samedi 26 juillet 2008

Siné die : de qui BHL est-il le bon ?

Un homme dont "l'ego détruit l’intelligence."
Marianne Pearl.

Il y aurait beaucoup à dire sur les nouveaux antiantisémites. Je ne réclame nullement l’exhaustivité du propos sur un sujet en mutation. Si ce n’est pas parce qu’on est Juif qu’on est mauvais, ce n’est pas parce qu’on est Juif qu’on est bon. Par voie de conséquence, l'on peut être Juif et se montrer extrémiste, partisan, de mauvaise foi, hypocrite, au service d’intérêts contraires à ceux qu’on prétend défendre, destructeur et prédateur des causes et des arguments les plus nobles.

Dans son édition du mardi 2 juillet 2008, Le Monde donne la parole à son intellectuel de référence, j’ai nommé l’ami intime de Massoud, le combattant de la liberté toujours bronzé et en chemise : le millionnaire et feulosophe BHL. À chaque fois que BHL s’engage dans un combat, c’est le signe que ce combat est faussé.

L’hommage à Badiou que rend BHL dans son titre parodique est celui d’un faiseur de slogans qui reprend les vieux tics de la publicité avec un manque d’inventivité flagrant. BHL utilise des grosses ficelles éculées. Dès le titre, on sait qu’il en veut à l’extrême-gauche accusée parfois de collusions antisémites et de radicalisme anti-système coupable. On connaît la rengaine. L’hommage de BHL à Badiou équivaut à celui du vice à la vertu : soit d’un médiocre en direction d’un mineur, qu’il ne peut au fond qu’admirer, car mieux vaut un radical systématique à un propagandiste caricatural.

BHL s’y est toujours entendu pour défendre la veuve et l’orphelin à condition que les règles du combat soient claires : se tenir toujours du côté du plus fort. Avec BHL, les valeurs sont assez simples. Ce n’est pas le kalokagatos antique, c’est plutôt l’équivalence réductrice fort = bon. Du coup, ce sont les valeurs atlantistes et occidentalistes que BHL défend, avec une prestance et un empressement qui ne cessent de stupéfier son monde.

Il serait temps de démasquer les positions très prévisibles de BHL. Chacun sait au fond que ce philosophe autoproclamé nouveau est tout au plus un trublion, qui se contente de surfer sur la vague de ses relations médiatiques. Chacun sait que les ouvrages de BHL sont ampoulés, grandiloquents, et surtout que plus personne ne les lit quelques mois après leur parution. La revanche du réel sur les prétentions à fabriquer l’Hyperréel envers et contre tous ? Les atlantistes disposent peut-être d’argent et de moyens techniques inégalés, mais ils n’ont ni pouvoir ni emprise sur le temps.

On avance souvent que BHL manque de consistance. Je crois surtout que BHL est un propagandiste, qui s’est engagé en faveur des intérêts atlantistes et dont les perspectives deviennent plus claires si on les considère à l’aune de leur vraie direction. Au lieu de voir en BHL l’héritier de Sartre, je propose plutôt comme vraie filiation la figure d’Aron. Sait-on qu’Aron travaillait pour l’atlantisme ? Dans ce cas, d’un point de vue qualitatif, BHL serait l’avatar dégénéré d’Aron.

La tribune que BHL signe contre Siné est l’éclatante démonstration de ses vrais engagements. Non en faveur des opprimés, mais au nom d’une ligne néo-conservatrice. Siné se serait fourvoyé dans l’antisémitisme en chargeant Jean Sarkozy, accusé de judéophilie outrancière, voire de judéomanie foncière. Au juste, j’ignore si les propos de Siné sont outrancièrement antisémites ou seulement satiriques, ou si Jean S. mérite ces sarcasmes virulents, mais là n’est pas le débat.

Reprocher l’outrance à un caricaturiste est comique, surtout venant de Val et BHL confondus (dans tous les sens du terme). BHL et la meute des antiantisémites n’auraient pas levé le petit doigt si les propos avaient été dirigés contre un Arabe. C’est le deux poids deux mesures bien connu. La mauvaise foi en action, dans les termes que dénonçait justement Sartre.

