« Après cela, je vis descendre du ciel un autre ange, qui avait une grande autorité; et la terre fut éclairée de sa gloire.
Il cria d'une voix forte, disant: « Elle est tombée, elle est tombée, Babylone la grande! Elle est devenue une habitation de démons, un repaire de tout esprit impur, un repaire de tout oiseau impur et odieux,
parce que toutes les nations ont bu du vin de la fureur de son impudicité, et que les rois de la terre se sont livrés avec elle à l'impudicité, et que les marchands de la terre se sont enrichis par la puissance de son luxe. »
Et j'entendis du ciel une autre voix qui disait: « Sortez du milieu d'elle, mon peuple, afin que vous ne participiez point à ses péchés, et que vous n'ayez point de part à ses fléaux.
Car ses péchés se sont accumulés jusqu'au ciel, et Dieu s'est souvenu de ses iniquités. »
Apocalypse, 18.
“Come we go burn down Babylon
One more time, Come we go chant down
Babylon one more time
For them soft, yes them soft
Them soft, yes them soft
So come we go chant down Babylon one more time
Men see their dreams and aspirations
Crumble in front of their face
And all their wicked intentions to destroy the
Human race.”
Bob Marley, Chant Down
«C'est quand le danger est le plus grand que le salut est le plus proche.»
«Là où croît le péril, croît aussi ce qui sauve.»
Friedrich Hölderlin.
Aujourd’hui, il faut être béat et confit d’illusion pour souscrire à ce propos, tant il est clair que depuis le 911 (c’est ainsi que j’appellerai par commodité cet événement) l’impérialisme occidental n’est plus une source d’interrogations et de perplexités – mais une réalité. Je le définirais ainsi : alors qu’auparavant, on pouvait encore penser que la dichotomie de l’Occident entre ses principes revendiqués (liberté et démocratie) et ses actions internationales laissait à réfléchir, aujourd’hui on est fixé sur cette dichotomie. Pourquoi l’Occident administrait-il une politique hors de l’Occident qui violait le plus souvent les lois qu’il se fixait avec fierté dans ses terres ?
Désormais, il faudra répondre : parce que le système occidental n’est pas capable de s’étendre à toute l’humanité (l’habituel refrain sur l’évolution et la généralisation de la démocratie à tous les peuples, le modèle occidental…). L’Occident renvoyait à une catégorie privilégiée de l’humanité, à quelque chose comme son élite, non dans un sens qualitatif, mais quantitatif. L’Occident s’enorgueillissait d’avoir trouvé une philosophie et une politique supérieures à celles précédentes, d’avoir rompu avec l’impérialisme et le bellicisme et d’avoir imposé la rationalité et la démocratie. Las ! L’Occidental désabusé se rendait compte que cette démocratie et cette liberté étaient de la poudre aux yeux et que les vrais principes que poursuivait l’Occident étaient en fait le capitalisme de plus en plus sauvage et le libéralisme de plus en plus ultralibéral.
Autrement dit : les arguments qui consistaient à expliquer que la contestation était mauvaise conseillère parce que l’Occident dispensait quand même la plus grande liberté jamais connue par l’homme s’effondraient sous l’idée dévastatrice que cette promesse de liberté était peut-être le cheval de Troie derrière lequel s’abritait la progression de principes qui n’étaient pas si novateurs que leur appellation originale le laissait entendre. Capitalisme et libéralisme. Qu’étaient le capitalisme et le libéralisme pour se dégrader sans cesse et déboucher sur le capitalisme sauvage et l’ultralibéralisme ?
Alors on pouvait s’entêter dans l’aveuglement et s’en tenir au seuil des appellations. Effectivement, le libéralisme promettait la liberté et le capitalisme était tout ce que l’homme avait trouvé pour imposer la démocratie à la sauce capitaliste et libérale. Mais il fallait vraiment être stupide pour ne pas observer l’inquiétante évolution qui s’était dessinée depuis que le libéralisme n’avait plus pour adversaire le communisme. Autrement dit, sans adversaire, sans opposant, sans ennemi, le libéralisme filait à sa perte et cette perte n’était nullement un phénomène original et jamais observé. L’ultralibéralisme ramenait en fait à l’élitisme qu’induisait le totalitarisme. Si bien que la propagande atlantiste qui consistait à se féliciter de la chute du Mur de Berlin et des régimes communistes n’était sans doute qu’une fausse bonne nouvelle.
Livré à lui-même, le libéralisme était de moins en moins démocratique et de plus en plus viscéral. Il en revenait, dans un éternel retour particulièrement ironique, à la forme atavique qu’il prétendait combattre selon sa propagande habilement dispensée par des propagandistes travestis en penseurs (au service des lobbys atlantistes, des think tanks et autres écoles philanthropiques à but fort peu caritatif et fort idéologique) : le totalitarisme. Il était certain que le libéralisme livré à lui-même finissait en ultralibéralisme, soit en extrémisme, et que cet extrémisme était dangereux dans la mesure où il livrait l’homme à l’élitisme et au totalitarisme sous le prétexte d’asseoir la liberté. Le dogme classique voulait que l’homme ait besoin d’un régime autoritaire pour permettre sa pérennité. Selon ce dogme, la démocratie était dangereuse parce que démagogique. Elle dégénérait rapidement en anarchie et en luttes intestines, qui rétablissaient au final le totalitarisme le plus pernicieux, celui qui, non pas tempéré par la réflexion et l’expérience, mais mû par l’impatience et l’avidité, exigeait d’enrichir ses élites dans un avenir des plus brefs et ne se souciait guère de l’avenir de l’intérêt général.
