grotesque et qu'elle est le prétexte pour légitimer la guerre contre le terrorisme et le Nouvel Ordre Mondial comme remède à la crise systémique effroyable, les gens vous regardent avec de grands yeux estourbis. S'ils sont gentils, ils vous répondent souvent : "Désolé, on ne peut rien y faire." S'ils sont cyniques : "Et alors?". S'ils sont méchants : "Pas de temps à perdre avec des théories complotistes qui nous empêchent d'accéder à notre petit plaisir personnel". S'ils sont pervers : "C'est faux, complotiste, paranoïaque, antisémite et négationniste".
La duplication fantomatique est là, sous nos yeux, et nous nous efforçons de l'éviter. Nous dupliquons le réel quand nous sommes confrontés à de l'inacceptable et de l'indésirable. Le réalisme immanentiste est précisément le réalisme de qui refuse le reél au nom du désir. La supercherie immanentiste consiste à postuler que le reél est compatible avec le désir. Que l'homme possède la faculté de concilier le réel et le désir.
Celui qui comprend que le 911 est une imposture comprend que le système est condamné. Que son fonctionnement repose sur l'erreur d'aiguillage. Par conséquent, il tente candidement de prévenir son entourage : "Le 911 est une supercherie, l'Occident fonctionne la tête à l'envers!". Ce spectateur lucide, qui contemple l'abîme de la duplication fantomatique, qui s'exprime notamment dans la duplication hallucinatoire entre la guerre d'Irak condamnée et la cause 911 légitimée, ne se rend pas compte qu'il commet à son tour une duplication fantomatique et fondamentale en dissociant les peuples d'Occident du système occidental désaxé.
En réalité, de même que le 911 et la guerre contre le terrorisme ne font qu'un, les peuples occidentaux et l'Occident ne font qu'un. Il est impossible de désillusionner l'illusionné dans la mesure où l'illusionné veut y croire à tout prix. Exemple à l'heure actuelle avec la crise systémique, qui engendre des comportements typiques du syndrome Titanic : faisons la fête avant que le bateau ne coule et ne pensons surtout pas au naufrage. A l'essentiel.
Œdipe se crève les yeux quand il accède à la vérité trop atroce. Œdipe ne peut supporter l'administration de la vérité. Les peuples d'Occident ne peuvent supporter l'administration de la vérité, tout simplement parce que ce sont eux qui produisent le fonctionnement occidental. Ce sont eux l'Occident. Il existe de nombreux stratagèmes pour cautionner ce système inique et pervers. Mais pour que les peuples occidentaux accèdent la vérité, encore faudrait-il qu'ils en passent par le cheminement tragique d'Œdipe.
Raison de leur résistance incompréhensible pour qui comprend que le système occidental s'effondre et connaîtra un destin funeste : ils ne peuvent supporter l'administration de la vérité sans se crever les yeux et se détruire. La vérité, c'est que si l'on arrête de dupliquer entre le système occidental et les peuples d'Occident, on comprend que le système occidental reflète une mentalité diffuse et raciste, qui ne peut fonctionner correctement depuis des siècles que parce qu'elle dispose du soutien massif des peuples occidentaux. Si le système occidental est raciste, c'est que les peuples sont racistes.
A-t-on empêché en Occident, par des soulèvements populaires, des insurrections syndicales, les scandales? Non. On pratique la politique de l'autruche et l'on fait comme si rien ne s'était passé, en escomptant que les choses s'arrangent miraculeusement. C'est ainsi que l'on détourne le regard quand le 911 est évoqué. Et JFK? Le Vietnam? Kissinger? Pinochet? Seoud? Inintéressants.
On peut clairement parler de responsabilité populaire ou institutionnelle quand au nom d'un État certaines factions pratiquent des actes criminels et illégaux. C'est ainsi que l'on évoque la responsabilité du peuple allemand dans les atrocités commises par les nazis. C'est ainsi que la France de Mitterrand fut condamnée pour ses crimes dans l'affaire piteuse du Rainbow Warrior. C'est ainsi qu'en toute conséquence, il faudra bien envisager la responsabilité du peuple israélien dans son silence ayant valeur d'acceptation de la politique de destruction du peuple autochtone palestinien.
Dès lors, on ne peut pleinement comprendre les réactions de silence, d'effroi et de soutien face au fonctionnement désaxé du système occidental que si l'on mesure que le système occidental est le produit de l'ensemble des peuples d'Occident, pas seulement de quelques factions nourries et incontrôlables. Si tel était le cas, voilà belle lurette que des forces institutionnelles représentatives de la volonté générale, de la volonté majoritaire, auraient mis fin à des agissements criminels de la plus haute gravité. Ce sont les peuples occidentaux qui sont responsables de la politique de l'Occident.
Tel n'est évidemment pas le cas. On peut se contenter de choisir des boucs émissaires et de stigmatiser les élites, certaines élites, les banquiers, certains banquiers, les financiers, certains financiers. En plus, on aura partiellement raison, car ces élites corrompues sont parfaitement coupables. Mais on aura aussi tort parce qu'on aura oublié d'envisager l'ensemble du problème. Et le problème intégral, c'est que les agissements de ces factions élitistes et corrompues ne sont possibles que parce qu'ils bénéficient du soutien, sinon direct, du moins diffus et massif, de la masse occidentale.
Qui ne dit mot consent. Si l'on résume, nous avons affaire à un système qui profite concrètement et unilatéralement aux peuples occidentaux. C'est un système colonialiste, impérialiste, prédateur, inégalitaire, raciste et eugéniste. Ce système est mis en place par des élites intellectuelles et politiques qui sont lucides avec les conditions d'établissement et qui légitiment ces conditions atroces par le prétexte de la domination et de la nécessité.
Ces élites lucides sont soutenues par un réseau de relais de propagande qui appartiennent à des couches sociales supérieures, matériellement aisées, et qui estiment représenter l'élite alors qu'elles n'en sont que l'instrument.
Puis viennent les classes moyennes, dont Solon a justement dit qu'elle constituaient le ciment de toute société pérenne. Ces classes moyennes suivent mimétiquement et souvent servilement. Elles se fient à leur intérêt immédiat, qui est le suivant : peut-être existe-t-il scandales et injustices, mais en tout cas, elles mangent, elles boivent et elles dorment à peu près correctement. Quand ces conditions viendront à manquer, elles se révolteront. D'ici là, elles cautionnent : le prix de leur soutien se situe à la limite de leur besoin matériel (je dirais : alimentaire).
