«Le fascisme est absolument opposé aux doctrines du libéralisme, à la fois dans la sphère politique et dans la sphère économique.… L'État fasciste veut gouverner dans le domaine économique pas moins que dans les autres; cela fait que son action, ressentie à travers le pays de long en large par le moyen de ses institutions corporatives, sociales et éducatives, et de toutes les forces de la nation, politiques, économiques et spirituelles, organisées dans leurs associations respectives, circule au sein de l'État.»
Benito Mussolini, La Doctrine du fascisme, 1935.
Le fascisme réconcilie les tendances libérales dans la violence.
Traditionnellement, on a tendance à opposer le fascisme au libéralisme - et à tenir l'horizon dégagé. Les jeunes gauchistes paumés sont soulagés d'apprendre que le fascisme est aussi l'ennemi des idéologies collectivistes comme le socialisme et le communisme. Tous les bons, surtout les rebelles, sont contre les fascistes et acceptent pour ce fait de gloire universelle d'être réunis avec les libéraux de droite.
La vérité, c'est que le fascisme et le libéralisme appartiennent au même mouvement politique de réduction économique (histoire qu'on ne puisse remonter au statut politique), qui est l'impérialisme. Il faut tenir ces deux termes pour complémentaires. Quand l'impérialisme fonctionne, il est libéral. Quand il entre inévitablement en crise, il vire vers le fascisme. Reprenons la classification entre libéralisme progressiste et libéralisme pragmatique : le progressiste recoupe les idéologies collectivistes et généralistes comme le communisme ou le socialisme. Le pragmatique recoupe ce qu'on nomme généralement le libéralisme conservateur et qu'on appelle de plus en plus improprement la droite.
Il n'aura échappé à personne qu'en cette période de crise et d'indistinction, le libéralisme a envahi la gauche anciennement progressiste au point que les différences entre socialistes et conservateurs libéraux ne sautent pas aux yeux. Il est prévisible que l'impérialisme entre en crise parce que le mode de fonctionnement de l'impérialisme n'est pas pérenne. Un système fondé sur la domination appelle les crises et enseigne la gestion des catastrophes. Le libéralisme est un impérialisme travesti en doctrine de la liberté. C'est une liberté typiquement finie et impérialiste, théorisée par les écoles de la Compagnie des Indes anglaise.
Le libéralisme est le masque libre de l'impérialisme moderne. Vive l'impérialisme libre! La démocratie libre! La liberté libre? Dans cette acception, le progressisme libéral est incarné en premier lieu par Marx, qui n'est pas l'adversaire du libéralisme, mais qui est un libéral prétendant réaliser et achever le dessein libéral en dépassant le capitalisme par le communisme. On tend à réduire le libéralisme à son aspect pragmatique et conservateur, mais toutes les idéologies sont libérales, y compris l'anarchisme et le libertarisme.
Le fascisme se présente comme une troisième voie entre les propositions égalitaristes et pragmatiques du libéralisme. Le coup du fascisme qui serait l'ennemi irréductible du libéralisme est une galéjade. En réalité, il est compris dans le libéralisme - comme la forme idéologique prétendant incarner le visage autoritariste du libéralisme conservateur pragmatique. Il peut paraître étonnant d'inclure Marx dans le giron libéral, mais la meilleure formule pour définir la philosophie marxienne reviendrait à un provocant : "Tout le monde peut dominer".
On mesure à l'aune de cette formule quel type d'égalitarisme est l'égalitarisme marxien. Un égalitarisme impérialiste est un égalitarisme impossible, soit un nihilisme. Quand le fascisme s'oppose au libéralisme, c'est par rapport au concept de liberté - du libéralisme. Le fascisme juge que la liberté est un concept faux en terme d'idéologie et que la raison de l'impérialisme le conduit nécessairement à la force et à la violence. Le fascisme réconcilie les tendances libérales dans la violence.
Le désaccord entre le fascisme et le libéralisme historique ne repose pas sur l'impérialisme - mais sur la définition de l'impérialisme. Le fascisme réduit l'impérialisme à sa valeur la plus violente et immédiate, jugeant que cette forme arrive tôt ou tard - et que mieux vaut tôt que tard; quand le libéralisme juge que l'impérialisme est compatible avec une certaine liberté finie. Le libéralisme historique et le capitalisme prônent une extension de la liberté finie, et inégale avec l'universalisation des sociétés inégalitaires. L'égalitarisme en termes capitalistes est impensable. Le collectivisme estime au contraire que l'égalitarisme est possible.