Entendre dans la bouche de BHL qu’il combat contre l’Infâme est profondément désopilant. Il serait plutôt au service de l’Infâme, qui se retourne pour mieux se retrouver. Une fois que l’on a compris que BHL est un propagandiste atlantiste, on cerne les méandres les plus inaccessibles de son parcours.

Le combat de BHL s’éclaire (enfin) quand il s’associe au directeur de Charlie Hebdo, le libertaro-ultralibéral Val, dont le prodige consiste à avoir transformé un organe de presse libertaire et anarchiste en machine de guerre au service des valeurs néo-conservatrices. Finalement, la presse roule pour le système et ce n’est pas une surprise si les titres perdent leurs lecteurs à force de suivre l’odeur de l’argent. Aux yeux de ces altruistes, le principal crime réside dans l’antisémitisme. Avec ces humoristes-moralistes, tout est permis – sauf l’antisémitisme.

Ces sbires de la pensée sont les vrais ennemis d’Israël, tant des institutions que du peuple. Il n’est pire ennemi que celui qui se prétend votre ami pour profiter de vos services. La rhétorique actuelle de la lutte contre l’antisémitisme s’appuie sur une tradition d’amalgame, dans laquelle l’antisémitisme n’est plus seulement la lutte contre une forme de racisme.

On a tendance à oublier que le terme antisémitisme est impropre. S’il est certain que le racisme contre les Juifs ressortit d’une forme particulière de racisme, il est tout aussi obvie que le sémitisme ne désigne pas seulement les Juifs. BHL profite de cette confusion sémantique pour tisser sa toile amalgamante et mieux jouer sur les mots.

Si l’on valide par usage le sens courant et pourtant réducteur d’antisémitisme, adresser des reproches à un Juif parce qu’il est Juif est antisémite. Mais adresser des compliments à un Juif parce qu’il est Juif est tout autant antisémite. Pis, l’antisémitisme a glissé de sens, tant et si bien que des experts néo-conservateurs ont donné ses lettres de noblesse explicites au « nouvel antisémitisme ». Je pense à Daniel Pipes. Ce sympathique trublion néo-humaniste n’organise pas des kermesses caritatives pour les gentils enfants de classes primaires en mal d’affection. Il a théorisé rien de moins que le refus de la critique à l’encontre de tout Israélien et de tout sioniste.

Pipes peut se permettre ce genre de création sémantique puisqu’il s’autorise de la confusion originelle de l’antisémitisme. Avec un fondement sémantique clair, jamais Pipes n’aurait pu fabriquer une machine idéologique aussi tarabiscotée. Le nouvel antisémitisme redouble la confusion initiale contenue dans le terme d’antisémitisme.

Grâce à Pipes et à ses semblables, critiquer un Juif devient un acte périlleux, car le nouvel antisémitisme définit toute critique à l’égard du sionisme ou d’Israël comme marque d’antisémitisme. On le voit, il ne s’agit plus seulement de donner des limites saines à la critique. Il s’agit d’empêcher tout bonnement la critique – quand elle vous dérange. Le terme d’antisémitisme est utilisé à cette fin nauséabonde un peu comme la rhétorique de l’antiracisme permettait de rendre raciste toute critique contre un Arabe ou un Noir, quel que soit le contenu de cette critique.

La bêtise de l’antiracisme est démasquée désormais depuis qu’on a sombré dans les excès inverses de la guerre contre le terrorisme, du péril islamiste et compagnie. Mais la compréhension des mécanismes de la bêtise antiantisémite reste à venir. Disons en un mot qu’il s’agit de définir une ligne d’interdits suffisamment forte pour que la critique devienne malaisée et inoffensive. Si l’on respecte les interdits posés par le nouvel antisémitisme, il est impossible d’émettre une critique pertinente contre des Juifs, puisque les vraies critiques en la matière portent sur les (ex) actions de certains sionistes et d’Israël (en tant qu’Etat et institutions).

On notera que BHL était étroitement impliqué dans l’antiracisme des années 80 et que c’est sans surprise que l’on constate son recyclage dans le nouvel antisémitisme. BHL n’a rien inventé : il se contente de reprendre une rhétorique dûment enregistrée et d’y ajouter les atours de la générosité.