Quand les classes moyennes souffrent trop de la répercussion inexorable de l'effondrement lent de leur système, elles ont le choix entre deux alternatives : soit se révolter; soit choisir le prétexte sécuritaire. C'est ce qu'elles font. C'est dire à quel point les classes moyennes sont conservatrices, c'est-à-dire à quel point elles souhaitent conserver le système qui les choie quand même plutôt et qui leur agrée, peut-être imparfaitement, mais enfin, prioritairement. Au fond, elles ne font que relayer le conservatisme de tout leur système, dont les formes de conservatisme explicite sont sans doute les plus virulentes (l'expression des classes dominantes ou s'estimant telles).
Dans cet ordre d'idée il faut comprendre qu'il existe un conservatisme qui se présente comme progressiste et qui est effectivement progressiste dans la mesure où il souhaite un certain progrès. Pas le progrès de l'homme ou de la société, mais le progrès du système occidental. Le progrès d'un système impérialiste. C'est ainsi que l'on peut fort bien soutenir de manière conservatrice le système occidental au nom de valeurs que l'on estime progressistes. On est alors un impérialiste progressiste qui oublie l'impérialisme pour mette en avant le progressisme.
On pourrait évoquer le contresens de ceux qui situent les responsables des politiques issues de l'impérialisme, non dans les rangs de l'impérialisme, mais dans les rangs des victimes de ces politiques. C'est ne cerner l'enjeu du problème qu'en se concentrant sur une conséquence partielle et secondaire. Pourtant, il n'est pas insurmontable de comprendre que les responsables sont des factions transversales, qui intègrent dans leur giron tant des "colons" que des "colonisés".
On peut faire mine de ne voir que certaines parties et ainsi incriminer seulement les colons (vision progressiste naïve) ou les colonisés (vision conservatrice naïve). Le must de la confusion savamment entretenue consiste à incriminer seulement le parti des colonisés au nom du progressisme. Manière de déculpabiliser à peu de frais le néocolon, soit l'Occident, au nom du progressisme impérialiste.
Cependant, le point névralgique tient à l'état factuel du monde : l'impérialisme fonctionne sur la domination par une minorité de la majorité. Le système impérialiste occidental asservit l'insigne partie de la planète pour perpétuer sa domination. La prospérité matérielle occidentale n'est possible qu'avec l'exploitation du reste de la planète. Les populations occidentales profitent d'un système qui les protège parce qu'elles abritent en leur sein les factions oligarchiques dominantes. On se demande toujours : pourquoi la prospérité n'est-elle pas mondiale alors que les possibilités techniques existent largement? Pourquoi est-elle seulement occidentale? On répond que c'est la faute des anciens colonisés, des dictateurs, des élites autochtones corrompues, et autres explications fumeuses, alors qu'on cherche seulement à déculpabiliser le système impérialiste occidental en expliquant que l'état florissant de l'Occident découle des politiques supérieures qu'il a mises en place et qu'il est le seul à avoir établies.
Si les autres crèvent de faim, c'est qu'il n'ont pas été capables de surmonter leurs dysfonctionnements.
1) Si l'on est impérialiste progressiste optimiste, on estime qu'ils en seront capables.
2) Si l'on est impérialiste progressiste pessimiste, on juge qu'ils n'en sont pas capables. Position hypocrite et désaxée d'un Bruckner.
3) Si l'on est un impérialiste pragmatique explicite, on accepte cette inégalité foncière en rappelant qu'elle est nécessaire et qu'il ne faut pas se désoler d'avoir la chance d'appartenir au camp des élus.
4) Si l'on est par contre un impérialiste pragmatique implicite, on s'affiche anticolonialiste, on lutte contre les inégalités en se gardant bien de remonter jusqu'à la source des inégalités, le système auquel on appartient, le système occidental impérialiste. On guérit des conséquences superficielles pourvu qu'elles reviennent et à condition de pas affronter la cause de ses problèmes. On travaille sur quelques conséquences disparates pour se donner bonne conscience et on montre l'étendue de son impérialisme de bonne foi et de bonne conscience quand on refuse d'affronter les implications de la cause.
On notera que finalement toutes ces positions sont des impérialismes plus ou moins assumés, plus ou moins hypocrites, et que l'impérialisme progressiste pessimiste est fort proche de l'impérialisme pragmatique implicite. Osons le vrai terme de la vérité : le progressisme et le pragmatisme se rejoignent sur leur identité commune et profonde d'impérialisme. Bonnet blanc et blanc bonnet, quoi.
Tu ne parviendras jamais à déciller l'aveuglement entêté des impérialistes parce qu'ils sont les heureux bénéficiaires de l'impérialisme. Telle est ton erreur. Telle est ta duplication fantasmatique. Tu aimerais tellement que le bourreau prenne conscience de sa faute et change. Tu aimerais tellement que l'ogre s'améliore, qu'il devienne soudain bon, gentil, serviable et généreux. Peine perdue! Cause perdue! Tu aimerais tellement qu'Œdipe accède à la vérité et se transforme en homme respectable, après avoir réparé la faute initiale de sa vie. Tu aimerais tellement que l'homme n'ait pas péché. Tu aimerais tellement être heureux que tu préfères ne pas voir et que tu dupliques pour ne pas voir.
Qu'est-il arrivé aux passagers du Titanic? Ils ont préféré détourner les yeux, festoyer, rire et danser, alors que leur navire inoxydable fonçait vers son naufrage prévisible. Le seul moyen pour eux d'accepter l'évidence aurait consisté à accepter leur faiblesse. Ils ont fini dans les pleurs et la douleur. Souffrance océane. Qu'est-il arrivé à Œdipe? Il a préféré détourner les yeux, régenter et administrer. Il a fini les yeux crevés, identitairement détruit, d'avoir tué son père et couché avec sa mère. Prix du pouvoir, tribut de César. Œdipe aurait évité son destin tragique et funeste s'il avait eu la force d'accepter l'oracle qui lui prédisait qu'il coucherait avec sa mère et qu'il tuerait son père.
Enseignement de Rosset : on réalise le reél quand on prétend l'éviter. On apaise le reél quand on accepte ses manifestations inéluctables, y compris les plus désagréables. Malheureusement, je crains fort que les peuples d'Occident ne soient pas en mesure d'accepter l'évidence de l'impérialisme du système qu'ils ont forgé et qu'ils continuent à entretenir, comme un feu de gangrène. Du coup, l'issue est inéluctable : le système occidental va disparaître et il n'y a rien à faire. Avertir du péril imminent est aussi inutile que dans les cas historiques ou mythiques évoqués précédemment.