Il fallait regarder les choses en face : était-ce cet horizon sombre qu’annonçait l’inexorable dérive du libéralisme, sans cesse tempérée et excusée par des discours de propagande au nom de la liberté ou de savants calculs, qui ne démontraient pas autre chose que la démarche sidérante avec laquelle on peut manipuler les méthodes et les moyens scientifiques ? Avant le 911, on pouvait en douter. On pouvait encore croire que l’humanité penchait dangereusement du côté de l’arrivisme et du court terme, mais qu’elle était aussi protégée par son souci de l’intérêt général et ses trouvailles nobles et démocratiques. Le souci de la liberté parviendrait-il à préserver l’homme de ses tentations arrivistes, cupides, élitistes et totalitaires ?
Grave question, qui ne cessait d’être nourrie d’une autre, connexe : les méthodes du libéralisme capitaliste étaient-elles compatibles avec l’intérêt général de l’homme sur le long terme ? L’homme ne suivait-il pas son intérêt immédiat et n’abandonnait-il pas, pour un peu d’hédonisme, pour un peu de répit, de manière atroce et inexcusable, les problèmes de son avenir à long terme aux générations futures ? L’homme contemporain ne serait-il pas accusé par les générations futures d’avoir détruit son environnement et de lui avoir livré un héritage gravement détruit et désormais instable ? Quelle était cette ontologie qui mouvait ainsi la politique contemporaine de l’homme, au point de faire disparaître la pérennité sous l’immédiat, la survie et la viabilité derrière l’apparence ?
Le 911 a profondément changé la donne parce qu’il est certain que le 911 a redéfini ces questions si embarrassantes à répondre. Il est certain qu’il n’est pas facile de se poser le problème de la disparition de son espèce ou du danger accompagnant une manière de vivre dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle consistait à privilégier les intérêts immédiats et à ne pas tenir compte du long terme. Le 911 a clarifié les problèmes : soit l’homme vivait en brûlant ses cartouches à terme ; soit l’homme avait inventé une nouvelle et féconde manière de vivre qui bouleversait sa façon de voir l’existence. Si la deuxième hypothèse était le cas, le 911 entraîna des conséquences si évidentes qu’elles suscitèrent un démenti cuisant et cruel.
D’une certaine manière, l’intérêt du 911 fut d’apporter à notre place de manière brutale, mais évidente, une réponse aux alternatives que l’homme se posait, et notamment : la manière de vivre occidentale, libérale et démocratique était-elle un caprice inconséquent et non pérenne ou une révolution pérenne qui était de surcroît en mesure de s’étendre à l’ensemble de l’humanité ? Autre question : la mondialisation libérale était-elle le signe que le libéralisme réussirait dans le dessein qui avait anéanti le communisme (et ses Internationales) ou était-elle le processus qui apportait l’ultralibéralisme, l’élitisme et la déchéance ? Avant le 911, les doutes étaient de plus en plus marqués. Le 911 a vraiment répondu à notre place, si bien qu’aujourd’hui fermer les yeux et refuser de se poser les bonnes questions équivaut à de la lâcheté et de l’irresponsabilité. Personne depuis le 911 ne pourra dire : je ne savais pas.
L’invasion de l’Irak sous des motifs aussi grossiers que mensongers (et notamment cette grotesque alliance de Saddam Hussein et d’Oussama ben Laden) fut précédée de l’invasion de l’Afghanistan sous un prétexte contestable (la culpabilité de ben Laden dans cette affaire n’ayant jamais été apportée, c’est le moins qu’on puisse dire). Tous ces mensonges furent orchestrés au nom du Bien et de l’Amérique (USA) comme symbole du Bien. Inutile de préciser que les Etats-Unis englobaient dans leur sillage de nombreux alliés, mais bien entendu et au premier chef cet Occident dont elles personnifiaient jusqu’à la caricature les valeurs et la politique (la philosophie aussi et surtout).
Alors certes, le 911 n’est pas indispensable pour comprendre que l’Occident a réagi d’une manière violente, illégale et brutale aux problèmes que lui posait sa manière de vivre et de voir la vie. L’Occident a montré son vrai visage en envahissant les pays qui n’étaient pas encore sous sa coupe et qui contenaient les richesses énergétiques indispensables à cette ère où le vrai enjeu est la gestion et le contrôle de l’après-pétrole. L’Occident n’était démocratique et libéral que dans la mesure où il contrôlait le monde. Que certains enjeux majeurs lui échappent, et l’Occident montrait d’un coup de quel bois il se chauffait. Foin de la démocratie et du libéralisme dès lors qu’il était question de gérer la fin du pétrole et les conséquences de la mondialisation (notamment l’impossibilité pour l’humanité de vivre à l’occidentale) !
D’ailleurs, l’émergence de la Chine et d’autres grandes puissances montrait que le principal n’était pas la démocratie dans l’évolution contemporaine, mais le capitalisme. On pouvait être totalitaire et capitaliste et les Chinois l’étalaient amplement. En même temps, les Etats-Unis révélaient pour qui en doutait encore que leur impérialisme servait la cause de la suprématie occidentale. Dans cette affaire, les nations occidentales secondaires cessaient de jouer le jeu d’une partition indépendante et s’alignaient clairement derrière le point de vue occidentaliste. Personne n’était dupe et le vrai perdant était sans doute la démocratie, tous les beaux principes de la démocratie, l’idée que la démocratie avait élu son renouveau et son essor universel en terre d’Occident.
