dimanche 19 octobre 2008

Le K.

"L’ordre mondial qui se profile sera-t-il celui de l’empire universel américain ? Il doit en être ainsi, dans la mesure où il portera le sceau de l’esprit américain. L’ordre à venir marquera la dernière phase d’une transition historique et en finira avec la période révolutionnaire de ce siècle. La mission du peuple américain consiste à enterrer les États-nations, guider leurs peuples endeuillés vers des unions plus larges, et intimider par sa puissance les velléités de sabotage du nouvel ordre mondial qui n’ont rien d’autre à offrir à l’humanité que de l’idéologie putréfiée et de la force brute… Pour la cinquantaine d’années à venir le futur appartient à l’Amérique. L’empire américain et l’humanité ne seront pas opposés, mais simplement deux noms pour un même ordre universel sous le signe de la paix et du bonheur. Novus orbis terranum (Nouvel ordre mondial)."
The Balance of Tomorrow, Robert Strausz-Hupé, Orbis, 1957.

Le mercredi 15 octobre, Arte a diffusé L’incontournable Monsieur Kissinger, une émission consacrée au père de la realpolitik et à son action lors des années 70, notamment sous les présidences de Nixon et Ford. Cette émission présente Kissinger comme l'éminence grise flamboyante des années 70, sorte de cardinal Richelieu des temps modernes, à tel point qu'il obtint le Prix Nobel de la Paix en 1973. On peut sans problème traiter Kissinger de marionnettiste si l'on examine son rôle influent depuis les années 60/70.
Pour mesurer l'influence de Kissinger sur la politique des États-Unis, il suffira de rappeler sa proximité avec la famille Rockefeller et les cercles WASP et sionistes des États-Unis autour de cette lignée de banquiers mondialistes revendiquant le mondialisme. Kissinger fut administrateur du Rockefeller Brothers Fund et conseiller de Nelson Rockefeller. Pour mémoire, ce dernier fut vice-président sous Ford, alors que Kissinger était secrétaire d'État. On pourrait ajouter la présence du cher Kissinger au sein du Groupe Bilderberg ou dans son entreprise en conseils privés Kissinger Associates.
L'émission se veut sérieuse et documentée, diffusée par la chaîne culturelle Arte. Il est clair que les prétentions de l'émission sont historiques, précisément d'étudier les aspects cachés et fondamentaux de l'histoire contemporaine. De ce fait, on peut commencer par observer que la lucidité d'Arte est d'autant plus mise à mal que cette chaîne diffuse sous un vernis expert et intellectualiste la version officielle du pouvoir concernant l'histoire.
Pour s'en convaincre, on se reportera à des émissions comme celles consacrées au 911 ou au conspirationnisme, cette maladie bien connue des paranoïaques qui ont le malheur de discerner des complots du côté du pouvoir et des puissants, soit là précisément où ils n'existent pas. On peut aussi constater qu'un BHL appartient au Conseil de surveillance de cette chaîne franco-allemande depuis 1993 (autour de cette période en tout cas).
Dans le cadre de l'émission consacrée à Kissinger, il s'agit d'un exercice de propagande, puisque ceux qui critiquent Kissinger émettent des critiques qui ne font que l'égratigner. Kissinger est filmé en gros plan, avec une mise en scène qui ressemble à s'y méprendre aux confessions d'un repenti mafieux, à ceci près que Kissinger ne s'est jamais repenti et qu'au contraire il se glorifie de ses actions criminelles. A plusieurs reprises, il refuse même de se justifier comme s'il se trouvait au-dessus des arguments du commun des mortels.
Qui est le réalisateur de ce documentaire plus proche de l'apologie et du panégyrique que de la satire et de l'investigation? Stephan Lamby, qui a également suivi le réalisateur Oliver Stone lors de son film World Trade Center. WTC? 911? Le ton est donné. Si tout le reportage est consacré à l'action directe de Kissinger dans les années 70, avant sa retraite publique et politique, il serait temps de constater que l'influence de Kissinger est de nouveau palpable depuis le 911 et que le Réseau Voltaire pose même la question de l'implication de Kissinger dans le 911.
C'est une question si pertinente que nous y avons déjà consacré une note détaillée, avec notamment un récapitulatif du passif irréfutable et injustifiable de Kissinger.
http://aucoursdureel.blogspot.com/2008/09/qui-singe-erre_28.html
Kissinger lui-même l'admet puisqu'il se borne le plus souvent à ne rien dire et qu'à plusieurs reprises il indique explicitement qu'il refuse de s'expliquer. Que s'est-il passé le 911? Qui est Kissinger?
C'est un monstre qui révèle la face cachée de l'Occident. Kissinger est responsable directement et indirectement de la mort de plusieurs centaines de milliers de personnes. Détruire ne le rebute pas. Il fut conseiller en diplomatie et depuis les années 80, il poursuit ce rôle dans l'ombre, comme si la lumière ne lui convenait guère et comme s'il avait compris qu'il serait d'autant plus influent qu'il demeure dans le secret - odieux des dieux.
Je vais reprendre les notes que j'ai prises lors de cette émission, que je n'ai suivie qu'au quatre-cinquièmes, tant j'étais écœuré par ce que je contemplais, la désinformation et la vérité travestie et si triste du diabolisme. Inutile de préciser que l'information que délivre Meyssan est tout à fait valable, comme souvent, puisque je suis intimement persuadé que c'est un monstre de l'acabit de Kissinger qui a concocté le 911 pour le compte d'intérêts bancaires, dont Kissinger est fort proche, pure coïncidence.
Avant d'en venir à ces détails, j'aimerais rappeler que Kissinger exprime le visage complexe de cet Occident brillant, calculateur, pervers, hypocrite, sociopathe et amoral. Kissinger pourrait être une incarnation du diable si le diable avait un visage. Qu'a fait Kissinger durant les années 70? Il s'est présenté comme un dirigeant marqué par la démocratie et les droits de l'homme. Pour couronner son action exemplaire, il a même réussi l'exploit de recevoir le Prix Nobel de la Paix, suprême distinction en Occident.
Si Kissinger mérite le Nobel, alors la paix, la démocratie et les droits de l'homme sont à considérer et à juger à l'aune de l'action véritable de Kissinger. Toutes ces valeurs nobles furent instrumentalisées par un oligarque au service de l'oligarchie. La démocratie était au service de l'oligarchie, la paix de la force, les droits de l'homme de la violence. Comprendre le parcours de Kissinger, c'est cerner la vraie perspective trilogique de l'Occident : l'occidentalisme, l'impérialisme, l'immanentisme.