Il ne sert à rien d'avertir du danger quand la future victime ne veut pas savoir. Il ne sert à rien d'avertir les passagers du Titanic, à rien de prévenir Œdipe, à rien de mettre en garde les Babyloniens (contre le projet Babel), à rien d'alerter les habitants de Sodome et Gomorrhe. S'ils avaient les moyens d'empêcher les terribles évènements advenus, ces évènements n'auraient précisément jamais eu lieu.
L'Occident va tomber, l'Occident va s'effondrer, et cette annonce mortifère est finalement une bonne chose, la seule bonne chose. Quand un système est trop gangréné, trop corrompu, trop pourri, la seule manière de l'améliorer consiste à le changer. C'est une réalité saine que les systèmes gangrénés s'effondrent : ainsi ils contribuent à pérenniser le reél en provoquant eux-mêmes leur chute, au lieu de colmater les brèches et de retarder leur issue.
Au vingtième siècle, de nombreux observateurs ont prévenu de cette chute. Parmi les victimes lucides, les Rastas de Jamaïque ont été parmi les plus prophétiques, en adoptant les récits bibliques de la chute de Babylone pour les appliquer à l'Occident esclavagiste et colonialiste. On peut s'étonner de leur science oraculaire et estimer qu'elle descend d'un pouvoir chamanique ou divin. Mais c'est oublier que leur lucidité leur vient de leur position de victime critique.
Il faut vivre la situation du colonisé et de l'esclave pour prendre conscience de ce que sont le colonialisme et l'esclavage. De ce qu'est l'impérialisme. Si l'on n'est pas confronté à ces situations de violence et de destruction, on n'en a pas conscience. Tout simplement. Et la dernière chose à faire, la plus folle, consiste à attendre du colon (ou de l'esclavagiste) qu'il prenne conscience de la violence du système qu'il incarne après l'avoir instauré. Attendre de l'impérialiste qu'il prenne la mesure de l'injustice de l'impérialisme?
Autant demander à un empoisonneur de guérir sa victime ou à un pyromane de mette fin aux incendies qu'il a fomentés. La plus haute duplication consiste à attendre d'un impérialiste qu'il change son comportement impérialiste et qu'il accède à la souffrance que son système inflige à ses victimes de par le monde. A la haine de plus en plus virulente qu'il suscite parmi les victimes. C'est impossible. La prise de conscience n'est possible que parmi les victimes. Et encore : il faut que la victime possède un point de référence solide, quasi miraculeux, comme le refus de la violence ou tout autre type de revendication profonde.
Les Rastas de Jamaïque avaient l'exemple du Christ pour amorcer leur prise de conscience. C'est l'impulsion critique qui a produit Bob Marley. Pour le meilleur et pour le pire. Marley n'a pas empêché la poursuite (et l'aggravation) de l'impérialisme, sur son île comme en Afrique (et dans le reste du monde), mais il nous a laissé la plus belle oeuvre des chansonniers modernes.
Sans doute est-ce le parti à tirer de la duplication fantomatique : elle ne nous aide pas à en finir avec nos maux; mais elle nous pousse à changer et à progresser. Changer et progresser au sens littéral : nous avons besoin d'accroître notre territoire, notre domaine de lutte comme dirait l'autre, pour échapper à notre démon : si nous n'avançons pas, loin de cesser de dupliquer, nous dupliquons de plus belle - et nous disparaissons.
Si nous avançons, alors nous allons dans l'espace et nous sauvons l'espèce. Il est probable que ceux qui sauveront l'espèce se trouveront parmi les réprouvés et les damnés paroxystiques actuels : les Africains. Les victimes de l'impérialisme occidental. Ceux qui bêtes et méchants accèderont miraculeusement à la technique la plus haute pour sauver l'homme et lui faire découvrir son nouvel espace. Vital. Et nécessaire.

mercredi 4 mars 2009

1664

Tiens, moi qui aime tellement la chanson, et tellement peu le rock, en particulier le boum-boum hexagonal, totalement récupéré par le système du show-business et totalement calqué sur le modèle ultralibéral et américain, j'ai beaucoup ri du coup pendard qu'un chanteur que je ne connais pas, et dont je me désintéresse, Saez, a produit aux Victoires de la Musique.
Après la présentation sobre de Nagui, Saez monte sur scène et entonne deux chansons pour dénoncer les désaxés qui prétendent gérer le système financier et monétaire dans le monde. On écoutera notamment la seconde, qui débute environ à 5' 48''. C'est peut-être seulement du rock français, trop de bruit et de cris, mais c'est largement mieux que le collarock Johnny H., qui, quand il ne snife pas des lignes de coco, appelle à voter Sarko & Co.
J'aimerais ajouter qu'il serait fâcheux que l'on tombe dans la démagogie comme prolongement de la démocratie. C'est ce contre quoi avertissaient les Anciens. Que l'on passe de l'admiration inconditionnelle à l'opprobre universelle. Ce qu'il faut, c'est du discernement. Non pas brûler et détruire, non pas le chaos et la haine, mais le jugement et le discernement. Non pas brûler les Bourses des banquiers. Ce serait le meilleur moyen de leur donner une nouvelle légitimité. Leur faire la peau pour leur fournir une nouvelle peau. Pas de pot d'ours. Il est largement plus constructif de juger les banquiers, les financiers et toute la clique des spéculateurs et des profiteurs qui escomptent que leurs désirs correspondent au reél.
Il est temps de condamner les coupables et de comprendre qu'avant que les extrémistes ulcérés par l'injustice du mondialisme et du Nouvel Ordre Mondial déclenchent des révolutions, des insurrections et des massacres, avant que le Sud ne renverse le Nord occidental, la culture humaine peut profiter de la crise systémique qui se profile pour échapper au mondialisme et transformer la mondialisation comme processus irréversible en force constructive et progressiste.
Pour ce faire, pour sauver l'espèce des espèces frelatées, l'homme du diable, je ne distingue qu'un seul chemin, la réconciliation de deux soi-disant antipodes : la réhabilitation de l'Afrique; la voie de l'espace. Comme l'a dit un anonyme je crois, les premiers seront les derniers. Sans doute que quelques esprits dérangés auront entendu à tort : les premiers seront les deniers. Qu'ils mettent leur erreur à profit (c'est le cas de le dire) et que nos croupiers décrépis aillent croupir - en prison!


Prière de ne pas rire

Parole de supporter de football, à propos de la nouvelle conquête de Cristiano, le clo(w)ne du vrai Ronaldo : "Cristiano est fasciné par le corps de Gabriela."

