Il est tout à fait normal qu'un salarié du système formaté pour travailler et travailler sans relâche se place exclusivement au service du système. Car quelles sont ses conditions de vie et quelle est sa mentalité? Le travailleur travaille avec le sentiment que son acharnement et son courage sont au service de la tâche qu'il sert et que cette tâche est au service du système. Le travailleur est persuadé qu'il sert le système dans le sens où sa tâche remplit une des cases qui servent à faire fonctionner le système. Le travailleur a vraiment le sentiment de devoir accompli et du travail bien fait car il est valorisé par le travail qu'il accomplit : ce travail n'est nullement perçu comme une torture ou une manipulation servant des intérêts élitistes; ce travail est la valorisation absolue puisque l'individu exprime son sens dans la tâche qu'il accomplit directement au service du système. Dans chaque tâche se trouve directement impliquée la pérennité du système. Jamais aucun travailleur ne consentirait à se faire exploiter. Il faut pour qu'il travaille l'idée qu'en servant le système il sert ses intérêts. Dès lors, le travailleur formaté n'a aucun intérêt à remettre en question le système pour lequel il travaille et qu'il a l'impression valorisante de servir de manière directe et concrète. Au contraire, le travailleur aurait l'impression de trahir en contestant, ne serait-ce que parce que la propagande lui enseigne que le système est le seul système (un peu comme Leibniz enseigne que le seul réel ne saurait être autre que le bon réel). Pour le travailleurs formaté du système, il est impossible de remettre en question le système, même si le système ment, même si le système le défavorise, tant qu'on le persuade que le système est le seul système. Mieux vaut le système que le néant. Le travailleur formaté travaille pour le bien de l'humanité, pour le bien de ses proches et pour son bien. D'ailleurs, le travailleur formaté est persuadé que le bonheur que lui enseigne le système pour lequel il travaille lui dispense le modèle idéal. Soit : travailler pour le système et profiter de se loisirs en famille (travailler à la reproduction de l'espèce et du système). Comment remettre en question le modèle qui vous garantit la liberté et vous valorise en répétant qu'il est le seul système et que vous travaillez directement à sa pérennisation? L'opposé du formatage est la trahison. Il est à remarquer que l'esprit critique penche inévitablement du côté de la trahison. Autant dire que la contestation, voire le renversement du système n'est pas envisageable pour le travailleurs, même quand il se rend compte que le travail qu'on lui propose est de plus en plus contraignant et de moins en moins gratifiant et qu'on ajoute à ces tristes nouvelles le spectre apocalyptique d'un modèle non viable et menaçant les intérêts de l'humanité. Cette deuxième raison pourrait pousser le travailleur formaté à se rebeller, mais le problème est de taille : le système est tellement puissant qu'il a réussi l'exploit de laisser entendre qu'il était unique. Le travailleur formaté a beau se rendre compte qu'on l'exploite, qu'on lui ment et qu'on lui vend un rêve frelaté et qui le conduit en fait à la ruine, il est au désespoir de devoir accepter l'atroce vérité (à ses yeux) : le système menteur est aussi le seul système.
lundi 14 janvier 2008
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