1) On fait parler Willy Brandt, alors que l'important serait sans doute d'écouter les témoins de l'opération Condor ou du 911 en relation avec Kissinger. La diversion consiste ici à ne pas évoquer l'essentiel et à revenir en détail sur l'accidentel : c'est un bon résumé de la stratégie qui suivra.

2) Alors qu'on nous rebat les oreilles avec le grand méchant complotisme, Kissinger ne cesse d'évoquer des complots qu'il aurait ourdis et suivis méticuleusement. Kissinger complotiste? Telle est la question...

3) Maintenant que l'ère du communisme s'est achevée dans le désastre, ce reportage met en scène un Kissinger en cheville (ouvrière?) avec le maoïsme. C'était certes pour des considérations stratégiques, mais la complémentarité de l'immanentisme progressiste et de l'immanentisme pragmatique est saisie dans la rencontre entre Kissinger l'atlantiste et Mao le Chinois. Deux tyrans sanguinaires qui ne font que poursuivre la longue histoire de la collusion entre le capitalisme et le communisme, deux ennemis qui ne sont ennemis que parce qu'ils sont frères complémentaires et que l'effondrement de l'un annonce sans nul doute l'effondrement de l'autre. Aujourd'hui que le maoïsme et le communisme se sont effondrés, on reconnaît Mao pour ce qu'il fut, mais l'omerta dura longtemps. Elle dure encore pour Kissinger et il est insupportable de supporter les apparitions glorifiées d'un criminel patenté sous prétexte qu'il appartient à un camp encore debout. Qu'apprendra-t-on sur Kissinger quand l'atlantisme se sera effondré?

4) Il est cocasse d'assister au portrait sommaire que Kissinger dresse de Mao : un être sanguinaire, très intelligent et grand diplomate. S'agit-il seulement de Mao? Kissinger n'évoque-t-il pas aussi - Kissinger?