mardi 3 mars 2009

L'ex pair de l'âme et son maître

Notre époque d'immanentisme tardif et dégénéré, en phase terminale, met en lumière l'importance des think tanks. Les réservoirs à idées sont une spécificité de la vie intellectuelle anglo-saxonne. Ils ont essaimé en France - et en Allemagne. En Occident. On pourrait définir les think tanks comme de la production d'idées au service de l'action. C'est ainsi que l'un des principaux réservoirs à idées d'Amérique, la Heritage Foundation, se conçoit comme un prêt-à-penser au service des politiciens républicains et de l'action des gouvernements républicains. En France, on assiste depuis une décennie à la mode contagieuse de ces clubs, qui tous sont jumelés avec des frères anglo-saxons. En Angleterre, le club est la réunion privée. C'est aussi un terme qui se veut chic et smart, voire snob.
Le club est une association avec des intérêts et des goûts communs. C'est aussi une société où l'on s'entretient des affaires publiques ou de questions philosophiques et politiques, selon le TLF. On comprend que l'autre sens, toujours selon le TLF, désigne un "groupe de personnes issues de milieux politiques ou professionnels divers, qui organise des réflexions, quelquefois suivies de publications, sur des questions politiques, économiques ou sociales." Nous y sommes. Le club devient rapidement aristocratique : le Jockey-Club est l'incarnation, de ce mode de vie. Parasite/parisianiste, notamment dans les ouvrages de Proust.
Le club peut aussi désigner une association sportive, étant entendu que le sport exprime et propage les idées de l'immanentisme. L'immanentisme conçoit les idées comme des données finies, dont le but appartient au néant si elles ne servent pas immédiatement, soit si elles ne servent pas l'action. Si elles ne sont pas efficaces. Raison pour laquelle un immanentiste est incapable de concevoir la production d'idées pour les idées ou l'action des idées en dehors de l'action directe et immédiate. L'immanentiste est cet adversaire de Platon et de tous ceux qui conçoivent que la vraie richesse de la pensée passe paradoxalement, mais profondément, par l'absence de but et d'efficacité. Si vous transmettez des idées qui ne servent pas le sens du pouvoir, l'immanentiste vous répondra que l'on ne peut rien y faire ou que le geste gratuit ne sert à rien.
S'il en vient à raisonner d'une manière aussi efficace et conformiste, c'est parce qu'il raisonne en immanentiste, bien entendu sans s'en rendre compte. Il ne peut comprendre ce que sont les idées. Le principe de l'immanentisme est d'agir en tant que mentalité du non-dit; puis de propager ses conceptions tacites et implicites au sein des populations mondialisées, qui suivent ce mode de raisonnement sans s'en rendre compte. Précisément sans esprit critique, puisque l'esprit critique et la remise ne question sont les ennemis de la mentalité immanentiste. On applique, on ne critique pas. Sinon l'on se montre contestataire, ce qui n'est pas loin de représenter le crime suprême et l'interdit par excellence.
Très peu de moutons agissent sciemment sachant que leur comportement moutonnier recèle le meurtre mâtiné de suicide. De désespoir. D'absence de sens et de sens absurde de l'absurde. Les Autres, l'enfer bien connu, suivent mimétiquement. Que l'on s'enquière du rôle avéré que jouent les médias, la musique ou le cinéma dans la propagation de valeurs occidentalistes. Les jeux vidéos et maintenant les plateformes d'échange Internet. Facebook, face de bouc.
Aujourd'hui que n'importe quel gamin du monde unique s'identifie aux stars, Hollywood et Bollywood, à leurs (re)productions manichéennes, aux clips de rap et de r&b (revisité), à toute cette quincaillerie sonore et sonnante de blingers, notre bon mouton immanentiste élevé à la sauce occidentale est empli d'une idéologie dont il ne soupçonne pas même l'existence. A vrai dire, il en va à l'identique avec le cadre de la classe moyenne occidentaliste qui partage certaines valeurs pernicieuses (en premier lieu pour lui) sans se rendre compte qu'il sert ce qui le dessert. Le thème du travail est l'obsession récurrente de n'importe quel quadra dynamique, qui ne pense qu'à exhiber par sa force de production sa valeur(économique), alors que cette valeur repose sur un malentendu, et, pis, se voit exploitée par les factions de voleurs.
Dans le fond, c'est le rôle des penseurs immanentistes que de pondre des orientations qui seront par la suite ventilées en fonction des formations et des fonctions. L'évolution des penseurs immanentistes est intéressante. L'immanentisme suscite la rupture avec le transcendantalisme. La figure du transcendantalisme est le prophète. L'immanentisme insiste sur la rupture qu'il instaure avec la religion.
En soutien inconditionnel de la Raison, il substitue aux prophètes et à leurs interprètes les prêtres la figure alternative du philosophe. Selon une étymologie controversée, mais fort intéressante, du professeur zaïrois Obenga, le philo-sophe désigne l'éducateur en Afrique antique. C'est dire que la tâche première et essentielle de l'immanentisme réside dans l'éducation. Si l'on considère l'état objectif de l'éducation dans les pays d'Occident, et non la propagande servile qui discute de savoir si le déclin ahurissant n'est pas plutôt changement d'optique, alors les valeurs immanentistes sont en déclin accéléré au fur et à mesure de leur développement On peut même oser que l'immanentisme entre dans sa phase terminale de sa forme tardive et dégénérée.
En tout cas, l'immanentisme s'appuie au début de son avènement sur les philosophes. Cas de Spinoza, de Leibniz, de Rousseau, de Kant - des grands philosophes de la modernité. Descartes marque la transition. Le philosophe immanentiste figure l'usage de la Raison, soit de la raison humaine qui aurait supplanté le religieux, en contradiction avec la représentation traditionnelle du religieux, selon laquelle la raison est au service de la foi (voir notamment le concept d'arationnel). Le philosophe joue le rôle de garant des fondements de la pensée immanentiste. Spinoza incarne le plus complètement ce rôle. Il n'est pas le seul.
Bien vite, les Lumières produisent une variante affadie du philosophe qui convient plus aux besoins de l'immanentisme : l'intellectuel. Voltaire est ainsi le philosophe affadi des Lumières. Ce n'est pas un hasard si l'intellectuel surgit à l'époque des Lumières. Les Lumières signifient la prise de pouvoir intellectuelle de l'immanentisme, qui précède de peu la prise de pouvoir effective, matérialisée par les Révolutions américaine et française. La différence entre l'intellectuel et le philosophe, c'est que l'intellectuel produit des idées en relation avec l'action. En gros : avec les événements de la vie politique. Le philosophe est nommé métaphysicien en ce qu'il s'occupe de questions qui se situent au-dessus du physique. L'événement est l'idée physique.