Rien n’était moins démocratique que cette manière d’agir occidentale, qui consistait à se prétendre démocratique sur ses terres et à se montrer totalitaire et impitoyable hors de ses terres. La démocratie était un masque qui se fissurait dès que se posaient les vrais problèmes. Et les citoyens des nations démocratiques étaient des moutons que l’on pouvait manipuler en leur servant la soupe des beaux discours de liberté. Les peuples démocratiques se laissaient mener comme des veaux à condition qu’ils bénéficient de leur niveau de vie démocratique. Ils étaient prêts à de nombreux compromis sur leur pouvoir d’achat et leurs libertés pour peu qu’on leur promette de maintenir la démocratie et ses gains. Ils fermaient les yeux sur les agissements de leurs capitaines d’industries et les politiques hors de leurs terres pourvu que ces agissements ne leur portent pas préjudice.
Finalement, le citoyen démocratique était comme les autres hommes. Il se montrait veule et servile si ses intérêts le poussaient à préserver ses acquis. Il était certes inquiet qu’on rogne sur ses acquis sociaux, mais il préférait ne pas se poser trop de questions embarrassantes, qui l’incommodaient et le poussaient à se demander si la démocratie n’était pas en train de s’effondrer. Autant dire que le 911 ne fut pas seulement un drame isolé ou épisodique. Le 911 fut bien plus qu’une tragédie sans conséquence sur la suite des opérations (c’est le cas de le dire). Le 911 fut un événement fondateur comme l’on dit. Cet événement fondateur ne fut autre que la clarification de l’évolution véritable de la mondialisation, du libéralisme et de la démocratie.
L’Occident était impérialiste. L’Occident ne dissimulait que fort peu les divergences globales de fond, autrement qu’à des titres associatifs ou privés. Contrairement à la projection grossière de l’Orient, c’était bel et bien l’Occident qui existait à l’état de bloc homogène (au niveau de la philosophie et des Etats) – bien plus que l’Orient, fort hétérogène ; bien plus que l’Islam, fort peu uni. À tel point que parler d’occidentalisme n’était pas une vue de l’esprit, même s’il est certain que les nuances et les exceptions méritaient toujours d’être rappelées. Le sortilège du 911 agissait comme s’il servait de catalyseur et de révélateur quasi surnaturels. Non, le 911 n’était pas un événement isolé et coupé du cours historique général de l’Occident !
W. (Bush) avait-il parlé de Croisade du Bien contre le Mal ? Eh bien, c’était vraiment ce vers quoi menait l’occidentalisme : l’idée que l’Occident était le Bien et que les principes universels dont se réclamait l’Occident pour agir n’étaient pas le fond de ses visées et de ses menées. Dans le fond, l’Occident servait sa propre cause, étant entendu que cette cause n’était pas celle des peuples occidentaux, mais celles de ses élites, prêtes à toutes les alliances pour parvenir à ce but enivrant : la domination durable de l’Occident. Il était saisissant que la mondialisation aille de pair avec le 911 et que le 911 ne soit certainement pas cet événement isolé que l’on invoque avec remords quand on veut se cacher la vérité et ne pas se confronter aux graves problèmes qu’il pose.
Sans doute la principale cause au déni et à l’occultation tenait dans le véritable visage du 911. Affronter le 911, c’était se rendre compte qu’à l’instar de la métonymie qui exprime la partie du tout, le 911 exprimait le sens de la mondialisation et de l’Occident. Quand les tours s’effondrèrent dans une médiatisation inouïe, ce ne sont pas seulement, avec les milliers de victimes, les emblèmes de la puissance américaine qui se sont effondrées à une vitesse stupéfiante. Les tours symbolisaient l’Occident et dans une prophétie saisissante, c’est la chute de l’Occident qui s’est ainsi manifestée, comme si une puissance surnaturelle, ce Dieu peut-être refoulé, cherchait à mettre en garde l’homme sur le destin qui attend tout occidentalisant, sans aucune illusion sur sa puissance de déni, de mensonge et de cynisme : la chute impitoyable, la chute effroyable, la chute de l’Occident.
Effectivement, si l’Occident avait annoncé sa chute de manière sinistre et prémonitoire, à l’insu de son plein gré, de la plus involontaire des manières, celle du criminel qui tue pour faire disparaître le corps, alors que le corps est à ses côtés et signe son forfait, la remise en cause ne saurait venir de cet Occident manipulateur et pervers, puisque l’Occident est prisonnier de son piège frelaté et ne saurait changer de chemin. Pour ce faire, encore lui faudrait-il vaincre son ensorcellement et bénéficier d’autres alternatives. Il n’en a aucune et personne plus que l’Occident n’est aveuglé sur les véritables actes qu’il commet. L’insigne majorité des populations occidentales ne voient que leurs petits intérêts étriqués et immédiats et détournent le regard au lieu de se poser les véritables questions ; quant aux élites, elles pensent d’autant plus être responsables et maîtres du destin de l’Occident (qu’est-ce qu’il est grisant de se sentir maître de son propre destin et du destin de l’humanité et de toucher enfin du doigt le pouvoir des dieux !) que ces élites prétentieuses, décadentes et arrogantes croient que le cynisme dont elles font preuve s’accompagnent de la lucidité. Malheureusement, elles sont si aveuglées et ensorcelées qu’elles ne se rendent pas compte qu’elles agissent à l’inverse de ce qu’elles estiment préméditer avec liberté, autonomie et consentement. Pauvres élites ! Elles sont emplies du ridicule de qui se croit important alors qu’il est manipulé. Oui, c’est cela, les élites sont ces manipulateurs manipulés qui évoquent le balayeur balayé.