5) Alors que je ne comprends pas l'écriture d'une de mes notes, je tombe sur la suivante. Définition de la realpolitik, emblématique de la patte à trac Kissinger. Je crois que c'est l'inénarrable Richard Perle qui s'y colle, avec l'acquiescement absent et tacite de Kissinger : faire des choses qu'on préfèrerait ne pas faire. Tu parles! Autre proposition : la fin justifie les moyens. Dernière hypothèse : tirer le maximum d'une situation. De pire en pire!
Notre diplomate en chef évoque en fait la figure du cynique désabusé et caricatural. Il est vrai que l'on est frappé en contemplant Kissinger de découvrir ce petit homme nanti d'un embonpoint magistral n'exprimer aucune émotion, seulement des phrases désabusées débitées sur un ton monocorde et une voix cassée. Kissinger est usé, revenu de tout, désabusé. Perle et d'autres insistent sur l'absence de sentiments moraux qui animeraient Kissinger et qui traduiraient sa supériorité en acte. Il serait grand diplomate en ce qu'il serait mû seulement par l'intérêt des nations qui se situe au-dessus de toute morale individuelle et surtout commune. Il s'agit de brosser le portrait d'un Kissinger si supérieur, si transcendant que ses valeurs sont impénétrables pour le commun des mortels.

6) Tout au long du reportage, la folie de Nixon est mise en avant au profit de la sagesse et de la tempérance de Kissinger. Il semblerait pourtant que Kissinger se soit accommodé pendant longtemps du caractère et des excès de son mentor officiel, à tel point qu'on peut se demander si les failles de Nixon n'étaient pas l'une des principales raisons de son élection en tant que président, car il était justement manipulable par le panier de crabes de l'oligarchie dont Kissinger est l'un des représentants et était à l'époque le principal porte-parole. Je reviendrai sur la manipulation évidente à laquelle Kissinger se livre, concernant Nixon et concernant les institutions américaines en évoquant le Watergate.

7) Lors de ses interventions, Kissinger débite, toujours avec son filet quasi inaudible et sa voix cassée, des banalités impressionnantes. Soit l'on se moque du monde et l'on nous montre un médiocre confusionnel, soit Kissinger fait de la langue de bois, comme un entraîneur qui parle pour ne rien dire et protège ainsi son équipe de ses secrets tactiques. Il en va de même avec Kissinger : c'est pour ne pas aborder l'essentiel que Kissinger se répand en fadaises et autres lapalissades, comme si des généralités éthérées pouvaient laisser croire à sa sagesse et à sa maîtrise du cours des affaires et permettaient d'opérer une diversion habile. Surtout, ne pas aborder l'essentiel. Sur tout.

8) Tiens, l'émissions aborde pourtant le sinistre épisode du Watergate, où Nixon se fit piéger jusqu'à la démission. Comme par enchantement, ce paranoïaque évident, qui aurait décidé de lui-même d'enregistrer toutes ses conversations, voit ses méthodes espionnes et policières de Néron ou de Caligula se retourner contre lui. Question : est-ce vraiment ce caractériel de Nixon qui a instauré les écoutes les plus illégales ou y fut-il conduit par des conseillers irresponsables ou fort manipulateurs? Comment se fait-il qu'il se soit laissé piéger au moment où toutes les circonstances concouraient à sa réélection triomphale? Il est ahurissant d'apprendre que les plombiers qui ont trahi Nixon sont des pantins manipulés par Kissinger et ses complices. Voilà la preuve que le coup n'émane pas du hasard, mais ressortit du complot. Encore un coup tordu pour Kissinger? Il est dommage que le documentaire ne s'appesantisse pas plus longtemps sur cette question essentielle pour cerner les méthodes perverses de Kissinger et de ceux qui le soutiennent. En tout cas, le mépris de Kissinger est insondable : il n'hésite pas à présenter les conseillers qui ont trahi Nixon comme des fantoches et des pauvres types, ce qui en dit long sur sa science de la manipulation, sa vraie spécialité, et sur la condition à laquelle sont réduits les lampistes, Oussama, Oswald ou les autres : leur sort est d'est méprisé par tous, en premier lieu par ceux qui les ont le plus manipulés et qui ont appris à l'usage à quel point leurs cobayes étaient des insignifiants grotesques et désaxés. En second lieu par le grand public révulsé, qui les prend pour des monstres aussi inconséquents qu'isolés.

