lundi 2 mai 2011

La règle de Troie

Pendant que les peuples libyen et syrien se trouvent victimes de la politique du chaos sur leur territoire, où l'on tue les civils et détruit les infrastructures sous prétexte de démocratie et de rebelles fantoches, coup d'oeil sur le mariage prestigieux de William et Kate de Windsor, duc et duchesse de Cambridge (accessoirement amis intimes d'un des fils Kadhafi, vous savez le philosophe qui avait écrit une thèse à la boîte à diplômes de l'Empire britannique la plus prestigieuse et guindée, la LSE, et dont on s'est rendu compte depuis lors que des membres éminents de l'Empire britannique l'avait plutôt écrite pour lui).

Le mariage du prince William et de sa belle roturière Kate avait tout pour évoquer la joie et le faste de la dynastie royale britannique des Windsor. Pensez : un mariage suivi par (potentiellement) deux milliards de personnes de par le monde et donnant lieu à une débauche impressionnante de moyens techniques et humains divers. Un parterre impressionnant de célébrités, de têtes couronnées et d'hommes politiques venus du monde entier. Certains pressentent le prince William pour devenir l'héritier de la reine Elisabeth II, sautant la génération pour le moins contestée du prince Charles.
Peu importe les rumeurs, qui tendent à légitimer les potins les plus grossiers et les moins intéressants, comme si le centre de la question tournait autour de ce mariage somme toute anodin et écoeurant. Les mariages princiers des autres dynasties européennes (ou du monde) ne donnent pas lieu à une telle débauche médiatique. Des collectifs se sont élevés en Grande-Bretagne pour protester contre cette gabegie de moyens sophistiqués et coûteux, alors que la Grande-Bretagne vit la période la plus sombre de son histoire politique et économique, avec des coupes sombres inégalées dans les services publics et des déficits abyssaux. C'est oublier que la Grande-Bretagne n'est pas une république démocratique, mais une monarchie parlementaire, et que cette monarchie représente bien plus que l'unité des peuples britanniques.
Elle est le symbole de l'Empire britannique, dont l'histoire nous enseigne qu'il fut jusque récemment l'Empire le plus puissant du monde - et qu'il aurait été démantelé politiquement au début des années 60. Même fable qu'avec l'Empire français, dont le néologisme Françafriqueservit à désigner la mutation de l'Empire politique en conglomérats de forces industrielles, économiques et financières. L'Empire britannique a poursuivi son existence en passant du statut officiel et politique à une identité de domination déniée et non identifiée, oscillant entre l'organisation désintéressée du Commonwealth et les places financières du monde. La City de Londres, les paradis fiscaux et les groupes industriels continuent à former cet Empire sous une forme certes cachée et donc affaiblie.
D'où la médiatisation invraisemblable de ce mariage royal, qui montre à quel point les divers analystes en stratégie mondiale se trompent du tout au tout quand ils dénoncent l'impérialisme américain qui serait dirigé depuis la place financière de Wall Street. Comme l'ont rappelé de nombreux blogeurs et autres analystes du Net, la domination financière mondiale effective et vérifiable s'établit à partir de la City de Londres, non de Wall Street. On tient la raison profonde pour laquelle le mariage princier somme toute anodin de William et de sa belle bourgeoise s'est transformé en un rendez-vous planétaire guindé, fascination des téléspectateurs et rêve des gogos planétarisés.
Les mariages de la dynastie royale la plus influente et fameuse au monde, dont le nom anglais de Windsor est récent (1917), et qui est issue de maisons aristocratiques allemandes et typiques de l'époque d'oligarchie ayant donné lieu au traité de Westphalie (1643), ne sont pas des célébrations un brin archaïques, pour magnifier la grandeur incomparable et mégalomane d'une dynastie royale représentant (après tout) un pays européen sur le net déclin, après avoir incarné le Premier Empire moderne. Si tel était le cas, si les Windsor ne représentait que les peuples britanniques, ce genre de célébration désuète et stéréotypée ne donnerait pas lieu à une telle médiatisation par-delà les frontières britanniques. Si l'on parle autant de ce mariage, c'est qu'il n'est pas britanno-britannique, mais qu'il concerne le monde entier.