Raison pour laquelle l'égalitarisme s'effondre en premier : l'idée d'un égalitarisme impérialiste est la plus impossible, ridicule et fragile. Quant à l'idée d'un impérialisme inégalitariste et pragmatique, elle est fausse, car l'impérialisme ne peut s'étendre à l'ensemble des peuples. Il ne peut que s'appliquer (de manière inégalitaire) sous sa forme de libéralisme pragmatique à environ un cinquième, soit sa forme actuelle. Au-delà, c'est impérialisme le plus sauvage qui prévaut.
De ce point de vue, le fascisme est une forme lucide d'impérialisme qui considère que les formes plus ou moins humanistes ou universalistes de libéralisme sont une perte de temps. Selon le fascisme, le seul libéralisme qui vaut est adossé à la force et à la violence. Raison pour laquelle les nationalistes ont si souvent raison (quoique sur l'ensemble ils aient tort) : ils s'adossent à une vision qui identifie de manière assez explicite l'impérialisme, à ceci près qu'ils tiennent l'impérialisme pour juste - quand la lutte contre l'impérialisme est le vrai cheval de bataille de l'homme qui croit en la personne humaine.
L'opposition virulente du fascisme au libéralisme, au communisme et au socialisme est conséquente : les fascistes sont des libéraux qui excluent toute autre forme d'idéologies de leur jargon au motif qu'ils incarnent la seule forme d'impérialisme conséquent (comme les matérialistes se revendiquant tous en fonction de leur chapelle du seul matérialisme conséquent). D'une certaine manière, on pourrait oser que les seuls impérialistes à visage découvert sont les fascistes - qui proclament : l'impérialisme est violence et domination des plus forts sur les moins forts. Des plus fous aussi.
Aux yeux du fascisme, les autres formes d'impérialisme sont des pommades et des potions pour rendre le breuvage moins amer. L'identité du libéralisme à l'impérialisme est juste si l'on distingue l'idéologie libérale découlant de l'impérialisme britannique (la Compagnie des Indes de type anglais) du libéralisme en tant qu'idéologie défendant la liberté. Cette deuxième définition est superficielle et constitue une perte de temps, voire un dérivatif. Attachons-nous à ce que le libéralisme représente vraiment d'un point de vue historique et idéologique.
L'idéologie commence avec les idéologues qui prônent une conception sensualiste de l'homme. Les idéologues sont d'ailleurs des philosophes qui commencent par avancer le matérialisme ontologique et l'empirisme à la manière d'un Locke, puis qui peu à peu considèrent que les anciennes questions métaphysiques sont une perte de temps et que seule la partie politique mérite attention et concentration. Cette réduction de la philosophie à la pensée politique est incarnée par ces penseurs qui se prévalent de la pensée politique - et je pense au plus grand d'entre eux, le terrible et conséquent Hobbes.
Aujourd'hui que le libéralisme s'est réduit en terminaison ultra-libérale, la suppression de la politique passe par l'affirmation inconditionnelle et exclusive de la pensée économique. La parenté de l'ultra-libéralisme et du fascisme est un point primordial, puisque les ultra-libéraux s'étranglent quand on leur accole l'étiquette pourtant lucide de fasciste au motif qu'ils sont contre le nationalisme. C'est oublier que le vrai visage du fascisme tient dans le corporatisme économique et que de ce point de vue, les fascistes sont des ultra-libéraux, soit des utilitaristes et des pragmatiques. La petite différence entre le fascisme et l'ultra-libéralisme réside sans doute dans la différence quantitative de degré.
L'ultra-libéralisme précède de peu le fascisme effectif, en ce que l'ultra-libéralisme invoque encore de manière ambivalente la liberté (jumelée avec l'utilité), quand le fascisme n'entend plus comme fin que l'utilitarisme - le plus expéditif et violent. Dans la chaîne du libéralisme, le fascisme est au bout de la gradation, quand l'ultra-libéralisme incarne le stade précédent. Raison pour laquelle tant de théoriciens de l'ultra-libéralisme sont des modèles des fascistes contemporains. Je pense à ce Hayek, qui finit par quasiment répudier le libéralisme au motif qu'il ne s'accorde pas avec la destruction de toute forme d'État et qu'il ne concorde pas avec le modèle individualiste pur, idéaliste et fasciste (sous le visage de l'anarchisme ultra-libéral).