9) Durant la guerre de Kippour, les États-Unis sont montés à Defcon 3, le niveau d'alerte maximum avant la guerre totale. Alerte nucléaire, notamment. Cette anecdote m'a immédiatement rappelé que c'est exactement ce qui s'est passé le 911, où les exercices militaires et contreterroristes ont également fait monter le niveau d'alerte des États-Unis au paroxysme de l'alerte nucléaire. Sont-ce les mêmes méthodes employées par les mêmes cercles? Oussama détient-il un pouvoir tel qu'il est en mesure d'influer sur les degrés d'alerte militaires américains? Cette question mérite d'être posée, car il n'y a pas que les serial killers qui font dans la répétition. Il y a aussi les politopathes et les diplomathes de haut niveau, ceux qui ont l'habileté et l'intelligence de tenir un rang élevé dans l'art politique et l'oligarchie - comme Kissinger. On pourrait aussi ajouter que Kissinger est juif et sioniste et que son soutien à Israël n'est certainement pas une coïncidence, mais ressortit du tribalisme et de l'idéologie. Où l'on voit que la realpolitik n'est pas si réaliste que cela, car le soutien à Israël détruit les États-Unis et ne profite qu'à l'oligarchie financière. On peut ajouter que les éléments de preuves abondants et irréfutables dans le 911 montrent que l'implication d'éléments institutionnels israéliens dans le 911, notamment au WTC, sont écrasants et forment un nouveau rapprochement avec les méthodes de Kissinger.

10) Kissinger évoque sa théorie de la dissuasion dans les années 70, notamment pour contrer l'impérialisme soviétique. C'est drôle, c'est marrant, c'est justement la préfiguration de la guerre contre le terrorisme. Dans les deux cas, il s'agit de se trouver un ennemi pour se donner une identité. Cette conception primaire de la politique remonte notamment au maître à penser des nazis, le sympathique Carl Schmitt. Le Juif persécuté Kissinger adepte de Schmitt, voilà qui prêterait à sourire si le paradoxe n'était pas monstrueux! Le pire est que l'ennemi soviétique avait encore une consistance, certes exagérée, mais réelle. Quant à l'ennemi terroriste, il faut être réaliste, justement, et reconnaître que la realpolitik aura mené la diplomatie américaine de 2001 à inventer un ennemi invisible autant qu'illusoire. Kissinger tient son rôle majeur dans cette stratégie, puisqu'il est le conseiller de Mac Cain pour les élections de 2009, qu'il fut le conseiller de W. et l'inspirateur de la (guère) froide Condoleeza Rice.

11) Le documentaire en arrive à l'épisode de l'assassinat d'Allende. Kissinger se justifie comme il peut, avec un cynisme qui confine à la perversité : il recommence sans vergogne à expliquer que toute critique de son action ne repose pas sur des arguments sérieux, mais sur des arguties puériles. Si on le désapprouve, on ne le comprend pas, ou encore : Kissinger se situe à un tel niveau de réflexion qu'il ne peut qu'être incompris par les contradicteurs et les imbéciles. Quoi qu'il en soit, les interventions de deux généreux généraux proches de Kissinger, Scowcroft et Haig, suffisent à démontrer que la CIA a agi en cheville avec la coordination du NSC, tête pensante de la Maison-Blanche et du Pentagone. C'est bizarre, car c'est exactement la même configuration que dans la cadre du 911 : sont-ce les mêmes réseaux qui ont été réactivés, avec Rumsfeld, Cheney, Wolfowitz et consorts, plus en filigrane et toile de fond Kissinger? En tout cas, sur ce point précis, Kissinger justifie ses atrocités par le contexte de la lutte contre le communisme et refuse de poursuivre, ce qui constitue certes un aveu de faiblesse, mais également une impudence inacceptable.

12) Le documentaire s'appesantit sur la mort d'Allende. S'agit-il d'un message subliminal? De la manifestation de la vérité inconsciente? D'un acte manqué marqué? En tout cas, répétition miraculeuse, Allende a été tué dans des circonstances troubles et nébuleuses le : 11 SEPTEMBRE 1973. Avouez qu'il y a de quoi vous faire dresser les cheveux sur la tête! Pire que dans les thrillers style Sixième Sens, le haut fait d'armes de Kissinger en affaires officielles (dans les années 70) s'est déroulé un 11 septembre. Le 11 septembre 2001 marque le retour sur la scène publique de Kissinger après vingt ans de silences. On peut comprendre pourquoi.