Le philosophe ne s'intéresse pas en tant qu'ontologue ou métaphysicien aux questions politiques. Spinoza analyse le religieux et le politique après avoir proposé un système ontologique. Le propre de l'intellectuel est de court-circuiter le substrat ontologique pour commencer à réfléchir à partir des événements, soit à partir des phénomènes. L'ontologue métaphysicien interrogeait les phénomènes. L'intellectuel commence à s'interroger à partir des phénomènes. On comprend que l'intellectuel soit toujours un phénomène!
Surgissement de l'intellectuel : l'immanentisme a besoin d'idées politiques et phénoménales, pas d'idées métaphysiques au sens traditionnel, étant entendu que le socle métaphysique a été fixé par des philosophes comme Spinoza d'un manière subversive et révolutionnaire. Précisons d'emblée : révolution trompeuse, tant il est vrai que les fondements de l'immanentisme reposent sur une supercherie : le néant en tant que néant au lieu de l'Etre en tant qu'Etre.
L'éclosion de l'intellectuel montre assez que le philosophe ne correspond pas aux attentes et aux besoins de l'immanentisme à mesure que l'immanentisme prend le pouvoir - dirige et s'effondre. Je veux dire : la figure du métaphysicien ne correspond pas à la figure du philosophe immanentiste. L'immanentisme a besoin de laisser entendre qu'il a réussi son programme, que sa révolution traduit un progrès de l'homme considérable, que les fondements métaphysiques ont été subsumés une bonne fois pour toutes et que par conséquent désormais la quête est inutile. La quête est classée. L'enquête est close.
La question est de savoir si l'intellectuel surgit parce que le fondement immanentiste repose sur une supercherie et un échec ou s'il est la conséquence logique et complémentaire du philosophe. Un peu des deux sans doute. Cependant, il est certain que si la métaphysique immanentiste avait réussi, l'engagement intellectuel aurait constitué une redite plus ou moins superflue. L'échec travesti en réussite de l'immanentisme nécessite au contraire l'activation réactive de l'intellectuel, qui occupe le terrain, brasse du vent et sert de diversion polémique.
Les idées immanentistes ont besoin de formes applicables, soit de lien avec le secteur politique. Cette tendance ne fera que s'affiner et s'affirmer. Elle se manifeste bien entendu aux Lumières, qui sont une dénomination extrêmement positive de la prise de pouvoir intellectuelle de l'immanentisme précédant les Révolutions en tant que prise de pouvoir politique. L'appellation de Lumières obéit aux lois classiques de la propagande. L'intellectuel des Lumières est symbolisé par la figure de Voltaire, quand le philosophe des Lumières est incarné par Kant, dont le projet revient à refonder la métaphysique à l'aune du problème typiquement immanentiste de la représentation.
Voltaire est un styliste remarquable, dont les idées sont remarquablement pauvres. Il se montre incapable de comprendre Leibniz ou Malebranche, c'est-à-dire qu'il est incapable de comprendre la philosophie. Mais quand surgit Nietzsche en tant que philosophe/prophète de l'immanentisme tardif et dégénéré, on voit bien que le prophète religieux est incarné dans l'immanentisme par le philosophe. C'est dire que l'immanentisme a d'autant plus besoin d'un fondateur et d'un créateur de valeurs qu'il est dépourvu de fondements. Nietzsche se définit explicitement comme un créateur de valeurs et quelque chose comme un prophète qui ne serait pas religieux. Le philosophe se manifeste de manière marquante et viscérale lors des périodes de crise, de perte de repères, de manque de valeur(s). Le philosophe immanentiste tend à imposer l'idée immanentiste, soit l'idée finie et apparente - en lieu et place des arrières-mondes, jugés obsolètes.
L'immanentisme tardif et dégénéré s'exprime encore sous la plume d'un philosophe, le bouillonnant Nietzsche, comme l'immanentisme progressiste s'exprime par l'entremise de la pensée de Marx l'idéologue-philosophe. L'accélération de la dégénérescence immanentiste tend à transformer la pensée vers de plus en plus de concrétude et d'application. A côté des philosophes, dont le rôle se sacralise (paradoxalement) dans la création des valeurs et le remplacement de la figure du prêtre par un rôle défini de penseur, les intellectuels se transforment en experts.
Déjà, le philosophe mute - après les Lumières. Nietzsche n'est plus un philosophe au sens classique. Il se réclame lui-même d'une mutation : ce penseur qui se revendique styliste réfute la métaphysique. Son nihilisme se déploie dans le prolongement des sophistes, dont le but était de créer des valeurs humaines dans l'immédiat et l'apparence.
L'immanentisme viscéral s'exprime ouvertement chez Marx, qui commence par congédier poliment les interrogations d'un Hegel pour se lancer dans des considérations politiques et économiques, qui le feront longtemps tenir pour un idéologue plus que pour un authentique philosophe. Le rôle de l'idéologie est éclatant : c'est de produire des idées à des fins exclusivement politiques. C'est d'ailleurs le but que revendique Marx, qui adapte la métaphysique hégélienne, expression de la métaphysique classique, à la politique.
Autour du dix-neuvième siècle, soit au début de son échec patent et de son effondrement balbutiant, la pensée immanentiste produit de plus en plus d'idéologues/intellectuels en lieu et place des philosophes. L'immanentisme devient de plus en plus tourné vers l'action la plus pressante et urgente, comme s'il sentait l'urgence de la situation. Le fini et le sensible. Ce sont les questions politiques qui l'intéressent. Marx propose l'option du progressisme immanentiste, quand Nietzsche le conservateur appelle de ses vœux la mutation ontologique du Surhomme et de l'Hyperréel.
Parallèlement à cette évolution, on en décèle une seconde, connexe : les questions dites métaphysiques ont moins d'importance. C'est le positivisme et le scientisme qui croient naïvement dans l'ontologisation de la science. Ce sont les revendications extrémistes et comiques du cercle de Vienne, la logique mathématique appliquée à la pensée. Parallèlement aux idéologies, on assiste à l'émergence des sciences humaines. On a tendance à l'oublier aujourd'hui que la faillite du projet est explicite, mais les sciences humaines ont prétendu remplacer la philosophie. C'est cohérent : les sciences humaines finissent d'hyperrationaliser la philosophie immanentiste dans un savoir délimité et défini. Las, l'analogie scientifiques des sciences humaines est un leurre. Les plus optimistes ont dû admettre que les sciences humaines ne produisaient que de la pensée fort fractionnée.