Le libéralisme est une forme particulière d'impérialisme en tant qu'il est la forme moderne de impérialisme. Le libéralisme est l'idéologie qui prospère partout où l'impérialisme occidental se développe. D'ordinaire l'impérialisme s'ancre dans une conception finie du fini, comme c'est le cas chez Aristote l'oligarque élève de Platon. Aristote considère que l'univers est fini et mécaniquement déterminé. Ce sera aussi pour partie le cas d'un Descartes, qui est contraint d'invoquer son deux ex machina pour sauvegarder la liberté religieuse.
Le libéralisme ajoute à l'impérialisme traditionnel ou classique une originalité qui est sa marque de fabrique moderne (en quoi d'un point de vue ontologique l'immanentisme est la forme moderne du nihilisme atavique) : c'est un impérialisme économique qui dégénère en fondamentalisme idéologique d'ordre financier, soit un impérialisme encore plus réducteur et extrémiste que les formes classiques d'impérialisme. Cet impérialisme se fonde sur le substrat immanentiste : le nihilisme ne reconnaît d'infini que fini, quand l'immanentisme ne reconnaît de fini qu'humain (spécifique au monde de l'homme).
A partir de cette hyperréduction de l'immanentisme, l'impérialisme immanentiste est un impérialisme qui est économique, soit qui considère que la domination de l'homme dominant passe par la réduction du réel aux appétits humains primordiaux et exclusifs. Tel est le libéralisme, une idéologie qui descend de la doctrine des idéologues historiques, des sensualistes piqués (tels les chiens de Pavlov) de scientisme étriqué et de naïveté matérialiste affligeante. Il ne faut pas attendre du libéralisme une quelconque profondeur, mais comprendre que la définition classique de la liberté est antithétique avec la définition de la liberté fournie dès ses origines par le libéralisme et accentuée encore par l'évolution de plus en plus extrémiste du libéralisme, au point qu'aujourd'hui certains libéraux se réclament du libéralisme historique se dissocient de l'ultra-libéralisme, appelé non sans ironie néo-libéralisme. Tout ce qui est nouveau est extrémiste dans l'immanentisme terminal.
Tout ce qui est nouveau n'a pas le - niveau. Il suffira d'invoquer BHL pour les Nouveaux philosophes ou Greenspan pour les spéculateurs mondialistes. Le libéralisme est l'ensemble des doctrine idéologiques qui sortent de l'école de l'impérialisme britannique, schématiquement d'Adam Smith. Pour comprendre adéquatement le visage du libéralisme, il ne faut pas s'en tenir au père fondateur, mais il faut étendre la lecture à Bentham, Malthus et Hobbes. Bentham est un utilitariste qui réduit l'homme aux plus bas instincts négatifs, conformément à la fable de Mandeville. Il est l'ontologue simpliste du libéralisme. Malthus entrevoit que la main invisible n'équilibrera pas toujours de manière providentielle et irrationnelle le marché, soit le réel réduit aux échanges commerciaux.
La providentielle main invisible serait-elle prévisible? Hobbes est le penseur politique (pas encore économique, déjà plus ontologique) qui introduit l'idée d'État et indique que le libéralisme n'est pas compatible avec la société sans un État fort. Les libéraux ont toujours rappelé cette nécessité d'un État fort, mais avec une ambiguïté assez latente : il était seulement indiqué par leurs bons soins que l'État fort ne devait pas empiéter sur les prérogatives des individus. Hobbes est un père plus conséquent que son enfant putatif le libéralisme explicite en ce qu'il rappelle le rôle nécessaire d'un État fort dans une théorie qui décrète que les vices privés sont obligatoires pour fonder les grandes vertus publiques.
Le compte est bon. Hobbes rappelle que le libéralisme ne peut finir que dans un impérialisme autoritariste, autoritaire et destructeur. Malthus offre la dernière touche à ce panégyrique en tant qu'économiste stipendié par la Compagnie des Indes anglaise. Notre bon eugéniste légitime la décroissance en donnant ses lettres de crédit (ou de change) à la destruction. La décroissance est la légitimation de la destruction. Comprendre Bentham le pervers, Hobbes le dur et Malthus le destructeur aide mieux à cerner le libéralisme que s'en tenir à l'optimisme irrationnel et propagandiste de Smith.
Maintenant que l'on a compris que le libéralisme est de l'impérialisme moderne, économique, et que le fascisme est le visage libéral-impérialiste par temps de crise, la définition du fascisme est la suivante : bouton de crise. Le fascisme est l'acmé de la violence et de la destruction, avec une croyance particulière : pour se sortir de l'ornière, la violence est le bon remède. S'il est vrai que les pires ennemis sont les plus proches parents, le pire ennemi du fascisme est le libéralisme, puisque le fascisme prétend être la solution idéologique véritable qui prémunit de la crise et qu'il accuse de ce fait le libéralisme d'engendrer la crise systémique face à laquelle il apporte une réponse (le cataclysme de violence).