13) Après cet aveu terrible de compromissions et de perversité homicide, rien de telle qu'une petite bouffée de strass et de paillettes glamour pour détendre l'atmosphère. On nous déroule les conquêtes féminines de Kissinger, qui l'espace d'un temps, celui de sa gloire médiatique, s'est pris pour une rock star ou pour une star de Hollywood. Comment faut-il interpréter ce coup de mégalomanie : Kissinger l'intello bardé de diplômes qui joue aux séducteurs, alors que le moins qu'on puisse constater est qu'il n'avait pas vraiment le physique de l'emploi? A-t-on voulu lui attribuer un rôle de séducteur pour divertir le grand public et faire oublier que le bel Henry était un sinistre farceur - spécialiste en coups tordus? Est-ce Kissinger qui a pété les plombs et qui s'est cru tout-puissant, au point de tout conjuguer, les pires coups tordus et les aventures amoureuses à la pelle? Kissinger voulut-il se positionner à la mode des seventies, en épigone de Mick Jagger ou en chantre de la dolce vita et de la libération sexuelle? Projeta-t-il d'incarner la diplomat star, en ces temps où la peoplisation des politiciens était encore une gageure? Sans doute un peu de toutes ces raisons ensemble.

14) Précision intéressante concernant le tribalisme de Kissinger, ou en tout cas de sa conception du judaïsme : on apprend qu'un scandale retentissant entoura le second mariage de Kissinger, ultramédiatisé, sous le motif que la seconde épouse était une goy. Bien entendu, ce genre de considérations est digne d'une démocratie. En tout cas, le détail explique aussi bien qu'un long commentaire comment et pourquoi un pays accorde la primauté de son intérêt aux intérêts du sionisme en tant qu'avant-garde de l'immanentisme colonisateur dont il est lui-même une manifestation archétypale.

15) On glisse sur ces péripéties somme toute assez légères et caractéristiques de la propagande immanentiste (le célèbre et nobellisé Kissinger excelle en tout, en amour comme en intelligence), qui peuvent s'entendre comme des preuves du cynisme de Kissinger, profitant de son aura pour séduire sur le ressort du prestige lié au pouvoir (le plus fort des aphrodisiaques, selon Kissinger himself). On en arrive, après le Chili, à un nouvel épisode de la cruauté sanguinaire de Kissinger, à moins que ce ne soit son indifférence présentée comme supérieure à la mort et à la destruction : sa responsabilité dans les bombardements sur le Cambodge. On insiste sur les liens entre Kissinger, son conseiller Haig et les plombiers de Nixon. Retour salutaire vers la vérité : et si le Watergate avait été télécommandé par ces cercles manipulant Nixon comme une proie qu'on use, dont on abuse et qu'on jette quand elle est inutilisable? Il faudra que je vérifie, mais je crois me souvenir que Tarpley évoque cet épisode dans sa Terreur fabriquée.

16) Le documentaire suit la mode de l'éclatement chronologique, du retour en arrière incessant et de l'éclatement/brisure du temps. En termes de figure littéraire, on dirait que le documentariste use, voire abuse, de l'analepse et de la catalepse. Quittons ces gros mots soyeux et venons-en à notre jeu avec le temps. Ce jeu finit par détruire toute portée historique au documentaire et par brouiller les repères critiques. C'est ce qu'on attend, désormais, des documentaires : qu'ils deviennent des outils de propagande pédagogique dont l'efficacité dépend précisément de la destruction factuelle au profit de son remaniement idéologique. En tout cas, on insiste lourdement sur un détail tout de même assez insignifiant : Scowcroft nous narre avec force détails et un contentement manifeste comment et dans quelles conditions il a détruit le dernier enregistrement audio de Nixon, dans lequel le président démissionnaire laissait libre cours à sa rage et à sa haine. Sérieusement, cette nouvelle diversion, on s'en fiche. Soit on élude les points cruciaux, comme le fait si bien Kissinger avec son art de la dérobade impudente; soit on approfondit des points de badinage désolant de superficialité. Quand on sait qui est Scowcroft, on attend de lui d'autres confessions, non?

