vendredi 17 juin 2011

Nouvel Espace Mondial

Une bonne plaisanterie : j'entends à la radio que le Premier ministre grec Georges Papandreou compterait sur les énergies renouvelables pour que la Grèce se refasse une santé économique. Je sais bien que Papandreou le "socialiste" se tient sur la ligne libérale qui encourage la folie des énergies renouvelables, commanditée par diverses factions de la City (qui loin de tout souci écologique véritable entendent créer des spéculations vertes permettant de relancer le processus monétariste à l'agonie).
On comprend pourquoi la Grèce est devenue le symbole de la faillite des Etats-nations, de la révolte des peuples et du mauvais contrôle des dépenses : après s'être fait voler par les financiers-escrocs de Goldmann Sachs, voilà que pour se refaire et se renflouer, notre représentant grec reprend les pires méthodes des arnaqueurs. Afin de fournir quelques gages à leurs créanciers-voleurs, nos endettés irrémédiables ont-ils décidé d'amadouer l'ogre en faisant son jeu? Comment peut-on relancer une économie moribonde avec des produits plus coûteux que productifs?
C'est le cas des énergies alternatives qui proposent l'exploit de manière métonymique de coûter plus qu'elles ne produisent. Métonymie que ces moulins de Don Quichotte à la sauce contemporaine qui expriment la démarche du monétarisme : détruire le physique en prétendant le remplacer par de la spéculation totalement fictive, déconnectée du réel et véritablement vicieuse. Les Grecs ont pu s'en rendre compte, eux qui ont commencé par faire faillite en suivant les recommandations des spéculateurs monétaristes, puis qui entendent y remédier en écoutant les anciens empoisonneurs, entre-temps recyclés (de manière bio-dégradable?) en médecins.
Que proposent nos guérisseurs-destructeurs et virulents? Guérir le mal par le mal, soit accroître l'empoisonnement pour guérir du poison premier. C'est ici qu'interviennent les fameux "produits verts" qui sont des produits spéculatifs plus encore que les produits dérivés classiques. On se sauve de la faillite par l'accroissement de la faillite. Je ne sais au juste si c'est le socialisme qui fait perdre la raison au libéral Papandreou - ou si c'est à cause de l'effondrement terminal et définitif du libéralisme que ses thuriféraires les plus modérés commencent à perdre la tête; mais on ne peut que rire d'une proposition folle et profondément drolatique : toujours plus détruire pour mieux reconstruire.
Nous arrivons à un stade de folie si manifeste dans l'effondrement systémique que le principe de non-contradiction n'est plus suivi et que le raisonnement qui domine les mentalités échauffées pourrait se résumer comme suit : le négatif produit du positif. Ou encore : le chaos produit de l'ordre. C'est après tout ce que propose le slogan atavique ordo ab chao. Slogan entonné dans la modernité par un Nietzsche (qui finit maniaque), un Schumpeter et plus récemment les néo-conservateurs avides d'enfantements douloureux. Slogan qui inverse la logique et la raison en apologie de la mania antique et de la destruction. La fin est prévisible : c'est la disparition - ou le changement.
Il est saisissant, à la limite du surnaturel, d'un point de vue historique et culturel, que, dans une sorte d'éternel retour stoïcien, ce soit la Grèce contemporaine qui voit sur son sol refleurir l'opposition radicale et virulente entre les partisans de la république et les thuriféraires de l'oligarchie - et sur un plan plus fondamental entre les nihilistes et les ontologues. Socrate et Platon ne sont plus là pour affronter la Tyrannie des Trente à Athènes, l'Empire perse ou l'influence culturelle des sophistes - mais l'Empire britannique mondialiste a succédé à l'Empire perse méditerranéen, les logiciens sont les sophistes d'aujourd'hui et les technocrates de l'UE ont remplacé les oligarques d'Athènes. Restent les successeurs des ontologues : ils se recruteront dans le grand changement religieux que j'ai baptisé néanthéisme et qui promet des bouleversements pour le millénaire à venir, à partir de la Grèce jusque dans le reste du monde - le nouvel espace n'est plus mondial.

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