L'attitude de Heidegger qui fut un temps explicitement nazi et qui refusa jusqu'à la fin de ses jours de se dédire (cochon qui en médit) est éloquente : Heidegger a peut-être évolué vers la critique du nazisme, mais il est toujours demeuré cet adversaire farouche et inexpugnable du libéralisme - qui identifiait le libéralisme comme l'expression quintessentielle du nihilisme. De ce fait, Heidegger est plongé dans le dilemme tragique : d'un côté le nihilisme libéral; de l'autre, l'impossible solution de la violence. Il a cru que le nazisme offrait une rédemption et une alternative viable au libéralisme dépravé et sulfureux (au sens où le soufre dissout); il se rend compte par désespoir que l'échec du nazisme signe l'échec d'une idéologie à contrecarrer l'idéologie libérale.
Effectivement, le destin du libéralisme est de s'effondrer en un fracas systémique sans précédent. Marx l'avait prévu, mais seulement pour le capitalisme qu'il entendait dépasser, sans se rendre compte que son dépassement était faux - appartenait au libéralisme. Nous en sommes à ces heures qui sont proprement apocalyptiques en ce que la fin des temps n'évoque pas la fin de l'homme ou la fin du temps, mais la fin d'un monde. Ce n'est pas la fin du monde, comme nous le prévoient les millénaristes et les films hollywoodiens à gros budgets. Et ce n'est déjà pas si mal.
Pour en revenir au fascisme historique, il désigne "les licteurs, chargés de ces faisceaux, symboles d'autorité, de violence de la loi." (Wikipédia). Le fascisme se greffe sur le nationalisme italien bafoué par la Première guerre mondiale. Le contenu du fascisme est des plus vagues. On s'en doutait. Mussolini et ses amis ont amalgamé les lectures de Hegel sur l'État fort, de Gobineau sur le darwinisme social, de Nietzsche et du pacifiste-collaborateur Sorel. Le boxeur alter-nationaliste et quasi homonymique Alain Soral se revendique de cet héritage-là.
Dès les références, on se doute que le fascisme est un libéralisme extrémiste, dépouillé de sa caution modérée et positive (la main invisible). Fait intéressant, Mussolini vient du journalisme d'obédience socialiste et sera soutenu par des factions anarcho-syndicales quand il sera exclu des rangs socialistes. Loin de se retrouver démuni, il est soutenu par les patrons italiens et les services secrets français quand il fonde un nouveau journal.
Proche des milieux socialistes et capitalistes, Mussolini règne bientôt en Italie grâce à sa nomination à la fonction de premier ministre par le roi Victor-Emmanuel III. Tiens, Le fascisme de l'aristocratie oligarchique? Mussolini fonde bientôt une dictature et invoque la formule révélatrice : "Tout dans l'État, rien hors de l'État, rien contre l'État." Les socialistes et les conservateurs qui révoquent le fascisme au motif de sa violence sont les parents inavouables du fascisme.
Le fascisme est fondé sur le nationalisme et l'impérialisme, ce qui a le mérite de la clarté, contrairement aux promesses amphigouriques du libéralisme. Le fascisme se veut une troisième voie économique entre capitalisme et communisme. Dans cette stratégie de planification, l'économie est inféodée à l'État fasciste dans la mesure où l'État fasciste est au service des corporations de type oligarchique. Cercle vicieux. On retient souvent la première partie de cette phrase et l'on oublie que l'économie n'est sous la tutelle de l'État que dans la mesure où l'État dictatorial est un État oligarchique.
Il est capital de rappeler que Mussolini au pouvoir commence par suivre la politique libérale du gouvernement précédent (sous l'égide du libéral De Stefani) et qu'il rompt avec le libéralisme doctrinal pour embrasser la politique corporatiste qui est typiquement oligarchique : l'État au service des corporations. La politique oligarchique finale de Mussolini en dit long sur le dirigisme de Keynes et la fascination de Keynes pour la politique nazie de l'économiste Schacht. La conception libérale de Keynes finit fatalement en crypto-fascisme. Les libéraux dirigistes sont fascinés par le modèle fasciste parce qu'ils reconnaissent la parenté impérialiste dépouillée derrière le vernis sur la liberté modérée que servent les libéraux - comme les dames de charité servent la soupe aux bagnards.