Et tandis que le 911 évoquait l’effondrement sinistre et inquiétant de l’Occident, ces élites crurent qu’elles avaient profité de l’événement et qu’elles accroissaient encore leur pouvoir et leur prestige. Vraiment pauvres élites ! La troisième image, c’est ce surgissement du Diable en la personne d’Oussama ben Laden. Effectivement, si cet homme jusqu’alors décrit comme un chef terroriste, mais un chef marginal, avait monté l’opération du 911, c’était plus qu’un monstre. C’était un démon, capable d’assassiner froidement des milliers de civils et d’innocents par la pire des armes, l’homme transformé en martyr et en pur formatage au nom de la cause qu’il défend, de ce Dieu dont on a peine à penser qu’il exige de pareils sacrifices de la part de ses sectateurs. Pauvre Allah ! Car la troisième image est celle de la projection.
Non seulement ben Laden est un mythe, mais c’est un mythe fabriqué par l’Occident, autrement dit : il serait trop facile de réduire la projection au fantasme d’un élu démocratique dégénéré (W.), hypothèse la plus commode et la plus superficielle ; mais tout aussi périlleux de se voiler la face en décryptant le mécanisme de la projection ramené à un courant seulement limité, par exemple les néo-conservateurs (quand on veut vraiment circonscrire la dérive à une idéologie finalement de peu de portée), ou les républicains (quand on veut ménager l’espoir que les démocrates et le courant modéré du libéralisme peuvent encore sauver plus que les meubles, l’Occident lui-même et une certaine idée de la liberté), ou les atlantistes (quand on reconnaît que le problème est d’importance, ne se limite pas à quelques courants occidentaux, mais qu’on tient malgré tout, tout de même, à le séparer de l’Occident et à incriminer une certaine manière impérialiste de considérer la politique, désignant les élites américaines).
Malheureusement, la projection renvoie in fine à l’Occident lui-même, comme le boomerang revient toujours se fiche dans la figure de son sardonique expéditeur. Autrement dit : W. n’est que l’expression de la dégénérescence de l’Occident, tout comme l’atlantisme n’est que l’expression de la dérive qui a conduit l’Occident à se laisser mener par le courant de pensée impérialiste, cynique et aveugle qui le meut désormais. Républicains et démocrates ne sont que l’expression d’un seul et même mouvement, mouvement de dérive comme les glaciers tristement célèbres des Pôles. Le fond de l’affaire, c’est l’Occident, qui fait d’autant plus mine de se porter à merveille, de ne jamais s’être aussi bien porté, qu’en fait il se situe dans les gouffres et qu’il n’a jamais été aussi proche, malheureusement, de son effondrement. Pour que le 911 ait été possible, il faut que l’Occident se trouve en décadence, et en décadence prononcée – dans la décomposition et la purulence.
Refuser de voir l’impact du 911, tout comme l’impact de l’effondrement des tours, c’est refuser de voir logiquement ce que le 911 représente : le 911, c’est la radioscopie fulgurante de l’Occident. Le 911, c’est la prophétie qui condamne l’Occident, parce que l’Occident s’est fourvoyé au point de parer le mythe de Faust (et ses conséquences funestes) des habits de lumière de la liberté. C’est un point peu observé que le pacte de Faust annonce de manière saisissante, non la perdition de quelques brebis égarées, mais bel et bien l’anéantissement apocalyptique de l’Occident en tant que civilisation. Le pacte de Faust annonce bel et bien l’effondrement des tours comme conséquence qui attend Faust au terme du pacte – l’Occident au terme de son pacte diabolique. Il est extraordinaire et divin que ceux qui ont fomenté le terrible acte du 911 n’aient certainement pas voulu produire cette annonce irréfutable et paroxystique de la chute de l’Occident au travers de la chute des Tours. S’il s’agit de ben Laden et d’al Quaeda, ils voulaient seulement châtier les impies Occidentaux ; s’il s’agit d’un tout autre complot, ses acteurs voulaient affermir leur mainmise perverse et paranoïaque.
Qui a intérêt à provoquer, voire accélérer l’effondrement d’une civilisation ? Qui est en mesure de créer ex nihilo, tel un démiurge sadique et pervers, l’acte fondateur annonçant l’anéantissement d’une civilisation ? Pour ce faire, il faudrait que le ou les démiurges détiennent un pouvoir justement de démiurge, pas le pouvoir limité de grappes d’humains agissant pour le compte d’intérêts soudain si finis et dérisoires. Il est évident que le 911 est un événement qui dépasse de loin tous ses spectateurs (ce que les analystes ultérieurs et présents ont tant de mal à accepter, parce que la conclusion est trop douloureuse), mais aussi ses acteurs, totalement dépassés par les conséquences de leurs gestes. Acteurs directs ou acteurs indirects, le degré d’implication importe peu, car au final l’acteur direct se trouve tout aussi grotesque et marginalisé que l’acteur indirect, celui qui croyait vraiment établir un geste (ré)novateur en fomentant le 911, celui qui ne s’est pas rendu compte que son action destructrice ne servait à rien de son point de vue propre, à rien d’autre qu’à accomplir un destin plus vaste, un destin plus vague, le destin qui justement le dépasse. C’est d’ailleurs un fait peu remarqué, en tout cas pas à sa juste valeur, à l’heure où l’accusation de conspirationnisme suffit à discréditer toute théorie contestataire portant sur le 911, c’est-à-dire sur la nature hautement hasardeuse de la version officielle, à l’heure où les termes de terroristes ou d’al Quaeda sont des anathèmes valant plus que des blasphèmes et des excommunications, que, quelle que soit la vérité sur le 911, il y a bel et bien eu complot. Complot officiellement relayé émanant d’al Quaeda ; ou complot d’un groupe interne à l’Occident et à des puissances dévoyées et prêtes à tout pour perpétrer leurs visées autoritaires et violentes. Dans tous les cas, il s’agit bel et bien d’un complot.