17) Les rapports entre Kissinger et Carter. Rappelons que Carter fut un président démocrate fort novice, un peu comme Obama, et que le conseiller principal de Carter fut le fondateur de la Trilatérale avec David Rockefeller, le père de l'islamisme terroriste contemporain, Zbigniew Brzezinski : de là à penser que le départ de Kissinger et son remplacement par Brzezinski suit une stricte répartition conservateurs/démocrates et que Kissinger avait épuisé son crédit sur le devant de la scène, il n'y a qu'un pas, d'autant que par la suite, si Kissinger rentre dans l'ombre, il ne quitte certainement pas les allées du pouvoir. Au contraire, il se lance dans le renseignement privé. Le remplacement de Kissinger à l'ère démocrate par un de es clones est attesté par la justification que fournit le documentaire : Kissinger se plaint que sous Carter, il était devenu un bouc émissaire, ce qui est une façon d'admettre implicitement qu'il utilisait Nixon et Ford comme ses boucs émissaires et qu'il a usé Nixon comme un parfait bouc émissaire! Par cet aveu éclatant de sincérité contrariée, Kissinger révèle ses méthodes de gouvernement et notamment son influence réelle sur la politique américaine : Kissinger est bien cette éminence grise de l'oligarchie WASP américaine qui détourne la démocratie de ses prérogatives et qui manipule à outrance les institutions pour servir les intérêts de factions antidémocratiques. Cela ne vous rappelle rien? Moi, si : les évènements du 911 et ses terribles conséquences.

18) Nouvel épisode de carnage dans lequel Kissinger a trempé : le Timor oriental, avec l'appoint du président indonésien Suharto et sous la présidence de Ford. Décidément, ça commence à faire beaucoup et ça classe la catégorie de prédateurs à laquelle Kissinger appartient. Pour un Prix Nobel, avouons qu'il penche plus du côté des Mao et des Staline que des Gandhi ou Mandela. Si on dresse la liste, entre l'Asie et l'Amérique du Sud, cela fait tout simplement trop, d'autant qu'on peut inclure le Moyen et le Proche-Orient dans cette énumération terrifiante de barbarie mortifère.

19) On apprend que Donald Rumsfeld fut chef d'État-major sous Ford. Donald Rumsfeld? Vous savez, le secrétaire à la Défense sous W. durant le 911 et l'un des architectes de la guerre en Irak... Il est activement impliqué dans la gestion de la crise durant l'invasion du Sud-Vietnam, qui conduisit au retrait américain au Vietnam. Kissinger aussi, il va sans dire.

20) Le départ américain du Vietnam, le 30 avril 1975, évoque étrangement le sort inéluctable des troupes américaines et atlantistes en Irak. Dans les deux cas, le but fut plus de faire la guerre que de gagner la guerre. Dans les deux cas, le chaos était la stratégie recherchée. Serait-ce qu'on parie sur la stratégie du chaos en tant que stratégie à part entière, pour un contrôle géopolitique immédiat et avec comme option ontologique et religieuse implicite le postulat, dément, selon lequel l'ordre découle du chaos et est engendré par le chaos?

21) Selon le commentateur du documentaire, le Vietnam a permis aux Américains de retrouver leurs propres limites pour un temps. Il s'agit d'une justification particulièrement sinistre et cynique d'une guerre postcoloniale qui ressemble à s'y méprendre à l'hécatombe humaine. On notera le caractère provisoire de cette limitation sanguinaire. Est-ce le même calcul qui a été opéré pour la guerre en Irak, par des intelligences similaires, voire identiques? Est-ce une mentalité qui est à l'œuvre et qui se répète dans la différence, ainsi qu'aimait à le rappeler Deleuze? Kissinger enfonce le clou par une intervention dont il a le secret : l'art de la bonne gouvernance est d'avoir des objectifs qui sont juste à la limite de ce qu'une société peut accepter. Ce faisant, notre faisan faisandé de Kissinger explique posément qu'il se situe au-dessus des valeurs et des lois; mieux : qu'il appartient au cénacle des élus et des privilégiés qui ont le pouvoir et les facultés pour édicter le pouvoir et les lois.

22) Je décide de couper l'émission en apercevant (une énième fois) la bobine de Perle, qui rapproche posément l'action officielle de Kissinger durant les années 70 de la guerre actuelle en Irak. Est-ce un énième aveu de la compromission de Kissinger dans le 911? Perle y a-t-il trempé en tant que prince des ténèbres (un surnom sympathique) avec quelques autres comparses?

J'aimerais assez pour terminer retenir les noms de quelques intervenants, dont l'influence est symptomatique de ces cercles oligarchiques qui ont fait la politique occidentaliste, atlantiste et américaine au cours de ces dernières décennies. Il est singulier de constater que ces personnages fort influents se renouvèlent fort lentement et qu'au contraire, l'oligarchie aime assez à miser sur la longévité de l'exercice du pouvoir. Kissinger n'en est pas le moindre symbole, puisque s'il a officiellement passé la main, il n'a fait que rejoindre le vrai cœur du pouvoir, celui du secret et du renseignement, auprès de la finance et de la banque, après avoir été envoyé pendant un temps sous les feux de la rampe, où il se sera bien amusé, prenant du bon temps et massacrant à tout va la populace mondialisée.

