Une critique souvent adressée à ceux qui se montrent favorables à l'aventure spatiale : cette mesure technique serait déconnectée du besoin en sens. Si la crise est d'ordre religieux, une mesure seulement technique ne saurait y remédier. C'est ne pas comprendre le problème. Le problème, c'est que la crise actuelle survient parce que le sens fait défaut. Cette carence s'explique parce que le sens jusqu'alors valide est devenu soudain trop exsangue, trop exigu, trop étriqué. Le schéma religieux spécifique qui fonctionnait était le schéma monothéiste. Il drainait dans son sillage l'ensemble du schéma transcendantaliste, qui comprenait notamment l'original (et profond) polythéisme.
C'est l'effondrement de l'ensemble du transcendantalisme qui explique l'ampleur de la crise actuelle, car le transcendantalisme est la forme religieuse qui meut la culture depuis l'avènement de l'homme. Les différentes formes religieuses se distinguent entre les polythéismes et les monothéismes, mais l'aspect fondamental de cette crise, qui explique en outre son ampleur inconnue (et du coup déniée), tient dans l'effondrement de l'ensemble de l'édifice transcendantaliste.
Le réel physique est constamment relié à la production du sens, selon une clé d'interprétation d'englobement de type classique (que l'enversion ne vient pas contredire sur ce point) : le réel physique est compris dans le réel sémantique et le sens indique que le réel n'est pas réductible à la dimension sensible, mais qu'il l'excède. Certes, le réel subsumé par le sens ne désigne pas l'ensemble du réel, mais l'homme produit du sens au sens où le réel dont il a conscience et dans lequel il se meut n'est pas le seul réel physique/sensible.
Il est tout à fait logique qu'il existe une correspondance entre l'univers du sens et l'univers du physique. La production du sens engendre la production physique, puisque le physique/sensible est compris dans l'univers du sens. C'est ainsi que le passage vers le monothéisme se spécifie physiquement (sensiblement) par l'unification de l'homme au niveau de la Terre, dont nous connaissons actuellement la phase ultime nommée (pompeusement) mondialisation (ou globalisation).
Mais chaque phase considérée en elle-même est statique : si l'on ne considère que la phase de mondialisation achevée, nous bloquons le processus de croissance géographique de l'homme à son stade planétaire, comme si ce stade était l'ultime ou l'indépassable. Bien que ce raisonnement soit absurde, il s'agit pourtant du socle de l'idéologie mondialiste actuelle, qui est promue par un quarteron de financiers conglomérés sous la dénomination d'Empire britannique.
Il n'est pas pérenne de perdurer dans ce schéma bloqué de mondialisme. Raison pour laquelle se développent des idéologies comme la décroissance qui sont censées (plus que sensées) accompagner et légitimer le mondialisme (et ses conséquences). Soit l'homme périclite (vers l'anéantissement); soit il se dirige vers l'espace. Mais pour ce faire, il ne peut rester sur un schéma actuel qui est un monothéisme de structure transcendantaliste. L'homme ne peut jamais effectuer un progrès physique notable sans que cet effort soit intégré dans un changement/progrès du sens. Le changement physique révèle au niveau physique le changement sémantique (métaphysique).
Le progrès du sens ne désigne pas un sens qui serait meilleur, notion relative dans l'infini, mais un sens qui permet d'accroître les productions physiques qui elles sont expérimentalement mesurables. Le progrès du sens se traduit de manière métaphysique (au sens courant) par une faculté à donner sens à plus de réel, quand cet accroissement intellectuel ou sémantique se traduit par un accroissement/agrandissement physique se mesurant en particulier par le territoire géographique.
Selon cette conception, le critère de l'aventure spatiale (du spatialisme) n'est envisageable qu'à la condition que le sens qui le porte change et permette cette croissance physique. D'un point de vue physique, il faut que le sens porteur dépasse de loin le sens monothéiste qui a permis la conquête et l'unification de la Terre. Le monothéisme avait permis cette croissance.
Cette fois, nous en sommes au point où l'ensemble du transcendantalisme (et pas seulement le monothéisme) doit être changé. La caducité du monothéisme occulte la fin du transcendantalisme. L'homme quitte la Terre à partir du moment où il quitte le sens religieux qui lui a permis jusqu'alors d'opérer sa conquête terrestre. Pour que la prochaine conquête soit possible, pour que l'aventure spatiale ait lieu, il convient de bouleverser le sens actuel et de le faire évoluer vers un sens accru qui permette la conquête spatiale.
Et pour répondre à l'objection initiale : pas de croissance physique sans croissance sémantique englobante et supérieure. Les deux sont associés : le résultat physique nécessite le changement de sens. Il n'existe pas de croissance physique sans un changement de sens qui le contienne. Il ne serait pas possible qu'il existât seulement une conception physique sans support sémantique; ce serait une scission naïve qui rappellerait le positivisme ou le matérialisme étriqué. Cette nouvelle conception est d'ordre religieux si tant est que c'est le religieux qui soutient tout type de culture. L'aventure spatiale ne va pas sans renouveau religieux.
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