La parenté idéologique du fascisme avec les autres idéologies permet de regrouper l'ensemble des idéologies sous la coupe de l'idéologie centrale, fédératrice et inspiratrice - le libéralisme. Ceux qui refusent de voir la réalité en face feraient bien de s'aviser s'il en est besoin de la destinée fasciste du libéralisme par temps de crise. Quand les néo-fascistes contemporains sous la coupe de Fini entrent au gouvernement de l'inénarrable Berlusconi, l'alliance du néo-fascisme et du néo-libéralisme est devenue criante : la parenté n'est pas forcée, mais se retrouve dès les prémisses d'évolution, qui sont certes des prolongements extrémistes, mais en aucun cas des trahisons.
J'ai déjà brossé le tableau de ce médecin du travail qui défendait la guerre en Afghanistan sous le principe du droit à la démocratie pour les Afghans (qui selon les benêts atlantistes méritent toujours toutes affaires cessantes d'être libérés des talibans!). Cette position pourrait être considérée comme naïve - elle l'est. Mais si l'on ajoute que notre énergumène, avant de m'envoyer en guise d'aveu de sa faiblesse une bordée d'insultes stupides et puériles, trouva le moyen d'expliquer que le fonctionnement humain repose sur la loi du plus fort, nous tenons là un spécimen du fascisme mou, soit l'ultra-libéral qui se considère de la gauche socialo-libérale ou des Verts libéro-libertaires.
Si l'on se remémore que le fascisme est avant tout une conception économique de la société (le corporatisme et l'oligarchisme), notre petit facho illustré entre dans la catégorie des conservateurs qui oscillent entre l'ultra-libéralisme décomplexé et la violence complexée. Pas encore fasciste explicite, notre ultra-libéral vert qui milite pour des principes ouvertement fascistes comme la loi du plus fort est un bourgeois de classe aisée qui milite pour la mainmise des plus forts sur le pouvoir politique et la richesse économique. Cette position implique le recours à la violence politique quand la crise survient.
Sentant monter l'orage de la rage, notre petit facho mou parle d'investir dans des armes de défense (drolatiques quand on connaît son caractère faiblard et son ressentiment de classe); se passionne pour les investissements immobiliers; suit les intérêts de classe qui l'arrangent sans se rendre compte qu'il sera récupéré par les intérêts politiques qui le couvent; estime appartenir au niveau des privilégiés sans se rendre compte qu'en tant que bourgeois moyen il n'est au mieux qu'un bras aveugle et lâche des vrais oligarques, soit des véritables classes dominantes; estime se cacher dans la médecine du travail conçue comme un travail de prestige et une niche oligarchique; disjoncte quand il est démasqué - se répand en injures de cour de maternelle.
Tel est le profil de celui qui n'a pas supporté que je lui rappelle ses oediperies de blanc-bec famélique et frustré. Par temps d'aristocratie, une paire de claques aurait suffi à souffler l'inopportun. Par ces temps de christianisme, je lui ai pardonné sa bêtise et sa violence. Dieu sait ce qui attend les égarés médiocres. Reste que d'un point de vue idiosyncrasique, nous tenons le profil du nouveau petit facho par temps de crise, qui appartient au milieu de la bourgeoisie médicale, qui est manipulable par les grands bourgeois et qui ne comprend rien à la situation politique dans laquelle il se meut.
Ce sont dans ces rangs moyens et moyennement favorisés que se recrutent les soutiens idéologiques qui estiment appartenir à un rang social et intellectuel supérieur à leur moyenne effective. Ce sont parmi ces imbéciles fieffés et prétentieux que l'on trouve les meilleurs relais propagandistes. Les fachos ne se recrutent pas parmi les thuriféraires fanatiques de l'extrême-droite institutionnalisée et labellisée. Ceux-là sont les nostalgiques d'un certain ordre nationaliste dépassé et réactionnaire. Les fachos actifs et vicieux sont les dés masqués qui se trouvent dans les rangs des ultra-libéraux. Les plus dangereux ne sont ni les théoriciens qui scrutent la vague et retirent les marrons du feu; ni les victimes qui servent d'hommes de larcin dans les bas-fonds; ce sont les bourgeois bornés qui soutiennent la lame de fond et qui sont persuadés que la haine et la violence serviront leurs intérêts individualistes, consuméristes et vulgaires. Moralité : les moyens ne sont jamais fins. Au mieux - aigres-fins.