Aujourd'hui qu'on a tendance à oublier ce fâcheux fait (que les sciences humaines ont prétendu remplacer la pensée rationnelle par la méthodologie autrement plus rigoureuse de l'analogie scientifique), on essaye de sauvegarder ce qui constitue l'intérêt spécifique et justifié du projet des sciences humaines. Du coup, on ne retient que la précision la plus périmable à court terme. La pensée scientifique est de la pensée qualitativement de valeur à court terme. Comme par enchantement, l'objet de cette méthodologie révolutionnaire se focalise sur l'homme. L'homme est ainsi le vrai centre d'intérêt des questions immanentistes, qui prétendent débarrasser la pensée de ses préjugés anthropomorphiques.
L'effondrement de l'économie comme science humaine fiable, avec des experts qui dans leur insigne majorité n'ont pas vu venir la pire crise économique de l'histoire moderne, permet sans peine d'étendre la faillite de la science économique à l'ensemble des sciences humaines. Non pour enterrer les sciences humaines. Seulement dans le but de les prendre pour ce qu'elles sont : non pas le substitut à la philosophie ou à la pensée, mais une pensée fort limitée et délimitée. L'analogie véritable de la sciences à l'étude de l'homme. Ni plus, ni moins.
Quelles idées millénaires et majeures ont produit les sciences humaines depuis qu'elles sont apparues? Quel résultat patent - sinon du fractionné, du mineur et du spécialisé? La critique que l'on peut administrer à l'économie est valable pour les autres branches des sciences humaines et sociales : en prétendant apporter une méthode plus fiable, plus précise, sinon scientifique, l'on a en réalité rendu la pensée totalement insignifiante, à tel point que les travaux sont périmés en quelques années. Quel Platon a produit la science humaine? Bourdieu? Chomsky? Dolto? Friedman? N'en jetez plus.
En prétendant substituer du fini fiable et précis à l'infini vague de la pensée classique, les sciences humaines ont rendu finie la pensée. Finie dans tous les sens du terme. Mais ce n'est pas contre l'apparition des sciences humaines qu'il faut s'élever. C'est contre le projet de remplacer la pensée classique par la pensée scientifique en tant que positivisme mal dégrossi. Contre le dessein ontologique immanentiste tapi derrière les démarches des sciences humaines plus que contre les sciences humaines en tant que telles, qui, abordées lucidement, se révèlent fort précieuses. C'est aussi le signe que l'immanentisme tente de remplacer la pensée transcendantaliste par la pensée de l'immédiat et de la finitude. Brillant échec et mat.
Dans cet ordre d'idées, le penseur immanentiste évolue. L'immanentisme d'un Spinoza relevait encore d'un certain classique : penser en suivant son raisonnement. A cette méthode classique l'immanentisme tardif et dégénéré substitue une méthode révolutionnaire, qui consiste à transposer aux champs de la réflexion la méthode de la science moderne. On constatera que ce qu'on nomme science moderne est la réussite éclatante de l'immanentisme. Il ne s'agit pas de dénigrer les progrès de la méthode scientifique, plutôt de constater que son extension à la compréhension du réel est abusive (critique identique à l'ontologie des sciences humaines, étendue à la science moderne).
La science s'attache à analyser un objet qu'elle a isolée et qui se présente comme typiquement fini. Où sa démarche devient peu scientifique et éminemment contestable, c'est quand elle prétend étendre sa méthode efficace sur un plan très circonscrit et très fini à l'ensemble du réel. Cette extension abusive débouche sur la liquidation de tout ce qui dans le réel n'est pas fini, immédiat, apparent, superficiel.
De ce point de vue, les sciences humaines sont le résultat de cette conception philosophique de la science, dont les théories positivistes ou scientistes ne sont que des éléments parcellaires et des succédanées fragmentaires. Les sciences sociales produisent bien des résultats intéressants, mais à chaque fois rapidement dépassés - seulement fiables sur le court terme. C'est dire qu'ils prennent à contre-pied le critère de la longévité temporelle. Inutile d'ajouter que ce simple fait est peu reluisant pour la valeur de la méthode des sciences humaines en tant que substitut à la pensée classique.
L'échec de la révolution immanentiste en métaphysique, qui se matérialise par l'échec des programmes estampillés cercle de Vienne, est sans doute l'une des explications probantes à l'essor de l'interventionnisme et de l'engagement dans le domaine des idées. Pas seulement. C'en est aussi une conséquence logique et prévisible. A défaut d'avoir résolu le problème du fondement ou de la création des valeurs, l'immanentisme s'empresse d'autant plus d'accélérer le processus des idées finies ou des idées agissantes (ou actives).
C'est ainsi que l'on observe l'avènement conjoint des experts, des conseillers et des journalistes à partir du vingtième siècle. Sous l'effet de la révolution des sciences humaines, l'intellectuel évolue vers une partition de plus en plus mimétique et propagandiste. L'évolution de l'intellectuel de Voltaire à BHL est symptomatique : Voltaire était un grand styliste. Sartre un grand idéologue. BHL un grand propagandiste. Sans diminuer les mérites ou les qualités de tous ces personnages, la déperdition qualitative est criante en deux siècles. Voltaire/BHL. Voltaire/Valtaire. Le nez dans le caniveau, c'est la faute à Russell.
Le journaliste prétend répéter des faits et tendre vers l'impartialité en citant les versions contradictoires d'une même thèse en cas de controverse. On remarque pourtant que tel n'est pas le cas : l'exigence d'impartialité est le plus sûr refuge à la partialité. Lorsque l'institutionnel immanentiste s'effondre, les journalistes épousent de manière de plus en plus caricaturale la thèse officielle. Dans le 911, avec évidence, puisque le 911 exprime tel un ventriloque bavard ou un lapsus indécent le fonctionnement révélateur du coeur du système atlantiste. Pas seulement. Cependant, ce travers s'explique plus qu'il ne s'impose comme une dissonance ou une trahison du journalisme.
Le journaliste en tant que disciple des faits se placera spontanément au service de la mentalité immanentiste, qui par excellence définit le réel comme l'immédiat qui se rapproche le plus du factuel. On notera que le journaliste tend de plus en plus à se confondre avec l'intellectuel et que cette identification, que d'aucuns qualifieront de confusion fâcheuse, est tout à fait compréhensible. Le journaliste est tout indiqué pour remplir le rôle de l'intellectuel avec usure, puisque l'évènement se rapproche du fait. Le mélange des genres rapproche les parents.
