lundi 6 juin 2011

Alternatives nouvelles

DSK a-t-il violé sa femme de ménage passagère à New York? Sans rentrer dans des faits d'accusation reconnus et graves, sur ce point précis, nous n'en savons rien (d'un point de vue policier). Par contre, nous savons que DSK le politicien médiatique est coutumier de pratiques sexuelles violentes, aux portes du viol, pratiques toujours couvertes par l'entregent du personnage et la peur de la puissance qu'inspire le pouvoir. Par ailleurs, fait plus intéressant, l'attitude politique de DSK est particulièrement destructrice, notamment depuis qu'il se tient à la tête du FMI. Déjà ce que nous pouvons savoir avec certitude est plus intéressant que ce nous savons de manière hypothétique et incertaine.
Nous savons que DSK est un ultralibéral qui pratique des politiques oligarchiques et antisocialistes perverses, puisqu'il se présente comme socialiste. En tant que directeur du FMI, notre brillant politicien a oeuvré pour détruire les peuples d'Europe en faillite comme le FMI avait l'habitude d'administrer un traitement de choc en général irrémédiable aux peuples dits du tiers-monde, par exemple en Afrique ou en Amérique latine. Bien plus qu'un violeur hypothétique (à ce stade de l'enquête déshonorante qui le ruine), DSK est un destructeur en matière politique et collective, qui travaille pour des oligarchies et contre l'intérêt général. Bel exemple de socialisme et bel exemple de perversité publique.
Que l'on comprenne bien ce qui se produit : même si le tribunal américain jugera DSK à partir due faits strictement privés et graves, l'accusation de viol, en réalité le débat portera sur la légitimité de l'oligarchie. Dans l'optique de l'oligarchie, la culpabilité de DSK ne se pose pas. DSK est un puissant haut fonctionnaire, populaire au point de prétendre au poste de Président de la République d'une grande puissance mondiale; en comparaison, la voix d'une femme de ménage qui plus est Africaine et anonyme ne compte pas.
C'est une question politique qui s'amorce et qui ne fait que commencer (qui ne se finira certainement pas avec le procès, quel que soit son verdict). On se demande ainsi s'il y a eu complot contre DSK ou s'il s'agit d'une simple affaire juridique privée. Comme si déjà l'inculpation pour viol aggravé du directeur du FMI pouvait ressortir de la catégorie de la simple affaire privée. Ensuite, le soupçon de viol ne peut se révéler pertinent, car ce n'est pas un complot qui est ici ourdi, c'est la critique virulente portée contre l'oligarchie.
On mesure l'emprise que l'oligarchie a acquise dans les mentalités, elle qui non seulement fascine les opprimés du fait qu'elle incarne la puissance fantasmée; mais en outre qui se trouve soutenue par les dominants d'Occident à partir du moment où elle se montre sous les atours hypocrites du progressisme impossible (la domination pour tous). Le procès de l'oligarchie pose le problème qui embarrasse tant les consciences. On se rend compte de manière croissante et quasiment irrépressible que le système oligarchique n'est pas tenable, qu'il mène à la ruine et qu'il est soutenu par une théorie nihiliste dont le programme est contenu dans l'énoncé.
Mais si l'on peine tant à proposer des alternatives à l'oligarchie, des programmes républicains, c'est que l'horizon alternatif antioligarchique et républicain se trouve tout simplement bouché. La caducité républicaine s'explique par l'effondrement de la théorie transcendantaliste qui la soutenait et qui se manifestait en Occident par les dogmes chrétiens et par l'ontologie de tradition platonicienne. Plus de théorie, plus d'application politique (plus de transcendantalisme, plus de république). L'oligarchie s'impose par défaut? Dès le départ, en scrutant attentivement son programme et ses applications passées, on savait que l'oligarchie menait au désastre.
Mais il est difficile d'éviter le désastre quand on ne possède pas d'autres alternatives. La chute de DSK s'inscrit dans ce contexte où l'on souhaite ardemment la chute de l'oligarchie tout en se trouvant démuni d'alternatives sérieuses (le trotskisme ou l'anrachisme relèvent de ce genre d'escroqueries inapplicables et désastreuses). Du coup, on fait chuter le symbole de l'oligarchie mondialiste balbutiante sans être en mesure d'éradiquer le fléau général et de proposer des alternatives viables et saines. On ne sait pas trop si DSK va être acquitté ou pas. Questions dérisoires, car elles ne concernent en rien le caractère monstrueux de DSK l'homme public.