1) Le premier des intervenant se nomme Richard Perle. C'est un conseiller de l'ombre, proche des circuits néoconservateurs et de Netanyahu, le faucon israélien président du Likud et fils du secrétaire du sioniste extrémiste Jabotinsky. Perle symbolise à l'excellence l'alliance immanentiste du sionisme fondamentaliste et du protestantisme du même acabit. Proche de Wolfowitz, il fut l'un des principaux artisans de la guerre en Irak. Il est l'un des disciples du sénateur Henry Jackson, l'une des figures de l'oligarchie américaine et de ce qu'on nomme le parti militaro-industriel. Jackson et Perle sont tous deux des démocrates, comme Johnson auparavant, ou comme aujourd'hui Pelosi et Soros. Enfin, Perle est un des membres de la direction du Groupe Bilderberg, dont Kissinger est également un membre influent. Faut-il rappeler que le Bilderberg fut fondé par la CIA, par Unilever, multinationale néerlandaise, et par David Rockefeller, entre autres? Comprend-on pour le compte de quels mentors un Kissinger agit? Quels liens le rapproche de Perle? Tel est le véritable visage de l'oligarchie, duplice et morcelé.

2) Alexander Haig est un général influent. Conseiller de Kissinger, il fut aussi chef d'État-major de la Maison Blanche, commandant du SACEUR (commandement intégré européen de l'OTAN), puis secrétaire d'État sous Reagan (lui aussi quitta les prérogatives politiques rapidement, au début des années 80). L'appartenance de Haig à l'armée est à mettre en perspective avec les hautes fonctions qu'il occupa à l'OTAN : l'OTAN est cette nébuleuse qui sous prétexte de lutter contre l'impérialisme communiste légitima les pires coups tordus, ainsi que le révèle notamment l'enquête magistrale de l'historien Ganser sur les réseaux stay-behind de l'OTAN et les vrais auteurs des attentats dans les années de l'après-guerre. Entre l'OTAN et Kissinger : on mesure la nature des attributions de Haig. On le mesurera d'autant mieux que l'on se souviendra que Haig est un militaire et que les militaires sont bien entendu impliqués aux États-Unis dans toutes les décisions politiques d'importance. Haig est également impliqué dans le Watergate, puisqu'il dut gérer les effets de la crise. Une anecdote pour comprendre l'oligarchie tapie derrière le pouvoir et tirant les ficelles des pantins visibles élus : après l'attentat contre le parfait lampiste Reagan, qui jouait son rôle de président avec un talent de comédien de série A, Haig crut bon de prendre la parole et d'assurer au monde qu'il avait la situation en main. Qui parlait ainsi? Un simple secrétaire d'État? Un commis des affaires publiques et de l'État américain? Un général gestionnaire de la crise balbutiante? Non, un représentant de l'oligarchie, confiant dans son pouvoir. Un complice de Kissinger, de ce fait appelé peu de temps après à prendre du recul et du galon, tout en gagnant en discrétion?