Toujours au fil de la progression de l'immanentisme tardif et dégénéré, les deux figures manifestent de plus en plus de partialité et de propension à la propagande. La propagande pourrait sembler antithétique de la démarche d'objectivité ou d'impartialité. En réalité, il se pourrait qu'elle en soit le prolongement pervers et logique. Le journaliste ou l'intellectuel en viennent, au fur et à mesure que l'immanentisme décline, à propager la propagande tout simplement parce qu'en tant que disciples des faits et de l'immédiat, ils inclinent à épouser la propagande immanentiste, qui défend précisément les faits et l'immédiat.
Quant au surgissement des experts, des conseillers, des diplomates et consorts, il indique précisément que l'immanentisme dégénère et décline.Qu'est-ce qu'un expert, sinon quelqu'un qui reconnaît explicitement que le savoir est morcelé, spécialisé, défini - et fini? Comment se fait-il que nous assistions à la mode des Super Experts, qui, après avoir fait étalage de leur classe exceptionnelle dans un domaine particulier, estiment qu'ils peuvent étendre leur domaine d'expertise à l'ensemble du réel? Maîtriser l'ensemble du reél à la manière d'un petit bout de réel. Appréhender le reél comme l'on appréhende un objet infinitésimal. La goutte et l'océan.
Le réel devient ainsi vision d'un infini absolument fini, ce à quoi après tout nous invite le bon et saint Spinoza... L'expert serait-il le prolongement conséquent de l'ontologie spinoziste? Le réel expurgé de tout son mystère et de toute son absoluité présente une simplification caricaturale dont la réduction ontologique est frappante. C'est ainsi que l'expert est la figure terminale de l'immanentisme, quelque chose comme l'extrême de la figure Lumineuse de l'intellectuel. On a vu que le philosophe était en régime immanentiste le créateur des valeurs et que la création des valeurs finies avait accouché d'un échec dont le programme des sciences humaines est l'emblème aujourd'hui voilé et terni.
Le programme des sciences humaines a échoué, si bien que les sciences humaines se présentent plus comme des outils complémentaires à la pensée que comme la substitution de la pensée classique par la pensée immanentiste, scientifique et définie. L'intellectuel dans ce programme occupe la place manquante et spécifique (typiquement moderne) de penseur au service des événements ou de l'action politique. L'intellectuel est ce penseur engagé qui n'existe probablement que parce que le fondement immanentiste est incomplet et bancal.
Sans doute l'intellectuel est-il aussi l'incarnation nécessaire et prévisible de l'immanentisme qui a besoin d'une figure liant les idées à l'action. Mais il est plus que probable que si le philosophe immanentiste avait réussi à proposer une alternative et des fondements viables, l'intellectuel aurait été la réduplication quelque peu inutile du penseur. L'échec de l'alternative immanentiste à la métaphysique n'a pas seulement produit l'intellectuel comme hybride bancale et dérangé. L'accélération du processus immanentiste a engendré dans sa continuité folle, de plus en plus accélérée à son tour, la figure de l'expert comme emblème du savoir fractionné. L'intellectuel s'engageait sur l'ensemble des événements. Cas de Voltaire, qui lutte pour que le libéralisme bourgeois prenne le pouvoir. Cas de Sartre qui milite pour que la révolution d'obédience marxiste prenne le pas sur le libéralisme et le capitalisme. On constate que cette figure s'écroule avec l'exemple des Nouveaux philosophes et de leur emblème médiatique BHL, qui opère directement dans la propagande atlantiste et sioniste.
Le surgissement de la figure de l'expert signale la radicalisation de l'immanentisme, puisqu'on passe du penseur de l'action (ou de l'engagement) à la représentation de la pensée et du savoir comme un domaine fini et cloisonné. Dans cette logique, l'expert n'est pas seulement le prolongement extrémiste et réducteur, radicalisé, de l'intellectuel. Il est aussi le prolongement de l'échec des sciences humaines, je veux dire : de l'échec des sciences humaines à occuper la place de substitut de la pensée dans le domaine de l'homme.
L'expert est ainsi vraiment l'incarnation de la figure du penseur/intellectuel issu des méthodes des sciences humaines. Au rythme de dépréciation qualitative, l'expert est un penseur ultraspécialisé qui produit de la pensée hautement périmée, dont la valeur n'excède parfois pas quelques mois. Cas d'un Attali ou d'un Minc en France. Bien entendu, on ne retient des experts que les figures les plus engagées sur le terrain politique, mais c'est logique : la politique est le terrain privilégié de l'action. Lewis, Kissinger, Brzezinski, Pipes, Pastor...
La géopolitique surgit pendant la seconde guerre mondiale sous la houlette d'un savant (expert) hautement controversé, le géographe Haushofer, qui est fort lié, quoi que de manière ambiguë, au régime nazi. Que le père de la géopolitique soit proche du nazisme a de quoi intriguer. On pourrait étudier ses thèses, qui sont une alternative antithétique et continentaliste au modèle de mondialisation atlantiste. Notamment au modèle du CFR, de Chatham House, qu'un Strausz-Hupé défendit avec ténacité après la Seconde guerre. Haushofer est le symbole du surgissement de l'expert dans le monde des idées.
Au fond, les experts les plus reconnus et réputés sont ceux qui interviennent dans le champ du politique, soit les politologues, géopolitiques, économistes (la politique ayant muté en économie sous l'impulsion libérale), stratèges et diplomates. La figure du conseiller est ainsi connexe de la figure de l'expert. Le conseiller est celui qui personnifie le lien entre l'action et l'idée. Cas de Brzezinski ou de Kissinger. Cas d'Attali en France au palais de l'Élysée ou à la tête d'une Commission pour le compte du gouvernement Fillon.
Il est intéressant que les questions d'expert qui comptent le plus soient les questions de sécurité et de stratégie. Entendre par stratégie la faculté quasi divinatoire à prévenir l'avenir. Les experts en questions de sécurité sont aussi versés dans la futurologie, qui peut être appréhendée comme une science analogique, soit une science humaine, si l'on s'avise que le temps dans al mentalité immanentiste est un champ fini et clos et qu'en se montrant expert des événements politiques et des causes de ces événements, on peut prévoir le futur.