Si on se pose tant de questions au fond peu importantes, c'est qu'on se trouve perdu parce qu'on ne dispose plus de repères. Impossible de suivre des repères oligarchiques. Difficile de trouver des alternatives. La chute de DSK s'inscrit dans ce cadre tortueux, voire torturé, où l'on cherche des alternatives assez désespérément et où l'on espère qu'en faisant chuter un représentant de l'oligarchie, on parviendra à susciter l'avènement d'alternatives républicaines nouvelles. Ces alternatives ne peuvent émerger qu'avec des propositions théoriques nouvelles qui viennent prendre la place du transcendantalisme caduc tout en intégrant l'impéritie inchangée du nihilisme, malgré sa mouture moderne immanentiste.
Si les théories politiques républicaines soutenues par des fondements transcendantalistes avaient été viables, jamais nous n'aurions assisté à l'éclosion de personnages aussi violents et destructeurs qu'un DSK (et ses autres acolytes du milieu politico-affairiste gravitant autour de l'ultralibéralisme). L'émergence sur la scène publique de représentants oligarchiques progressistes traduit la dégénérescence de l'oligarchie elle-même, qui structurellement est vouée à pourrir de l'intérieur en décroissant radicalement.
Toute cette mascarade entourant le processus oligarchique d'autodestruction (plus que de destruction) serait bloquée depuis belle lurette si l'oligarchie invivable n'avait pas pour seul argument sa nécessité certes désespérante, mais irréfutable. Les oligarques progressistes claironnent autour d'un Attali en France : nous n'avons d'autre choix que l'ordre oligarchique ou le désordre oligarchique. Un DSK personnifiait l'ordre oligarchique, soit le gouvernement mondial, qui était déjà une proposition émanant des cercles impérialistes britanniques progressistes autour de Keynes.
Le fait que les accusations contre DSK piège DSK par sa vie privée alors que ce qu'on cherche à déstabiliser est l'action prédatrice politique du directeur du FMI, montre le flou qui entoure l'idée de public dans son sens spécifique. L'observateur ne parvient pas à identifier ce qui est public autrement que comme le prolongement de ce qui est privé d'un point de vue collectif. Le flou de la définition du public empêche d'incriminer DSK autrement que d'un point de vue privé.
Pourtant, l'incrimination privée, pour fondée qu'elle soit (s'il n'est pas certain que DSK ait violécette fois la femme de ménage, il est irréfutable que DSK manifeste une comportement sexuel violent et destructeur), indique que la conception du public est si peu spécifique, si privatisée au sens d'une extension du privé sur le public, que le seul moyen d'empêcher via leur représentant suprême les tenants du renflouement typiquement oligarchique contre les peuples revient à poursuivre DSK à propos de sa vie privée gravement désaxée.
C'est dire que par leurs poursuites les accusateurs indiquent qu'ils ne parviennent pas à poursuivre politiquement et publiquement DSK alors qu'il est patent que le fond de l'affaire est politique et public. Mais pour poursuivre de manière hiérarchisée DSK sur le volet prioritaire du politique, encore faudrait-il que la spécificité du public existe. La preuve qu'elle n'existe pas autrement que dans un prolongement/amalgame du privé, c'est que pour empêcher DSK de nuire politiquement, on s'attaque à son dérèglement sexuel (privé).
C'est ici que l'on portera une vraie critique contre les poursuites judiciaires engagées contre DSK. Les réticences que l'on sent poindre sont souvent mal formulées, voire malhonnêtes, mais elles expriment de manière confuse le sentiment selon lequel les poursuites formulées contre DSK sont inadéquates, je veux dire qu'elles ne correspondent pas au caractère formel de la faute. La faute est publique et on la réduit au privé. Cette confusion et cette inadéquation indiquent que l'acte d'accusation demeure informulable parce que la spécificité du public par rapport au privé n'existe pas. Il faut en passer par l'accusation privée pour présenter un impact indirect de type public - et c'est la raison (principale) pour laquelle autant de réticences sont formulées dans cette affaire DSK pourtant indéfendable, dans laquelle notre oligarque désaxé et pathétique ne mérite en rien d'être défendu autrement que sur le modèle d'O.J. Simpson.

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