C'est parce que les Windsor représentent d'un point de vue symbolique et médiatique l'Empire financier britannique centré autour de la City de Londres que la médiatisation est mondiale. Avec raison, puisque c'est un Empire mondial, qui déploie son idéologie viciée du mondialisme et qui réclame par le truchement de ses représentants nationaux l'établissement urgent d'un gouvernement mondial pour contrer la crise systémique la plus grave de l'histoire connue (du fait de la mondialisation effective, une première historique), dont on nous annonce régulièrement la fin, alors qu'elle ne peut se clore qu'avec la faillite de ces intérêts financiers impérialistes et désaxés.
Ce genre de communion médiatico-maritale n'a pour intérêt principal que d'influencer les populations mondiales de plus en plus opprimées en faveur de la mise en place d'un système d'oligarchie mondiale avec un gouvernement mondial et beaucoup de pauvreté mondiale. Plus de classes moyennes, plus d'Etats-nations, mais des fédérations qui seraient gouvernées par des intérêts financiers supra-nationaux et prévaricateurs. En échange de l'établissement de ce système politique monstrueux, de facture oligarchique, on vend du rêve - et c'est là qu'interviennent les Windsor, leurs célébrations répugnantes et leur réputation consternante.
Certaines voix s'élèvent contre l'organisation de pareille cérémonie avec pareille médiatisation, tout à fait déplacée à pareille époque, alors que la Grande-Bretagne crève de faim et s'approche de sa fin en tant qu'Etat-nation - si son peuple cautionne de manière plus lâche que consciente cette voie sinistre et cynique impulsée par les sbires de la City et de l'oligarchie britannique. L'ensemble des peuples du monde souffrent de cette crise oligarchique, où l'oligarchie accroît son pouvoir en détruisant les intérêts républicains et en multipliant d'autant plus sa domination destructrice que la destruction occasionnée s'en trouve accrue. Le faste autour des Windsor et de leurs petites affaires mesquines cautionne le programme d'oligarchisation du monde.
Dans cette mentalité, il est admissible d'organiser de pareilles cérémonies grandiloquentes et déconnectées des préoccupations réelles alors que la crise sévit, en Grande-Bretagne, comme dans le monde. Il s'agit non pas de cautionner la domination seule des Windsor, mais de faire des Windsor les représentants de cette domination mondiale de nature oligarchique. L'Empire britannique a tout intérêt à actionner l'intégralité de ses relais médiatiques et financiers pour faire en sorte qu'un mariage princier, somme toute banale, de la lignée des Windsor devienne la célébration prestigieuse et reconnue de l'Empire britannique.
Il est intéressant que l'organisation pour le moins contestable de ce mariage donne lieu à des controverses et des polémiques qui ne s'arrêtent pas à des questions purement centrées autour des Windsor. On évoque désormais le pouvoir affairiste et financier que représentent les Windsor, cette City de Londres qui à y bien regarder se révèle plus influente et puissante que Wall Street - et du péril qui guette le monde. On va bientôt parler explicitement de l'Empire britannique, et pas seulement chez les larouchistes qui à ma connaissance sont les seuls à l'heure actuelle à documenter de manière précise et irréfutable l'existence cachée de cet Empire financier et prévaricateur.
Signe que le pouvoir de l'Empire britannique financier s'effondre avec cette crise systémique actuelle, car le principal garant de la puissance de domination de cet Empire financier, c'était le silence assourdissant qui l'entourait. Le propre de la stratégie de l'Empire britannique financier, c'était qu'on ne le reconnaissance pas. Comme si en se commuant d'Empire politique en Empire financier, l'Empire britannique savait qu'il ne pouvait plus affronter la lumière et le caractère officiel de son identité.
Du coup, il se réfugie dans les célébrations typiquement oligarchiques des têtes couronnées, en promouvant la dynastie des Windsor. Les autres dynasties européennes sont affilées à a dynastie des Windsor, mais également inféodées. On insiste bine entendu sur le caractère démocratique de ces monarchies parlementaires, sans rappeler un point particulièrement important de ces types de démocraties royales : elles favorisent l'oligarchie et parasitent le régime républicain que les démocraties libérales européennes sont censées garantir et promouvoir. Les résurgences monarchiques en terre démocratique jouent le rôle de cheval de Troie pour imposer le règne oligarchique sous des atours de démocratie.

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