Et où la thèse du complot mérite examen, c’est qu’elle est d’autant plus stipendiée et stigmatisée qu’elle contient la vérité (puisque dans tous les cas, le complot appartient à la vérité). La vérité du complot : car non seulement c’est un complot qui amène le 911 (selon la version officielle, ben Laden et ses sbires complotant dans les grottes de Tora Bora pour lancer des avions sur le World Trade Center), mais il se pourrait que ce complot délivre, dans une révélation dont le sens ne cesse d’ébaubir en même temps que de stupéfaire, la vérité dans le mensonge.
Je m’explique : la version officielle du 911 explique que l’attaque terroriste du 911 émane d’une organisation terroriste répondant au nom d’al Quaeda dirigée par son chef, le désormais incontournable Oussama ben Laden. En quelques jours, ces deux noms vont se ranger directement dans la catégorie des mythes, de ceux qu’on n’efface pas des mémoires et qu’on n’oublie pas des célébrations. Mythes paradoxaux, puisqu’ils seraient censés incarner la lutte du Mal contre le Bien, du fanatisme contre la liberté, de l’Orient contre l’Occident, de l’islamisme contre le christianisme. Les oppositions abondent. Mais ces oppositions manichéennes cachèrent dans un premier temps le fanatisme de W., le chef incontesté du parti des néo-conservateurs. Des néo-conservateurs ? Alors pourquoi ce parti, s’il était minoritaire, fut-il soutenu de l’ensemble des populations occidentales et surtout de leurs élites ? Au nom du patriotisme ? Au nom de l’aveuglement ? Qui étaient ces élites à se prétendre tolérantes, universalistes, mondialisées, bref, le gratin du Bien, pour soutenir un chef soi-disant illégitime et au mieux stupide (au pire un monstre crapuleux et obscène) ?
Je l’ai dit, le 911 agit comme un miroir où se concentre la vérité d’une civilisation, un miroir grossissant et un formidable et surnaturel révélateur, puisque au-delà d’un événement ponctuel, au-delà de la vérité événementielle, c’est la vérité profonde qui a surgi, celle qui transfigure l’instant pour évoquer l’ensemble du réel, ou l’absolu, ou le temps. Il est vrai que finalement la portée du 911 est mystique, au sens où seule l’ontologie peut la comprendre en servant un discours rationaliste ; et où seul l’esprit religieux est en mesure de saisir sa portée qui dépasse de loin ce que la plume la plus exercée d’un journaliste ou d’un intellectuel peut concevoir (soit les deux figures contemporaines du penseur, qui prétendent dépasser et déboulonner par leur originalité et leur acuité les modèles classiques du philosophe et du théologien). J’y reviendrai par la suite, puisqu’à ma connaissance, seul René Girard a osé porter un regard métaphysique sur le 911 et qu’il a rapproché cet événement de l’Apocalypse, telle notamment qu’elle est développée dans sa version chrétienne et biblique.
De nos jours, on privilégie tellement l’événementiel ! Les élites raillent avec tant d’esprit et de chien la théologie, véritable discipline issue de la science-fiction, et la philosophie, dont les visées spéculatives sont de la perte de temps et ont, de toute manière, été remplacées depuis belle lurette par leurs versions améliorées et scientificisées, je pense bien entendu aux sciences humaines et surtout, surtout, clou du spectacle, au direct journalistique ! Il est vrai que le morcellement des savoirs va de pair avec le morcellement des événements, dont il est impossible aujourd’hui de saisir la complexité et l’ensemble sans voir agité des versions kaléidoscopiques et sans cesse changeantes. Comment rester impassible quand tout sens d’ensemble est impossible ?
Voilà aussi ce que révèle le 911 : l’impossibilité de comprendre l’événement le plus considérable sans en demeurer justement au stade de l’événement. Au-delà, l’esprit se voit taxé d’élucubrateur – si l’on est poli. Sinon, les juges n’auront de cesse de harceler le malheureux, jusqu’à ce qu’il soit reconnu comme un menteur, un manipulateur, un pervers, un désaxé, un dangereux terroriste. Bref. Le mécanisme de la projection est à l’œuvre et fonctionne de manière remarquable et éclatante.
Dès que la fumée des tours réduites en poussières s’est quelque peu dissipée, je sortis de ma stupeur et m’empressai d’assembler le puzzle : guerre en Afghanistan, guerre en Irak, enjeux stratégiques majeurs. Saddam Hussein pendu ; ben Laden introuvable… Quelle soupe nous servait-on ? À l’époque je m’intéressais à l’assassinat de JFK, toujours mystérieux et non élucidé à ce jour et je me demandais sur cette affaire JFK : quelles puissances possèdent le pouvoir fascinant et considérable d’assassiner le président en exercice des Etats-Unis (soit la plus grande puissance mondiale de l’après-guerre) et de demeurer dans l’impunité la plus choquante ? J’ai malheureusement rapidement saisi que les similitudes entre l’assassinat de JFK et le 911 commençaient par cette question : quelles puissances sont assez puissantes pour, cinq ans après, n’avoir toujours pas réussi à arrêter le commanditaire proclamé (et de quelle manière) du plus grand attentat terroriste frappant sur son sol et contre un symbole éclatant la première puissance du monde ? Qui était donc ce ben Laden inarrêtable et ces branches grouillantes d’al Quaeda insaisissables ? Il fallait être soit secouru par Dieu en personne, soit relever d’un maléfice inexplicable pour échapper ainsi encore et toujours aux mailles du filet potentiellement le plus fin et méticuleux qu’on puisse imaginer (qu’on se renseigne sur les moyens d’investigation technologiques dont bénéficient notamment le NRO et la NSA pour le compte du renseignement américain) !