Il serait temps que BHL passe pour ce qu'il est : un manipulateur. L’histoire de ses rapports avec Massoud ou avec la veuve du journaliste Pearl donne la mesure de la personnalité de BHL. Que l’on se souvienne que les mots ont un pouvoir. Les idées de BHL sont associées à la guerre contre le terrorisme.

BHL prétend agir au nom du Progrès. Le Progrès – atlante ? Le Progrès version BHL est un postulat aussi alambiqué que spécieux. La croyance dans le Progrès est choquante, comme si le monde allait linéairement vers plus de Raison, comme si le Progrès se révélait aussi indémontrable qu’irréfutable. Il faut vraiment être un grand bourgeois mondialiste et insouciant de ses millions pour prôner ce progrès – sans se rendre compte du sens du vent et de la réalité que subissent la plupart des gens de par le monde, notamment les Irakiens, notamment les Afghans, notamment les Palestiniens.

Il y a comme une collusion tribaliste à se draper dans les oripeaux du nouvel antisémitisme quand on est impliqué dans les intérêts que l’on défend. Le manque de distance de BHL est flagrant. Malgré ses tenues de mode froufrileuses et sa coupe capitonnée, BHL ne fait jamais dans la dentelle.

Pourquoi les atlantistes défendent-ils aussi mordicus les intérêts pro-israéliens ? Cette vraie question, à laquelle je ne répondrai pas ici, permet de poser la question de l’alliance théologique entre les rejetés, grosso modo les protestants et les Juifs. La Nouvelle Alliance atlantiste réunit Juifs et protestants non en tant que tels, mais ceux parmi eux qui cautionnent au moins tacitement le Nouvel Ordre Mondial et les valeurs immanentistes.

Le nouvel antisémitisme ressortit clairement de ces valeurs. Ainsi bannit-il l’esprit critique au nom de la Shoah, alors que la Shoah encourage l’esprit critique. Les partisans du nouvel antisémitisme sont les vrais ennemis de la Shoah. BHL en fait partie sur un mode faussement tolérant des plus pernicieux.

Le refus de la critique signifie la mort de la pensée et l’avènement du totalitarisme. C’est ce que personnifie BHL. BHL se réclame des Lumières de Voltaire. Rien de surprenant à cette filiation, puisque Voltaire est l’ancêtre tutélaire des immanentistes de l’Age d’Or. Simplement, Voltaire se battait au moins contre le pouvoir, quand BHL est de son côté. Ce changement notable de perspective suffit à discréditer le courage militant et l’engagement intellectuel de BHL.

Ce n’est pas tout : dans la logique de BHL, Voltaire était antisémite ! Finalement, si Siné est un authentique disciple de Voltaire, les insultes publiques dont on le couvre dans les rangs du nouvel antisémitisme sont presque un compliment : car mieux vaut être du côté de Voltaire que de BHL. En toute modestie BHL est supérieur à Voltaire, car s’il n’est pas antisémite, BHL est du côté du Bien.

BHL relève des courants tardifs de l’immanentisme. Ce qui caractérise BHL, c’est la tartufferie. Il faut être redoutablement hypocrite pour se prétendre progressiste alors que l’on roule pour des intérêts ultralibéraux. L’hypocrisie immanentiste se redouble chez BHL d’une surenchère d’hypocrisie à l’intérieur des frontières de l’immanentisme.

De qui se moque-t-on ? Qui est BHL pour donner la leçon ? Un demi-dieu ? Quel demi-dieu qu’un pauvre diable ! Dans une époque qui manque totalement de sérieux et d’humour, BHL est cet entarté qui ne supporte pas la contestation. Ce n’est pas du côté des néoconservateurs qu’il possède la moindre chance de trouver l’honnêteté.

En théorie, la vertu est plus facile à dispenser du côté du plus fort. Le discours moral passe mieux accompagné de la force. On retombe sur ses pieds : la connaissance du parcours de BHL incite à l’étonnement. Quoi ? Ce délivreur de brevets de morale supérieure se révèle un manipulateur de haut vol, qui n’a connu que de très loin Massoud ? Est-ce si étonnant que notre Voltaire new version se permette avec le réel les mêmes largesses que dans sa prose en pose ? Quant à sa pensée, serait-elle – en pause ?

