lundi 5 septembre 2011

Le développement de l'entropie néo-malthusienne


http://www.itele.fr/emissions/chronique/menard-sans-interdit/video/13839

A première ouïe, quand on écoute cette émission, on pourrait se féliciter : enfin un auteur qui ayant prévu les racines de la crise a le courage de dénoncer l'inertie et l'absence de réaction ajustée face à ce qui n'est pas une petite grippe, mais qui va dégénérer en France en chaos et guerre civile (comme c'est le cas en Libye, une guerre civile odieuse et lâche, fomentée depuis l'Occident par les puissances qui ont lancé l'OTAN en Libye). Mais rapidement, notre Closets trahit qu'il relève de la cohorte des néo-malthusiens qui sévissent depuis le Club de Rome et qui loin de pouvoir guérir une crise ne feront que l'amplifier avec des médicaments s'apparentant à des saignées du temps de Molière : les charlatans de l'époque sévissant sous le nom de médecins empoisonnaient littéralement leurs patients démunis (et affaiblis) avec leur méthode désaxée de la saignée, consistant à purifier le corps de maux obscurs et souvent inexistants sous couvert d'ôter le sang du corps.
C'est un peu ce que propose un malthusien, qu'il soit néo ou classique : prisonnier de sa vision fixiste de l'univers, il en vient à constater que l'entropie est la loi qui gouverne l'ensemble du réel (pas seulement certaines parties physiques fixes) et que l'homme est contraint (toujours la fausse nécessité) de s'adapter à l'entropie (la crise) en ne cessant de diminuer ses prétentions et de faire des économies. Le message que délivre Closets depuis qu'il s'est rendu célèbre ressort de ce tonneau peu fameux : toujours économiser, toujours diminuer, toujours décroître d'un point de vue économico-social, concernant le niveau de vie.
De ce point de vue, Closets, loin de s'opposer à l'époque, en est au contraire un des plus fidèles porte-paroles, lui qui délivre un néo-malthusianisme qui n'a pour seul mérite que la conséquence : dans son cadre (c'est le cas de le dire), Closets serait conséquent, quand ceux qui essayent de maintenir le niveau de vie des Français tout en se trouvant confrontés à l'entropie se montreraient inconséquents. Mais cette conséquence de Closets serait de peu de prix au sens où elle serait une conséquence plongée dans l'inconséquence, une conséquence inconséquente. Le néo-malthusianisme n'est que la postmodernisation du malthusianisme qui consiste déjà à légitimer l'Empire britannique (dont Malthus est un théoricien) au nom de l'entropie.
Au juste, on ne sait guère ce qu'il adviendrait pour un malthusien au final : il ne s'agit pas de faire des économies temporaires et pour un temps rassurantes, mais des économies qui non seulement seront définitives, mais qui ne peuvent que s'accroître. Si bien que le malthusianisme mènerait au chaos aussi sûrement que l'entropie mène à l'anéantissement général et définitif. Closets quand il intervient n'a pas vraiment raison : il a certes prévu la crise qui venait de manière irréfutable, mais il se trompe tant sur les causes que le diagnostic et les remèdes à y apporter. 
Les causes : c'est le monétarisme qui est responsable de la crise que nous endurons, alors que Closets y voit plutôt la gabegie dans un système monétariste qui serait non seulement juste, mais encore et surtout nécessaire.
Les remèdes : au lieu de proposer de changer de système si le système n'est pas viable, soit de quitter le monétarisme pour un nouveau système (la seule alternative que je connaisse est le système d'économie politique de modèle américain défendu à l'heure actuelle par LaRouche et Cheminade après avoir été promu par Roosevelt aux États-Unis), Closets propose de rester dans le système donné et de s'adapter à l'inévitable effondrement qui s'y joue, soit au résultat rationnel de l'entropie promue comme système ontologique (au sens où l'ontologie serait la science du réel).
La lucidité de Closets se manifeste à l'intérieur d'un aveuglement total et totalitaire, puisqu'elle consiste à prévoir la crise comme nécessité à l'intérieur d'un système entropique inévitable, soit d'un système autodestructeur et suicidaire - et les économies à réaliser impérativement comme remède et ajustement inévitables. 