3) Mon préféré, le joker de ces cercles, est un autre général, Brent Scowcroft : cet ancien général de l'US Air Force fait partie comme Haig de ces généraux américains qui firent carrière avant tout en faisant de la politique. On peut aussi citer, dans cette pléthore de politiciens militaires, Colin Powell. Scowcroft est plus un conseiller de l'ombre, quelqu'un qui tire les marrons du feu et qui manipule les acteurs sur le devant de la scène. Le théâtre constitue une excellente métaphore de cette conception oligarchique de la démocratie et de la représentation politique. Son visage froid et sa voix glacée en font un personnage de film mafieux de première main. Je l'aurais bien vu dans LA Confidential, dans le rôle de Dudley Smith (James Cromwell). Adjoint de Kissinger au NSC, il prendra la tête de ce NSC sous Ford, puis à nouveau sous G.H. Bush (1989).
Ce détail montre l'ampleur des divergences entre G.H. Bush et Kissinger, dont les différences d'apparence cachent en fait une grande ambigüité : dans le fond, ils défendent les mêmes intérêts généraux, comme le montre aisément le 911.
A noter que Scowcroft ne participera pas à l'administration démocrate de Carter. Scowcroft est un conseiller émérite conservateur, comme son complice Kissinger : il fut ainsi membre du Conseil présidentiel spécial d'étude (Commission Tower) enquêtant sur l'affaire Iran-Contra. Précision fort intéressante, car Scowcroft est choisi pour présider les commissions chargées d'étouffer les scandales d'État sous prétexte d'enquêter avec transparence. Rappelons que l'affaire Iran-Contra dévoile quels trafics et quels coups tordus peuvent opérer les sbires sous couvert de l'action publique et des institutions américaines. Dès que se profile l'ombre de Scowcroft se distingue l'influence de Kissinger, en tout cas des oligarques WASP que représente Kissinger. D'ailleurs, Scowcroft a rejoint Kissinger dans l'aventure du renseignement privé : il est membre du conseil d'administration de Kissinger Associates et a également créé son propre groupe, le Scowcroft Group.
Webster Tarpley, dans son remarquable ouvrage consacré aux méthodes terroristes des États, notamment la technique du lampiste inspirée par le major Kitson de l'Empire britannique, explique que Scowcroft a atterri le jour du 911 avec le spéculateur Warren Buffet sur la base militaire d'Offutt, là où W. atterrit à son tour par la suite en attendant de rentrer à Washington. Tarpley se demande s'il ne s'agit tout simplement pas d'une manœuvre préventive intentée par l'oligarchie pour instaurer une transition politique au cas où W. n'aurait pas accepté les conditions du coup d'État que constitue le 911. Dans ce cas, c'est un militaire politicien et un spéculateur financier qui auraient occupé les fonctions les plus hautes des États-Unis pour assurer la transition démocratique.
Voilà qui en dit long sur les prérogatives de Scowcroft et son profil gémellaire avec Kissinger : les deux furent responsables du NSC, les deux firent du renseignement privé, ce sont des complices évidents. Alors que Kissinger devient l'un des conseillers privilégiés de W., Scowcroft est nommé par le même W., l'archétype caricatural du fantoche au service de l'oligarchie qui le méprise, en tant que président du PFIAB, un organisme de conseil indépendant du gouvernement nommé par le président des États-Unis pour le conseiller directement. On voit qui conseille et qui manipule directement l'administration W. : les mêmes en gros que sous Nixon et Ford, avec trois noms récurrents : Rumsfeld, Kissinger et Scowcroft (également d'autres).
Faut-il rappeler que Scowcroft émit les plus expresses réserves concernant la guerre en Irak, à tel point qu'il fut chargé d'examiner les affirmations faites par Colin Powell lors de son discours du 5 février au Conseil de sécurité, en particulier la citation de documents notoirement falsifiés sur de prétendus achats d'uranium par l'Irak au Niger? Encore un rôle de superviseur des scandales... Encore une charge exemplaire pour étouffer un scandale, après le Watergate et l'Irangate... En tout cas, Scowcroft a désavoué la guerre en Irak, depuis son poste du PFIAB, en compagnie de Kissinger et d'autres sommités du clan conservateur. Kissinger, vous savez, celui qui a fait des contorsions sous W. pour légitimer (depuis) la guerre contre le terrorisme et trouver un compromis entre Powell et Cheney, soit entre la branche de l'oligarchie favorable à l'impérialisme à tout crin et la branche plus mesurée, soucieuse de préserver sa pérennité et son avenir.
Récemment, Scowcroft s'est opposé à la guerre contre l'Iran, comme Bob Gates, le successeur de Rumsfeld, comme Baker, comme Brzezinski, l'ancien conseiller de Carter. Scowcroft, membre du CSIS comme Kissinger, comme Brzezinski, comme Schlesinger, comme Rumsfeld, comme Cheney, comme Luttwak, comme le prince Turki ou le banquier Mellon, comme Lewis, Huntington et Fukuyama, occupe un rôle de conseiller plus discret et moins engagé. Kissinger est celui qui dans la guerre contre l'Irak essaya de sortir ses intérêts (je n'ose : son pays) du bourbier par le haut, quand Scowcroft n'est jamais revenu sur ses déclarations initiales et cohérentes. Kissinger occuperait ainsi un rôle plus virulent et guerrier dans le dispositif oligarchique, dont il est certain que Scowcroft et Kissinger occupent des strapontins de proches cousins.
Atlantistes.
Pas Germains.
Quoique.
Couac.

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