Évidemment, Kissinger est versé dans ces questions de stratégie, de diplomatie, de futurologie, de sécurité, de terrorisme (le dernier avatar de la sécurité et de la stratégie à notre époque postmoderne de guerre conte le terrorisme et de Nouvel Ordre Mondial). Évidemment, les futurologues experts se trompent de manière cocasse dès qu'on relit leurs prévisions à six mois, et c'est sans doute un élément rassurant et réconfortant, qui permet de mesurer l'erreur de leurs méthodes et de leur conception ontologique. En France, on se reportera avec délice aux erreurs d'un Attali futurologue de son désir plus que de l'avenir effectif.
Le conseiller en sécurité haut placé, à proximité des ministres ou des présidents, soit des politiques les plus influents, incarne cette liaison immanentiste entre l'action et l'idée, entre le pouvoir et l'idée. Kissinger et Brzezinski toujours. Le diplomate est proche du conseiller, mais également l'analyste ou le stratège qui opère pour des groupes de réflexion ou pour des institutions de renseignement. J'ajouterai que le diplomate est particulièrement proche du renseignement. Cas d'un Wisner Jr.
Le renseignement consiste à prévoir à l'avance le déroulement des événements. On notera qu'en anglais, de manière révélatrice, l'espionnage est relié à l'intelligence, ce qui en dit long sur la conception finie et délimitée de l'intelligence par l'idée immanentiste et la conception immanentiste de l'idée. On en revient ainsi aux think tanks et autres clubs qui sont le lieu par excellence où se produisent les experts et leurs modes de réflexion. En même temps, les experts des think tanks atlantistes débouchent sur des connexions évidentes avec le renseignement, la politique, la diplomatie, la sécurité.
Dans le monde anglo-saxon, de nombreux think tanks produisent des argumentaires exploitables par les formations politiques auxquelles ils sont affiliés. Dans ce dispositif, l'intellectuel est subordonné à l'expert et à ses dérivés, ce qui signifie que c'est l'expert qui est la figure dominante de l'immanentisme terminal. Autre manière de comprendre que l'incarnation la plus spécialisée, délimitée, finie de l'idée correspond aussi au moment où l'immanentisme s'approche de son stade ultime, de la crise qui précède sa disparition - et son remplacement.
Finalement l'intellectuel et le journaliste, figures fort proches et parfois identiques, sont les relais de propagande de l'expert en tant qu'avatar symptomatique et symbolique de l'immanentisme tardif et contemporain. Ils relaient la pensée ultrafinie produite par les experts. Alors qu'un Platon incarnait l'ensemble du savoir, les sciences humaines ont forgé l'idée que les champs disciplinaires d'un savoir devaient nécessairement être compartimentés et fractionnés. L'expert est l'incarnation de cette conception jusqu'à l'absurde ou jusqu'à l'exagération.
L'inféodation de l'intellectuel et du journaliste à l'expert laisse entendre que l'expert est la figure tutélaire de l'immanentisme actuel. C'est ainsi qu'il faut explicitement rapprocher l'expert du monde des renseignements et des services secrets. On se souvient que le diplomate et le conseiller appartiennent parfois explicitement à ces mondes parallèles et complémentaires. C'est ainsi que les diplomates sont souvent des relais objectifs des services de renseignements et que les conseillers sont souvent, de par leurs attributions sécuritaires et stratégiques, en cheville avec des appareils de renseignement. Je pense au NSC américain par exemple.
Le monde du secret en immanentisme implique que ceux qui sont dans le secret soient les créateurs des valeurs. C'est dire que les créateurs des valeurs appartiennent la catégorie des experts. On pourrait rappeler la catégorie des Super Experts, en tant que c'est l'expertise suprême qui conduit au monde du secret, soit à la création des valeurs.
Si le Super Expert détient les clés des valeurs finies, alors il opère sur le terrain du secret, en tant que le secret signifie l'explication à l'avènement des choses et des phénomènes. La vraie question de l'immanentiste tient à l'avènement du reél. Si le reél existe en tant que fini, quelle force produit ce fini? On peut répondre par le hasard, comme le fait par exemple le penseur emblématique de l'immanentisme tardif et dégénéré contemporain, Clément Rosset. Le successeur de Nieztsche qui affirme et assume son nihilisme et le définit en expliquant que le reél découle du hasard.
Dans cette ontologie, le hasard peut aussi bien être remplacé par l'intervention humaine, mais cette intervention doit nécessairement découler de la supériorité. C'est ainsi que le Super Expert remplit la catégorie terminale, dans tous les sens du terme, du créateur supérieur des valeurs. Le secret est nécessaire, puisqu'il est impossible d'expliquer benoitement que le réel est façonné par l'homme.
L'homme qui conçoit ce projet est clairement l'oligarque qui considère que les créateurs des valeurs se situent au-dessus du troupeau commun et que leur domination est légitime puisqu'elle est effective. Ces créateurs coïncident avec les experts dans la conception d'un reél fini. En ce sens, le Super Expert n'est pas seulement l'expert qui pense le réel fini après en avoir pensé un champ avec excellence, mais aussi celui qui crée des valeurs et se meut du coup dans le secret.
Que le secret soit tel n'est pas sans intriguer au pays de la transparence. Comment concilier le secret et la transparence? La transparence signifie que le réel est immédiat et apparent, pas que l'avènement du reél en évènements soit transparent. La création du reél est tout sauf transparente. On la délègue au hasard sachant qu'on se garde bien de définir le hasard ou qu'on le définit comme ce qui est indéfinissable (tactique conjointe adoptée par Rosset dans la définition du reél).
C'est ainsi que l'homme immanentiste considère qu'il peut créer des valeurs. On se souvient que dans la mentalité transcendantaliste, la création des valeurs et du réel et laissée à la toute-puissance de Dieu, qui est le Créateur. L'homme qui se substitue à Dieu : attitude emblématique de la démesure, du nihilisme et de sa forme moderne - l'immanentisme. Attitude qui définit la phase terminale de l'immanentisme, qui est le prolongement de l'immanentisme tardif et dégénéré annoncé par Nietzsche.
L'expert est ainsi l'incarnation de l'idée terminale dans la généalogie scabreuse et chaotique de l'immanentisme. Raison pour laquelle les experts ont si souvent tort : ils récitent leur savoir sur fond d'erreur ontologique fondamentale. Le plus fascinant reste sans doute que le culte du secret, au sens religieux du terme, accompagne l'erreur la moins avouable : que l'expert est le charlatan par excellence, au sens où il est le ventriloque de l'immanentisme tardif et dégénéré de dernière phase. De phase terminale.