En cherchant à me documenter, grâce au remarquable livre d’Éric Laurent (un authentique reporter, lui) et aux multiples documentaires qui circulent sur Internet, autant dire sous le manteau, bref, la vraie presse qui n’est pas bâillonnée par les cartels occidentaux et occidentalistes, j’ai appris de manière irréfutable quelques faits qui ne peuvent certainement pas être taxés d’élucubrations, voire de théories hypothétiques et incertaines. Il y en aurait d’autres, mais ceux-là sont à vous couper le souffle.
1- L’honorable ben Laden n’a jamais été inculpé par le FBI ni par aucune instance des Etats-Unis pour les attentas du 911 (« Oussama ben Laden est recherché dans le cadre des attentats à la bombe perpétrés le 7 août 1998 contre les ambassades américaines de Dar es-Salaam, en Tanzanie, et de Nairobi, au Kenya »).
2- Le WCT7, un immeuble de 47 étages qui faisait également partie, avec les Tours Jumelles (WTC1&2), du complexe du World Trade Center, s’est effondré le 11 Septembre 2001, à 17 h 20, de manière inexplicable, selon le rapport de la FEMA (Federal Emergency Management Agency, l’Agence Fédérale des Situations d’Urgence). Quant à la commission dite Hamilton, elle ne mentionne tout simplement pas l’effondrement du WTC7, bien qu’il ait été « tiré » (« pull it ») selon son propriétaire, Larry Silverstein (également propriétaire des Twin Towers).
3- La version officielle, confirmée par ladite commission, concernant l’attaque du Pentagone et ses centaines de victimes, est absurde et contredit manifestement les lois de la physique, de la logique et ses propres conclusions : comment un pilote terroriste et novice, le présumé Hani Hanjour, aurait-il réussi à manipuler au ras du sol et à une vitesse vertigineuse le vol 77 d’American Airlines, un Boeing 757 avec 69 personnes à bord (qui a décollé de Washington à 8 h 20 à destination de Los Angeles, a été détourné par un commando de cinq terroristes et s’est écrasé sur une aile du Pentagone à 9 h 37) ? Comment expliquer, dans la façade de l’immeuble, selon le cliché officiel, l’impact de quelques mètres, en totale inadéquation avec les mensurations pachydermiques d’un 757 ? Pourquoi les autorités refusaient-elles de communiquer les vidéos et les clichés du drame, alors qu’aucun corps n’avait été retrouvé sur les lieux du crash ?
4- Un gigantesque délit d’initiés entoure le 911, sur les compagnies aériennes, mais aussi sur les compagnies d’assurance (voir, notamment, les révélations d’Eric Laurent, bien entendues reconnues et jamais démenties : « Peu avant le 11 Septembre, de très nombreux délits d’initiés sont avérés : Entre le 6 et le 7 septembre, 4 744 options de vente « put options » portant sur les actions d’United Airlines sont achetées, contre seulement 396 acquises à l’achat. Le 10 septembre, veille des attentats, ce sont 4 516 « put options » d’American Airlines qui sont acquises, contre 748 à l’achat » ; mais aussi : « des niveaux élevés d’options de vente sur les actions de sociétés de réassurance susceptibles de payer des milliards pour couvrir les pertes dues aux attentats : Munich Re et le Groupe AXA » ; « des niveaux élevés d’options de vente sur les actions de compagnies financières touchées par les attentats : Merrill Lynch & Co., Morgan Stanley, Bank of America » ; « des niveaux énormes d’options d’achat sur un fabricant d’armes dont l’action a monté en flèche : Raytheon »).
5- Le FBI a publié une liste de 19 personnes soupçonnées d’être des pirates de l’air ayant détourné 4 avions, 3 jours après les attentats. Une liste complète avec photos sera publiée le 27 septembre 2001. Pourtant il apparaît bien vite que plusieurs de ces pirates de l’air sont vivants. Dès le 21 septembre, le Los Angeles Times affirme que 5 personnes ont été identifiées dans plusieurs pays arabes et protestent de leur innocence. Aujourd’hui que cela est confirmé, la liste des 19 pirates de l’air n’a pourtant jamais été corrigée ni par la Commission d’enquête ni par le FBI, qui continue à la publier telle quelle sur son site. D’où le FBI tient-il ces identités ? Apparemment des listes de vol des avions détournés. Or, il apparaît que dans les mois qui ont suivi le 911, aucune liste publiée par les médias ne révèle ces noms. Ces listes subissent des fluctuations au gré des publications sur le nombre et les noms de certains passagers, mais ne donnent pas les noms des pirates de l’air présumés. Aucun pirate n’a été identifié lors des autopsies réalisées sur les restes des passagers des vols 77 et 93. En fait, rien ne prouve que les pirates de l’air présumés se trouvaient bien à bord des avions (informations relayées notamment par le site Internet Reopen 911).
Sans faire le jeu de polémiques stériles, il est certain que ces cinq faits suffisent à fonder la seule conclusion rationnelle qui vaille. La version officielle, telle que présentée et entérinée par la commission dite Hamilton (du nom de son vice-président) le 24 juillet 2004, est aberrante et ne tient pas la route. Elle est encore plus incohérente et fausse que la version officielle entourant la mort de JFK. C’est peu dire et c’est tout dire. JFK aurait été abattu par un déséquilibré, lui-même liquidé par un caïd de la pègre, lui-même abattu par un inconnu. Le 911 a été perpétré par 19 terroristes dont au moins 6 présentent une identité controuvée. Alors qu’est-ce qui se cache derrière les attentats les plus spectaculaires de l’histoire, si l’on y ajoute les guerres au terrorisme menées en Afghanistan et en Irak ? Qui a le pouvoir de commanditer ces attentats, de les mener à bien, d’accréditer une version planétaire totalement fausse du drame, d’ignorer les contestations les plus évidentes et rationnelles ? Qui, sinon l’Occident lui-même, et quels que soient les sinistres acteurs qui se cachent derrière cette tragédie dont le plus tragique est certainement le mensonge qui l’enserre ? Pourquoi protège-t-on un mensonge évident si ce n’est parce que le mensonge est ici fondateur de l’événement en tant que tel, mais aussi de la civilisation qui porte cet événement tel Sisyphe ? Dire la vérité, serait-ce détruire l’Occident bien plus profondément que les Twin Towers ?