Closets manifeste une curieuse lucidité partielle à l'intérieur d'un aveuglement total, soit encore une demi vérité venant renforcer le dispositif de l'erreur générale complète. Si Closets est autant à la mode, c'est parce qu'il endosse le parti le plus radical à l'intérieur de la mentalité à la mode, mentalité monétariste, dont il représente le courant néo-malthusien appliqué non pas à l'environnement seul, mais à l'ensemble de la société (en particulier à l'économie). Les polémiques qu'a déclenchées Closets opposent essentiellement le parti minoritaire de Closets, ce néo-malthusianisme radical, à l'ensemble du courant qui lui est opposé tout en demeurant à l'intérieur de la mentalité monétariste : courant en gros qui valide le monétarisme et qui s'oppose au néo-malthusianisme. Closets a beau jeu d'opposer à ces rêveurs leurs chimères de déni : la crise dans le monétarisme est inexorable - et il convient de lui trouver un remède.
Mais Closets ne propose pas de sortir du système monétariste, sans quoi il se serait trouvé banni des médias et livré en pâture à une intense campagne de calomnie l'accusant de nombreux maux, parfois contradictoires, toujours infamants. Ceux qui rencontrent le succès en s'opposant à l'intérieur d'un système sont quasiment toujours des faux opposants qui servent le système. C'est le cas en général pour les nationalistes de tous poils qui clament d'autant plus qu'ils sont antisystèmes qu'ils sont des nationaux-monétaristes bien identifiés; et pour Closets, qui n'est pas nationaliste, mais néo-malthusien, nous tenons encore un autre exemple d'un opposant interne au système monétariste.
Si le journaliste d'en face, ce Ménard accusé d'être un agent (indirect) de la CIA et qui, après Reporters-Sans-Frontières, dresse une apologie ambiguë de nombre de valeurs promues par le Front National de Marine Le Pen dans les médias dominants (encore un sacré opposant!), faisait vraiment un travail de journaliste, il lui demanderait quelle est sa position par rapport au libéralisme et comment l'on peut sortir de la crise sans sortir du système qui la porte et l'encourage, le monétarisme ultralibéral. Mais Ménard est lui-même fasciné par le monétarisme, pour preuve ses déclarations en faveur de la liberté d'expression pour le national-monétarisme. Et le néo-malthusianisme est en train tout doucement de sortir de sa coquille écologiste pour devenir la norme des discours critiques de type monétariste,  l'intérieur du champ social dans son ensemble.
L'avenir de discours faux et dangereux comme ceux que délivre la Pythie Closets est assuré : dans un système entropique, le discours d'un Closets devient à à la mode quand surgit le moment de l'épreuve entropique : la crise. Il s'agit alors d'expliquer le caractère nécessaire, inexorable, indubitable, irréfragable de la décroissance, en sortant ce terme des perspectives seulement écologiques, du coup réductrices, et en lui conférant une portée soudain universelle avec son extension à l'ensemble du champ social. Closets passe ainsi pour un visionnaire qui a prévu la crise depuis plus de trente ans et lui a opposé des remèdes précis : des coupes drastiques afin de s'ajuster à l'effondrement économique. Closets favorise le discours en faveur de cette politique, qui est tenu par la majorité ultralibérale au pouvoir. Ce discours n'est tenable que si celui qui le défend s'insère dans l'élite oligarchique qui non seulement se trouve prémunie de la destruction liée à la purge radicale, mais encore y acquiert sa légitimité : si l'on suit son discours de convenance et de propagande, c'est grâce à elle que des mesures efficaces sont prises pour conjurer la crise. Resterait à poser la question anti-système (antimonétariste) à Closets (et à ses acolytes favorables à l'oligarchie néo-malthusienne) : et s'il était préférable de choisir un système de fonctionnement supérieur au système caduc et périmé de type monétariste - serait-il nécessaire et inexorable de procéder à ces réductions économiques incessantes et forcément limitées, qui tôt ou tard finiront par tuer et détruire la société humaine sous prétexte de se montrer réaliste et de tenir le coup face à la destruction entropique?

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