Benito Mussolini, La Doctrine du fascisme, 1935.
Le fascisme réconcilie les tendances libérales dans la violence.
Traditionnellement, on a tendance à opposer le fascisme au libéralisme - et à tenir l'horizon dégagé. Les jeunes gauchistes paumés sont soulagés d'apprendre que le fascisme est aussi l'ennemi des idéologies collectivistes comme le socialisme et le communisme. Tous les bons, surtout les rebelles, sont contre les fascistes et acceptent pour ce fait de gloire universelle d'être réunis avec les libéraux de droite.
La vérité, c'est que le fascisme et le libéralisme appartiennent au même mouvement politique de réduction économique (histoire qu'on ne puisse remonter au statut politique), qui est l'impérialisme. Il faut tenir ces deux termes pour complémentaires. Quand l'impérialisme fonctionne, il est libéral. Quand il entre inévitablement en crise, il vire vers le fascisme. Reprenons la classification entre libéralisme progressiste et libéralisme pragmatique : le progressiste recoupe les idéologies collectivistes et généralistes comme le communisme ou le socialisme. Le pragmatique recoupe ce qu'on nomme généralement le libéralisme conservateur et qu'on appelle de plus en plus improprement la droite.
Il n'aura échappé à personne qu'en cette période de crise et d'indistinction, le libéralisme a envahi la gauche anciennement progressiste au point que les différences entre socialistes et conservateurs libéraux ne sautent pas aux yeux. Il est prévisible que l'impérialisme entre en crise parce que le mode de fonctionnement de l'impérialisme n'est pas pérenne. Un système fondé sur la domination appelle les crises et enseigne la gestion des catastrophes. Le libéralisme est un impérialisme travesti en doctrine de la liberté. C'est une liberté typiquement finie et impérialiste, théorisée par les écoles de la Compagnie des Indes anglaise.
Le libéralisme est le masque libre de l'impérialisme moderne. Vive l'impérialisme libre! La démocratie libre! La liberté libre? Dans cette acception, le progressisme libéral est incarné en premier lieu par Marx, qui n'est pas l'adversaire du libéralisme, mais qui est un libéral prétendant réaliser et achever le dessein libéral en dépassant le capitalisme par le communisme. On tend à réduire le libéralisme à son aspect pragmatique et conservateur, mais toutes les idéologies sont libérales, y compris l'anarchisme et le libertarisme.
Le fascisme se présente comme une troisième voie entre les propositions égalitaristes et pragmatiques du libéralisme. Le coup du fascisme qui serait l'ennemi irréductible du libéralisme est une galéjade. En réalité, il est compris dans le libéralisme - comme la forme idéologique prétendant incarner le visage autoritariste du libéralisme conservateur pragmatique. Il peut paraître étonnant d'inclure Marx dans le giron libéral, mais la meilleure formule pour définir la philosophie marxienne reviendrait à un provocant : "Tout le monde peut dominer".
On mesure à l'aune de cette formule quel type d'égalitarisme est l'égalitarisme marxien. Un égalitarisme impérialiste est un égalitarisme impossible, soit un nihilisme. Quand le fascisme s'oppose au libéralisme, c'est par rapport au concept de liberté - du libéralisme. Le fascisme juge que la liberté est un concept faux en terme d'idéologie et que la raison de l'impérialisme le conduit nécessairement à la force et à la violence. Le fascisme réconcilie les tendances libérales dans la violence.
Le désaccord entre le fascisme et le libéralisme historique ne repose pas sur l'impérialisme - mais sur la définition de l'impérialisme. Le fascisme réduit l'impérialisme à sa valeur la plus violente et immédiate, jugeant que cette forme arrive tôt ou tard - et que mieux vaut tôt que tard; quand le libéralisme juge que l'impérialisme est compatible avec une certaine liberté finie. Le libéralisme historique et le capitalisme prônent une extension de la liberté finie, et inégale avec l'universalisation des sociétés inégalitaires. L'égalitarisme en termes capitalistes est impensable. Le collectivisme estime au contraire que l'égalitarisme est possible.
Raison pour laquelle l'égalitarisme s'effondre en premier : l'idée d'un égalitarisme impérialiste est la plus impossible, ridicule et fragile. Quant à l'idée d'un impérialisme inégalitariste et pragmatique, elle est fausse, car l'impérialisme ne peut s'étendre à l'ensemble des peuples. Il ne peut que s'appliquer (de manière inégalitaire) sous sa forme de libéralisme pragmatique à environ un cinquième, soit sa forme actuelle. Au-delà, c'est impérialisme le plus sauvage qui prévaut.
