mardi 26 février 2008

Indifférance

En ces temps d'indifférence généralisée, la population ne semble pas prendre conscience que la poursuite du système actuel la mène dans l'ornière. L'indifférence est la réponse au dégoût et à l'abrutissement. Il n'y aurait rien à faire puisque les décisions du système dépasseraient de loin la capacité d'action des simples individus-citoyens. Au risque d'en rajouter une couche, j'observerai que le découragement des moutons, encouragés dans leur moutonnerie fort peu mutine, est connexe avec le système de l'identité différAnte. Il faut bien que Jacques Derrida serve à quelque chose. Ce commentateur verbeux n'est pas populaire pour rien sur les campus américains. Sa gloire tient à son invention-phare, le concept glorieux de la différance. Soit dans son système de pensée un concept verbeux au service du verbiage. Mais aussi un verbiage symptomatique qui met en exergue l'opération de camouflage entreprise par le système. Qu'est-ce que la différance? C'est le fait de différer toujours. Derrida constate ainsi que le sens est toujours absent, qu'il est situé dans un ailleurs à jamais différé.
C'est comme par enchantement exactement ce que sous-tend l'identité pirate : toujours différer, toujours biaiser, toujours refléter. Derrida serait-il le pirate de la philosophie, ce qui expliquerait que les épigones intellectuelles du système l'ait pris en considération (totalement grandiloquent et disproportionnée par rapport à la valeur réelle de sa "pensée"), bien qu'il soit totalement abscons et incompréhensible? En tout cas, notre penseur-pirate nous offre à son insu de sacrées clés pour comprendre le monde avec la différance.
Nous lui en serons toujours reconnaissants et nous ne manifesterons pas à son endroit cette indifférence morne qui caractérise l'attitude du sujet démocratique quand on lui oppose qu'il est roulé de plus en plus dans la farine et que ce mépris finira en totalitarisme au nom de la Liberté chérie. La différance correspond point par point à la conception ontologique des pirates, dont le système consiste à expliquer que les fondements sont différants, mais parfaitement identifiés et maîtrisés. Vaste blague, qui finira en sinistre sinistrose.
Le différant est toujours ailleurs dans le mesure où le différend se trouve toujours différer/différé. C'est la principale stratégie des pirates que d'échapper au conflit par la fuite en avant ou l'explication différée. Qu'est-ce qu'une identité différée? C'est l'identité introuvable et impossible qui prétend être de ce fait supérieure et révolutionnaire. C'est ainsi que les différants évitent les différends en les noyant dans des promesses insolubles et de plus en plus intenables.
C'est ainsi que l'identité différante permet d'accomplir l'exploit de fonctionner grâce au jeu de miroirs, qui n'est autre aussi que le jeu de dupes. On sait que les pirates accomplissent leur forfait sous des bannières qui sont soit anonymes, soit mensongères. D'ordinaire, l'identité est efficace en ce qu'elle permet de décliner avec précision sa situation. Celui qui n'a pas d'identité est acculé rapidement à admettre sa situation de façon imparable, cas souvent dramatique des sans-papiers. Avec l'identité différante, le cas est différent. Le différant n'est d'aucune identité présente. Il agit toujours sous une bannière vague et indéterminée. Si on le presse de décliner son identité, il répondra par une identité autre, soit une identité mensongère, soit une identité à jamais différante, à jamais différée.
L'apatride est aussi détenteur d'un stratagème qui lui permet de ne jamais se trouver en panne ou en manque d'identité. Tout au contraire, il détient le prétexte parfait pour se dédouaner et passer au travers des mailles du filet. L'identité à venir est en effet une identité irréfutable, de la même manière qu'il est rigoureusement impossible de démontrer que quelque chose n'existe pas. Partant de cette faiblesse argumentative ou logique de premier ordre, le différant a compris qu'il pouvait prétexter de la différance pour usurper l'identité et promettre monts et merveilles.
Le point névralgique de cette identité biaisée et controuvée tient bien entendu à la nationalité, comme la définition d'identité le sous-tend. Demander à quelqu'un son identité, c'est demander son identité nationale juste après son identité singulière et personnelle. Or le différant n'a pas d'identité, hormis une identité aussi hypothétique qu'à venir. Le différant a pour stratagème de se réclamer d'une identité personnelle et nationale d'emprunt. Soit :
1) qu'il n'y souscrive pas du tout;
2) qu'il se réclame d'une identité qui est provisoire ou qui n'est pas la sienne.
Nous y sommes. Le propre de l'identité différante consiste à agir sous une bannière d'emprunt qui permet d'encourager et de favoriser les actes de piraterie. Le cas et le cadre du 911 sont éclatants. L'identité des pirates réels est introuvable et mystérieuse parce que ces pirates sont apatrides. Mais également, les actes de piraterie sont organisés sous une bannière d'emprunt, la bannière américaine. Il est de bon ton aujourd'hui, quand on veut passer pour contestataire à peu de frais, de prétendre, avec force trémolos dans la gorge, que les autorités américaines seraient les instigateurs des attentats du 911. C'est oublier un peu vite que si des pirates sont tapis comme des taupes dans l'appareil d'Etat, les vrais pirates parasitent l'appareil d'Etat américain à des fins totalement antiaméricaines (et antioccidentales).
Des banquiers apatrides de la City ou de Wall Street, ou d'autres officines rattachées à la gande banque, des sous-groupes privées et incontrôlables, qui relèvent de la City ou de Wall Street, mais n'en font pas partie officiellement, de tels pirates ne sont pas américains, mais utilisent la bannière américaine pour agir. Ils ont besoin d'institutions puissantes, ils détournent les premières institutions mondiales. Il ne faut pas s'étonner après que les institutions américaines plongent et qu'elles subissent le contrecoup d'une telle différance. Responsables des différends qu'engendrent les attentats du 911, elles sont les coupables idéaux qui ne sont coupables que de ventriloquie.

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