jeudi 24 avril 2008

Circulez, y'a rien à voir!

Par ces temps d'effondrement du système occidentaliste, mondialiste et immanentiste, je tiens à rappeler que la duplication hallucinatoire et fantomatique la plus courante tient à la distinction entre le système et les actions humaines. Le système serait indépendant des actions humaines. Quoi qu'il arrive, il suivrait son cours, bon an, mal an, bon gré, mauvais gré.
Cette conception implique que le système soit immuable quel que soit le cours des événements qui surgissent et que le cours des événements n'affecte pas le système. Penser de la sorte est certes délirant. Car le système n'est jamais que constitué des actions humaines. Il ne leur est nullement indépendant. Quand les actions humaines en viennent à se montrer périlleuses, le système est affecté.
Toute cette rhétorique du dédoublement systémique vise en fait à se cacher la réalité et à ne pas se confronter à la gravité inouïe de la crise présente, qui est la crise de la modernité. Souvent quand on expose la vérité du 911, l'auditeur occidental finit par lâcher avec un certain désespoir, quand il est apte à comprendre que la version officielle est un tissu de mensonges qui plus est malhabiles et grotesques, que :
1) On ne peut rien y faire.
2) Le système surmontera cette crise comme les autres, puisque cette crise n'est jamais qu'une énième crise comme le système des hommes en a tant surmonté.
3) Il serait temps de cesser la naïveté. De tous temps, certains hommes cupides ont eu recours aux coups tordus, aux mensonges et aux dissimulations. Le 911 ne fait pas exception à la règle.
4) Le vrai problème n'est pas le 911, qui n'est qu'une catastrophe fort limitée, à relativiser par rapport à des problèmes plus graves.
On le voit, ces propositions résument tout l'arsenal rhétorique qui consiste à regarder ailleurs ou à minorer la gravité des faits, sur le mode : le système est sans doute assez malfaisant, mais enfin, le système est le système et il poursuivra sur sa lancée. Dans le fond, cette idée d'un système immuable est d'autant plus rassurant que l'homme est confronté pour la première fois à l'unicisation, voire l'unicité du système, ce que l'on nomme mondialisation.
Ce processus ne fait qu'accroître la gravité de la crise systémique. Car auparavant, un système n'était jamais que le produit d'une certaine culture, confronté à la somme de nombreux autres systèmes. Aujourd'hui, l'unicisation du processus systémique rend l'homme plus fragile : si le système s'écroule, c'est en effet l'homme qui se retrouve menacé.
La menace majeure et inégalée qui pèse sur le système le plus tentaculaire, et, de ce fait, le plus faible de l'histoire humaine, le seul à prétendre à l'unicité, à défaut d'union, permet de mieux comprendre les moyens dérisoires et aberrants qu'emploie l'homme contemporain pour faire diversion, soit pour réduire la portée de la crise systémique et la transformer en crise structurelle et passagère.
Il faut bien insister sur ce point : le 911 n'est pas une crise comme une autre en ce qu'il affecte le système dans son ensemble et depuis ses fondements et en ce qu'il annonce l'effondrement du premier système unifié, c'est-à-dire mondialisé. Parler de crise passagère, ou relative, ou expliquer que la marche du système est indépendante de nos actions, tous ces stratagèmes sont de peu de poids et de prix face à la gravité de ce qui est en train de se produire.
Un autre moyen de conjurer le pessimisme qui s'empare de nous quand on constate que le mensonge a recouvert de son ombre maléfique nos valeurs soi-disant si bénéfiques et nobles, c'est le cynisme : mieux vaut légitimer ce qui se produit que d'en prendre la mesure véritable. De ce point de vue, le cynisme de mes contemporains est abyssal et insondable : il consiste à normaliser, au nom de l'histoire souvent, le 911, en expliquant que de tels phénomènes ont toujours existé, voire que ces phénomènes ne sont pas l'essentiel.
Qu'est-ce que l'essentiel alors? Soit les préoccupations individuelles ou privées (le lot de consolation), soit tout type de préoccupation, pourvu que lesdites préoccupations n'affectent pas la marche et le fond du système. Bref, regardons ailleurs plutôt que de sonder le précipice et la catastrophe. Je tiens au contraire pour assuré que le meilleur moyen d'agir et de tenir pour dérisoire la proposition selon laquelle l'homme de la masse ne peut rien faire car le système ressortit de l'altérité la plus cruciale, d'une altérité telle qu'il n'y a rien à faire, est de rappeler que le système qui s'écroule est précisément le système dans lequel se tiennent de pareils discours navrants.
Si le meilleur stratagème qu'ait inventé le diable consiste à laisser croire qu'il n'existe pas, la meilleure explication de la décadence tient au fait de croire que la décadence n'existe pas, avec ces variantes :
1) On ne peut rien y faire.
2) Les crises ont toujours existé, n'exagérons pas.
Malheureusement, si les crises ont toujours existé, le 911 annonce que la crise actuelle est l'annonce de l'effondrement du système immanentiste et occidentaliste et surtout, surtout que l'effondrement de ce système n'est pas un effondrement comme il y en eut d'autres, la chute de l'Empire romain par exemple. Au contraire, l'Empire romain n'était qu'un système humain parmi tant d'autres. L'actuel système est globalisé, c'est-à-dire que s'il s'effondre, c'est toute l'humanité, y compris le petit Tibétain ou le petit Zaïrois d'un village inconnu, sans télévision et sans connaissance du 911, qui se trouvera touchée.
Je ne pense pas que le 911 annonce la fin de l'homme. Par contre, la crise qu'il dévoile signifie de profonds bouleversements; Se rend-on compte que moins on agira, saoulé par nos préoccupations individualistes et égotistes, plus ces bouleversements seront violents et atteindront des paroxysmes de chaos et de turbulences apocalyptiques?

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