De ce point de vue, le fascisme est une forme lucide d'impérialisme qui considère que les formes plus ou moins humanistes ou universalistes de libéralisme sont une perte de temps. Selon le fascisme, le seul libéralisme qui vaut est adossé à la force et à la violence. Raison pour laquelle les nationalistes ont si souvent raison (quoique sur l'ensemble ils aient tort) : ils s'adossent à une vision qui identifie de manière assez explicite l'impérialisme, à ceci près qu'ils tiennent l'impérialisme pour juste - quand la lutte contre l'impérialisme est le vrai cheval de bataille de l'homme qui croit en la personne humaine.
L'opposition virulente du fascisme au libéralisme, au communisme et au socialisme est conséquente : les fascistes sont des libéraux qui excluent toute autre forme d'idéologies de leur jargon au motif qu'ils incarnent la seule forme d'impérialisme conséquent (comme les matérialistes se revendiquant tous en fonction de leur chapelle du seul matérialisme conséquent). D'une certaine manière, on pourrait oser que les seuls impérialistes à visage découvert sont les fascistes - qui proclament : l'impérialisme est violence et domination des plus forts sur les moins forts. Des plus fous aussi.
Aux yeux du fascisme, les autres formes d'impérialisme sont des pommades et des potions pour rendre le breuvage moins amer. L'identité du libéralisme à l'impérialisme est juste si l'on distingue l'idéologie libérale découlant de l'impérialisme britannique (la Compagnie des Indes de type anglais) du libéralisme en tant qu'idéologie défendant la liberté. Cette deuxième définition est superficielle et constitue une perte de temps, voire un dérivatif. Attachons-nous à ce que le libéralisme représente vraiment d'un point de vue historique et idéologique.
L'idéologie commence avec les idéologues qui prônent une conception sensualiste de l'homme. Les idéologues sont d'ailleurs des philosophes qui commencent par avancer le matérialisme ontologique et l'empirisme à la manière d'un Locke, puis qui peu à peu considèrent que les anciennes questions métaphysiques sont une perte de temps et que seule la partie politique mérite attention et concentration. Cette réduction de la philosophie à la pensée politique est incarnée par ces penseurs qui se prévalent de la pensée politique - et je pense au plus grand d'entre eux, le terrible et conséquent Hobbes.
Aujourd'hui que le libéralisme s'est réduit en terminaison ultra-libérale, la suppression de la politique passe par l'affirmation inconditionnelle et exclusive de la pensée économique. La parenté de l'ultra-libéralisme et du fascisme est un point primordial, puisque les ultra-libéraux s'étranglent quand on leur accole l'étiquette pourtant lucide de fasciste au motif qu'ils sont contre le nationalisme. C'est oublier que le vrai visage du fascisme tient dans le corporatisme économique et que de ce point de vue, les fascistes sont des ultra-libéraux, soit des utilitaristes et des pragmatiques. La petite différence entre le fascisme et l'ultra-libéralisme réside sans doute dans la différence quantitative de degré.
L'ultra-libéralisme précède de peu le fascisme effectif, en ce que l'ultra-libéralisme invoque encore de manière ambivalente la liberté (jumelée avec l'utilité), quand le fascisme n'entend plus comme fin que l'utilitarisme - le plus expéditif et violent. Dans la chaîne du libéralisme, le fascisme est au bout de la gradation, quand l'ultra-libéralisme incarne le stade précédent. Raison pour laquelle tant de théoriciens de l'ultra-libéralisme sont des modèles des fascistes contemporains. Je pense à ce Hayek, qui finit par quasiment répudier le libéralisme au motif qu'il ne s'accorde pas avec la destruction de toute forme d'État et qu'il ne concorde pas avec le modèle individualiste pur, idéaliste et fasciste (sous le visage de l'anarchisme ultra-libéral).
Le libéralisme est une forme particulière d'impérialisme en tant qu'il est la forme moderne de impérialisme. Le libéralisme est l'idéologie qui prospère partout où l'impérialisme occidental se développe. D'ordinaire l'impérialisme s'ancre dans une conception finie du fini, comme c'est le cas chez Aristote l'oligarque élève de Platon. Aristote considère que l'univers est fini et mécaniquement déterminé. Ce sera aussi pour partie le cas d'un Descartes, qui est contraint d'invoquer son deux ex machina pour sauvegarder la liberté religieuse.