Il est capital de préciser que la méthode qui consiste à asséner la vérité la plus froide, la plus implacable contre les sornettes qui nous sont débitées en guise d’explications évidentes, relayées toutes les minutes sur les médias officiels, soit les relais de propagande du pouvoir et de l’autorité en terre d’Occident, cette méthode se doit de séparer impitoyablement les faits qui démontrent que la version officielle est fausse (pour ne pas ajouter plus) et les hypothèses, même les plus plausibles et décisives. Sans quoi les accusations et les dénigrements porteront leurs fruits. Sans doute de nombreuses interprétations, dispensées par des voix autorisées, s’appuyant sur des informations étayées, sont-elles justes. Mais les faits suffisent à balayer d’un revers de main la version officielle.
Nul besoin par la suite de risquer de discréditer ces faits en les mêlant à des accusations incertaines et hypothétiques, aussi fondées soient-elles. Il est suffisamment éclatant que les faits ne concordent pas avec la version officielle, ce qui signifie que ceux qui ont dispensé la version officielle ont des secrets à cacher et que cette version officielle est un mensonge. Peu importe de savoir qui ce mensonge protège. Il est des protections qui meurtrissent plus que les pires blessures. Ce qui compte finalement, c’est que le mensonge sur le 911 révèle à quel point le 911 est un révélateur de la faillite de l’Occident.
J’aimerais rappeler que la guerre d’Irak s’appuie sur un mensonge invraisemblable : celui des armes chimiques, mensonge reconnu aujourd’hui, bien qu’il ne fasse pas bondir de révolte l’Occidental moyen, trop habitué aux scandales officiels et à la corruption médiocre de ses représentants et de ses élites. Il a tort, le pauvre Occidental, car la guerre d’Irak fonde l’impérialisme occidental révélé au grand jour et prêt à tout pour s’emparer des richesses en voie d’extinction. Le pauvre Occidental, ce même impérialisme va fondre tôt ou tard sur ses acquis de haute lutte et ne fera pas de quartier, tout Occidental qu’il est. S’il savait, le pauvre Occidental que la cupidité des carnassiers de la haute finance et des multinationales apatrides cache bien plus qu’une histoire de gros sous : la volonté d’engloutir le réel dans une reconstruction, une story telling à l’arrière-goût rance et putride !
Car la guerre d’Irak est aujourd’hui un échec qui dépasse de loin le caractère militaire. Échec universel pour le coup, tant politique que philosophique. Mais cet échec tous azimuts, cet échec prévisible puisque adossé sur un mensonge, cet échec possède son double, tout comme les Twin Towers sont des mimes saisissants, tout comme ben Laden est le double de W., tout comme le 911 est un gigantesque jeu de miroirs (selon la remarque avisée de Laurent, je crois) : la guerre d’Afghanistan. Quoi ? se récriera-t-on de fureur, cette guerre est légitime au moins, puisque les talibans ont refusé d’extrader ben Laden et que ben Laden est responsable du 911 ! Que nenni, mon bon prince. Ben Laden fut accusé par le fait du prince pour le 911, selon les outils de propagande américains les plus officiels, mais à ce jour aucune preuve n’est venue étayer ces accusations pourtant graves et capitales. Aucune.
Car la vidéo de ben Laden revendiquant de manière vague et amphigourique ces attentats est plus que suspecte. D’une part, une vidéo n’a pas valeur de preuve irréfutable. D’autre part, la traduction a été retouchée. Enfin, de nombreuses incohérences contredisent la véracité de ce ben Laden peu ressemblant et soudain droitier. Qu’est-ce qu’un sosie ? Le mime du réel. Les Occidentaux sont en train d’apprendre à leurs dépens qu’il est impossible de remplacer totalement le réel par sa reconstruction humaine et que cet essai coûte l’anéantissement. Les Occidentaux ont commis un sacrilège et payeront pour ce sacrilège. Le réel se venge toujours avec usure quand certaines de ses parties infimes essayent de l’effacer (terme qui désigne aussi l’homicide) et de le remplacer. Sa vengeance est implacable : elle consiste à rappeler que la tentative était vouée à l’échec puisque aucune partie ne saurait remplacer le tout. Par contre, toute partie qui prétend remplacer dans sa démesure le tout est anéantie au nom de son désir d’universalisation et du syndrome de la grenouille et du bœuf.
Il est ironique que ce soit le diable ben Laden qui ait osé rappeler la simplicité du réel face à la complexité laborieuse des assauts officiels. Le 16 septembre, ben Laden dément une implication dans les attentats du 911 dans un communiqué, affirmant : « Je voudrais dire au monde que je n’ai pas réalisé ces attentats, qui semblent avoir été planifiés par des gens qui ont des motivations personnelles. » (Dénégations qu’il réitèrera par la suite.)