Comme c’était prévisible, le moralisateur à tous crins est un immoraliste de cran, qui moralise d’autant plus que la morale est la plus sûre arme pour légitimer des intérêts particuliers. S’arroger le pouvoir d’énoncer ce qu’il ne faut pas faire, c’est encore le meilleur moyen d’assimiler le Bien à ses intérêts. Où l’on voit que le discours des crapules s’autorise toujours de la morale, ainsi que l’enseignent le visionnage d’un film mafieux, mais aussi la lecture du meilleur Rosset.

D’ailleurs, qu'on vérifie par les faits de la prose (ou l’effet de la prose), puisque BHL assure lui-même que ce qui compte vraiment, ce sont les mots. Le soubassement conceptuel sur lequel s’appuie BHL est une caricature. Dès le départ, BHL s’est distingué par son slogan insidieux : (presque) tous antisémites. C’en serait presque un honneur si l’antisémitisme véritable n’était pas un fait aussi hideux que mesurable et si des innocents n’avaient pas payé en tant que boucs émissaires le prix de la folie et de la haine. On peut n’être pas farouchement antichrétien et ne pas capituler devant les arguties accusant le peuple déicide. Mais on peut aussi ne pas capituler devant les arguties des antiantisémites professionnels.

C’est ainsi que l’on s’étonnera de la faiblesse des idées que propage BHL. Notre fumistosophe en chef n’est pas le disciple de Voltaire. BHL est un philosophe de cour tel que Molière nous en a offert la réplique pour notre plus grand bonheur. BHL condamne au nom de l’antisémitisme et du racisme. Mais ce slogan court cache mal l’amalgame qu’opère BHL entre l'antisémitisme reposant sur la race et l’antisémitisme reposant sur la religion.

Qu’est-ce que l’antisémitisme ? BHL serait incapable de produire une définition claire de ce qu’il appelle antisémitisme. Normal : l’antisémitisme repose sur une confusion sémantique qui autorise la démarche d’un BHL. Cette déficience est fâcheuse quand on sait que l’antisémitisme est le centre névralgique et bancal de l’impensée selon BHL.

Mais la sémantique n’explique pas tout : BHL se montre tout aussi incapable de produire une définition cohérente du racisme. En fait, l’immanentisme dégénéré produit une mutation des concepts et du sens, si bien que le racisme devient un anathème commode, permettant de discréditer et d’exclure n’importe quel contestataire.

Le procédé n’est guère nouveau : celui qui dérange est du côté du Mal. En l’occurrence, apparemment, le Mal suprême serait l’antisémitisme. Voltaire, Le Pen, Dieudonné, Siné… Qui n’est pas antisémite parmi les célébrités dissidentes dans la logique folle et le parcours people d’un BHL ? Un peu de cohérence derrière les anathèmes religieux de l’immanentisme ! L’hypocrisie de BHL repose sur un pseudo-appareillage conceptuel comportant des contradictions flagrantes.

J’en veux pour preuve la distinction hallucinatoire entre religion et peuple. BHL est obligé d’établir cette différence pour légitimer les caricatures sur l’Islam autorisées par Val et mille fois plus provocantes que la prose de Siné. À cette nouvelle preuve de mauvaise foi, BHL en rajoute une couche, parce qu’un immanentiste n’aime pas les religions. La religion est l’ennemi de la Raison : BHL s’en tient à cette ligne de conduite.

On voit mal pourquoi ce qui est positif dans la critique religieuse serait subitement négatif dans la critique contre les peuples. Ce qui se veut clair est surtout extrêmement partial. Si la religion est l’ennemi suprême, la Raison s’appuie sur la notion de peuple pour restaurer la faction comme idéal oligarchique et individualiste. Le peuple est le cheval de Troie grâce auquel l’immanentisme en fin de course impose son idéal factieux.

Refuser la critique d’un peuple est aussi absurde que refuser la critique d’une religion. Il est tout à fait sain de critiquer un peuple. Je dirais même : salutaire. Et j’ajouterai que le seul moyen de sombrer dans le racisme est d’établir une distinction qualitative entre des groupes humains, comme si l’appartenance communautaire relevait d’une déchéance par rapport à l’humanité.

Dès lors, le racisme consiste à conforter l’idée que le peuple est le fondement de l’identité et que les différences entre les peuples sont essentialistes. Ces propositions ne tiennent pas la route : c’est la logique de l’immanentiste qui pousse les factions à promouvoir les peuples pour mieux les pirater subrepticement. C’est la logique de l’immanentisme de promouvoir un substrat hyperrationnel (le peuple) en lieu et place du religieux stipendié.

Ce n’est pas tout : le pire est que la distinction branlante entre religion et peuple est d’autant plus confuse qu’elle s’applique à la notion de judéité. Qu’est-ce qu’un Juif ? Le membre d’une religion ou d’un peuple ? Pas facile de s’y retrouver, d’autant que la confusion n’est pas seulement historique : elle est aussi sémantique. Sans entrer dans les spéculations polémiques, la confusion est à son maximum dès lors que l’on prétend faire des Juifs un peuple indépendamment de la religion.

De toute façon, l’esprit un tant soit peu lucide sait bien que la distinction entre peuple et religion est arbitraire, puisque le fondement de tout peuple est religieux. Distinguer ainsi entre peuple et religion, c’est se condamner à ne pas voir que sans religion, il n’est aucun peuple. La nation moderne est un dérivé immanentiste du peuple atavique, une sorte de peuple hyperrationnel si l’on veut, dont on mesure la dégénérescence postmoderne à l’aune du Nouvel Ordre Mondial, des fédérations synarchiques et du régionalisme rampant.

Il est éclatant que le peuple juif oscille de manière ambiguë entre peuple et religion, parce que tout peuple descend d’une religion, mais aussi parce que les Juifs sont originellement l’expression de cette ambiguïté qui donnera lieu au dessein universaliste du monothéisme. Les Juifs furent longtemps apatrides et leur identité de Juifs, je n’ai pas dit d’Israéliens, tient plus à leur communauté religieuse qu’à leur statut de peuple, a fortiori de peuple au sens de nation. Même l’Etat d’Israël oscille entre la nation rationnelle de type occidental et le tribalisme. Ce fait historique et anthropologique, BHL ne peut l’ignorer.

C’est la raison pour laquelle il joue sur les ambiguïtés pour mieux instiller ses différences. Le lecteur éprouve les pires difficultés à cerner le travers qui cloche, parce que la culpabilité concernant les Juifs règne dans les rangs occidentaux depuis la Shoah ; mais aussi parce que le quidam éprouverait les pires difficultés à définir ce qu’est un Juif – un peuple, une nation, une religion… le religieux ?

Au fond, BHL peut ignorer les maux réels, parce que le sens n’est jamais chose certaine et que les valeurs sont toujours des approximations. Au-delà de certains compromis, il est certain que tout est incertain. L’incertitude croît à mesure que le sens est moins assuré. Le racisme est un comportement assez vague, dont l’interprétation repose le plus souvent sur les intentions. Cette constatation empirique suffit à expliquer qu’on puisse subvertir la définition du racisme et en profiter pour fourbir une arme de guerre idéologique contre la critique.

C’est ce que fait jusqu’à la nausée (non sartrienne) notre bon BHL avec l’antisémitisme.  Quelle est sa meilleure condamnation ? Sans hésitation, sa stature intellectuelle. Plus personne ne lira BHL dans cent ans. Mais la justice immanente voudrait que BHL dans l’immédiat connaisse le même discrédit que des journaux comme Le Monde, dans lequel il intervient avec complaisance et qui ont trahi la mission noble du journalisme pour se commuer en outils de propagande. Raison pour laquelle de moins en moins de lecteurs les lisent, car le peuple en a assez de la vanité et de la vacuité des contenus censurés.

Je n’entendais pas prendre la défense de Siné, dont je connais mal les positions, mais il est limpide comme l’eau d’une source non polluée qu’on peut ne pas être d’accord avec sa prose de satiriste caricatural sans verser dans le refus de la critique, la vraie, celle qui dérange. Se réclamer de Voltaire pour excommunier Siné est un acte profondément comique. BHL se présente comme un Voltaire dénué d’ironie et empreint de solennité vengeresse, soit un moraliste raseur. Les atlantistes voudraient que le monde soit simple et que le réel convienne à leurs attentes de grands bourgeois capitalistes. Ce n’est pas le cas et c’est tant mieux – pour l’homme, en tout cas.

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