Dont acte, d’autant que ce démenti s’enrichira d’un démenti écrit et que les talibans accepteront d’extrader ben Laden à condition que les Américains apportent sa culpabilité. Il est capital de rappeler que les preuves de cette culpabilité pourtant capitale ne seront jamais offertes au monde, contrairement aux accusations sans preuve qui mèneront à la guerre contre le terrorisme. Par contre, l’Afghanistan sera bombardé et colonisé, tandis que des milliers d’innocents, dont certains ignorent jusqu’aux attentats du 911, seront massacrés sous les bombardements… Il est vrai que la guerre d’Afghanistan a servi avec une opportunité inouïe le projet américain de s’emparer des richesses en gaz et pétrole entourant la mer Caspienne, tout comme la guerre en Irak permet de mettre la main sur des richesses pétrolières capitales dans la perspective de l’ère de la fin du pétrole…
Ce n’est pas mon propos que d’offrir un énième panégyrique du 911. D’autres sites s’y sont employés mieux que moi et présentent des synthèses écrites et visuelles remarquables. Le but est de constater que les mensonges grossiers jonchent le 911 et ses conséquences dramatiques comme des cadavres bordant une route de campagne. Il est capital de rappeler que le 911 ne fut certainement pas un cas isolé à vite oublier, mais l’acte fondateur par excellence, celui porteur de changements – et de changements sinistres. Ceux qui ont fait le 911 n’ont pas hésité à assassiner froidement des milliers de vies (le 11 septembre, mais aussi dans les semaines qui vinrent, puis par des guerres injustifiées et injustifiables) parce qu’ils estimaient que les morts étaient indispensables à des enjeux stratégiques et politiques qui dépassaient de loin l’arrivisme et la crapulerie pécuniaires et affairistes.
Les auteurs du 911 agirent en fait comme des patriotes d’un genre un peu particulier, des patriotes au service de l’Empire, autrement dit : des impérialistes. Impérialistes occidentaux, il va sans dire, puisque le gagnant de la grande manipulation demeure l’Occident et que c’est au nom de cet occidentalisme que les auteurs du 911 aimeraient nous faire avaler la pilule du 911. Malheureusement, ces auteurs fort peu responsables (c’est mon goût de l’étymologie qui me titille) n’ont fait en fait que démasquer au grand jour l’impérialisme occidental travesti en rationalisme, démocratie, libéralisme, et toutes les valeurs droits de l’hommistes que l’on nous sert à la louche pour nous endormir et nous faire croire que le monde s’est bonifié depuis que l’Occident a été éclairé par la lanterne magique des Lumières et de l’enchantement rationaliste.
Le 911 a apporté la vérité en lieu et place du mensonge qui était censé nous endormir. Ironie de l’Histoire, la vraie, c’est en prétendant manipuler et mentir avec leur coutumière mauvaise foi que les occidentalistes les plus durs, ceux en mesure de fomenter des attentats comme ceux du 911, ont servi la véritable lumière qu’ils auraient estimée comme les ténèbres de l’Enfer s’ils avaient mesuré la portée de leurs actes et de leurs gestes. Ces mêmes occidentalistes avaient déjà réussi l’exploit de coloniser le monde depuis Colomb pour mieux déclencher le processus inéluctable de décolonisation et de néocolonialisme. Le 911 a dépassé en premier lieu ses auteurs parce qu’il a démasqué l’Occident comme le lieu du mensonge au nom de la liberté (et de la raison).
Ajoutons que le mensonge autour du 911 est à ce point grossier qu’il n’est même pas un mensonge crédible pour qui possède encore un peu d’esprit d’analyse et de critique. Il est vrai que l’acceptation du 911 a discrédité les médias occidentaux et la définition de la démocratie occidentale : selon le mot d’Aristote, gouverner et être gouverné. Le 911 a montré que l’esprit critique était en terre occidentale l’exception qui confirmait la règle et que depuis longtemps il avait été remplacé par l’esprit moutonnier, si tant est que ce fameux esprit critique ait existé un jour ou l’autre. Le 911 est un mensonge qui est sans puissance et sans portée en tant que mensonge, un mensonge destiné à être démasqué et rejeté (un peu comme pour l’assassinat de JFK, mais avec des conséquences d’une tout autre ampleur).
Dès lors, il est certain que le 911 annonce l’effondrement de l’Occident. Au moment où l’avenir de l’humanité est en péril, il n’est pas certain que cette annonce soit une catastrophe, puisqu’il n’est pas certain que le régime occidental soit plus performant que les autres régimes, contrairement à ce que sa propagande essaye de nous faire accroire, se parant des vertus irréfutables du Bien absolu. Peut-on dire que la prospérité matérielle constitue un bien tel qu’il autorise à détruire l’environnement et à remettre gravement en question l’avenir des générations futures ?
La réponse est bien entendu : non. Alors l’effondrement de l’Occident sera-t-il aussi atroce, soit générateur de souffrances et de victimes, que le 911 le fut directement et indirectement (j’inclus bien sûr les victimes des guerres d’Irak et d’Afghanistan, les victimes à venir, mais aussi les victimes au nombre de cinq mille qui furent sacrifiées à la reconstruction de l’emplacement mortifère du WCT après les attentats) ? Soit l’humanité disparaîtra et le 911 est la tragédie qui annonce cette disparition inimaginable pour l’homme, l’homme étant incapable de gérer l’accession de son désir à la technologie ; soit l’homme va prospérer et se sortir de ce péril inimaginable. Je penche résolument pour la seconde hypothèse et si j’espère que l’Occident émergera sans trop de heurts de son nihilisme actuel, il est certain que seuls les Africains peuvent conduire ce renouveau et que seul l’espace peut être la terre d’accueil et d’hospitalité de ce renouveau. Que les Africains soient les fers de lance du renouveau spatialiste est aussi déconcertant que prévisible. Déconcertant : après tout, les Africains sont les grandes victimes et les grands délaissés de la mondialisation engendrée par Colomb. Prévisible : après tout, les Africains sont les instigateurs et les maîtres de l’hospitalité, au point que l’on a pu évoquer à l’endroit de leurs cultures la douce expression de culte de l’hospitalité.
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