Le libéralisme ajoute à l'impérialisme traditionnel ou classique une originalité qui est sa marque de fabrique moderne (en quoi d'un point de vue ontologique l'immanentisme est la forme moderne du nihilisme atavique) : c'est un impérialisme économique qui dégénère en fondamentalisme idéologique d'ordre financier, soit un impérialisme encore plus réducteur et extrémiste que les formes classiques d'impérialisme. Cet impérialisme se fonde sur le substrat immanentiste : le nihilisme ne reconnaît d'infini que fini, quand l'immanentisme ne reconnaît de fini qu'humain (spécifique au monde de l'homme).
A partir de cette hyperréduction de l'immanentisme, l'impérialisme immanentiste est un impérialisme qui est économique, soit qui considère que la domination de l'homme dominant passe par la réduction du réel aux appétits humains primordiaux et exclusifs. Tel est le libéralisme, une idéologie qui descend de la doctrine des idéologues historiques, des sensualistes piqués (tels les chiens de Pavlov) de scientisme étriqué et de naïveté matérialiste affligeante. Il ne faut pas attendre du libéralisme une quelconque profondeur, mais comprendre que la définition classique de la liberté est antithétique avec la définition de la liberté fournie dès ses origines par le libéralisme et accentuée encore par l'évolution de plus en plus extrémiste du libéralisme, au point qu'aujourd'hui certains libéraux se réclament du libéralisme historique se dissocient de l'ultra-libéralisme, appelé non sans ironie néo-libéralisme. Tout ce qui est nouveau est extrémiste dans l'immanentisme terminal.
Tout ce qui est nouveau n'a pas le - niveau. Il suffira d'invoquer BHL pour les Nouveaux philosophes ou Greenspan pour les spéculateurs mondialistes. Le libéralisme est l'ensemble des doctrine idéologiques qui sortent de l'école de l'impérialisme britannique, schématiquement d'Adam Smith. Pour comprendre adéquatement le visage du libéralisme, il ne faut pas s'en tenir au père fondateur, mais il faut étendre la lecture à Bentham, Malthus et Hobbes. Bentham est un utilitariste qui réduit l'homme aux plus bas instincts négatifs, conformément à la fable de Mandeville. Il est l'ontologue simpliste du libéralisme. Malthus entrevoit que la main invisible n'équilibrera pas toujours de manière providentielle et irrationnelle le marché, soit le réel réduit aux échanges commerciaux.
La providentielle main invisible serait-elle prévisible? Hobbes est le penseur politique (pas encore économique, déjà plus ontologique) qui introduit l'idée d'État et indique que le libéralisme n'est pas compatible avec la société sans un État fort. Les libéraux ont toujours rappelé cette nécessité d'un État fort, mais avec une ambiguïté assez latente : il était seulement indiqué par leurs bons soins que l'État fort ne devait pas empiéter sur les prérogatives des individus. Hobbes est un père plus conséquent que son enfant putatif le libéralisme explicite en ce qu'il rappelle le rôle nécessaire d'un État fort dans une théorie qui décrète que les vices privés sont obligatoires pour fonder les grandes vertus publiques.
Le compte est bon. Hobbes rappelle que le libéralisme ne peut finir que dans un impérialisme autoritariste, autoritaire et destructeur. Malthus offre la dernière touche à ce panégyrique en tant qu'économiste stipendié par la Compagnie des Indes anglaise. Notre bon eugéniste légitime la décroissance en donnant ses lettres de crédit (ou de change) à la destruction. La décroissance est la légitimation de la destruction. Comprendre Bentham le pervers, Hobbes le dur et Malthus le destructeur aide mieux à cerner le libéralisme que s'en tenir à l'optimisme irrationnel et propagandiste de Smith.
Maintenant que l'on a compris que le libéralisme est de l'impérialisme moderne, économique, et que le fascisme est le visage libéral-impérialiste par temps de crise, la définition du fascisme est la suivante : bouton de crise. Le fascisme est l'acmé de la violence et de la destruction, avec une croyance particulière : pour se sortir de l'ornière, la violence est le bon remède. S'il est vrai que les pires ennemis sont les plus proches parents, le pire ennemi du fascisme est le libéralisme, puisque le fascisme prétend être la solution idéologique véritable qui prémunit de la crise et qu'il accuse de ce fait le libéralisme d'engendrer la crise systémique face à laquelle il apporte une réponse (le cataclysme de violence).
L'attitude de Heidegger qui fut un temps explicitement nazi et qui refusa jusqu'à la fin de ses jours de se dédire (cochon qui en médit) est éloquente : Heidegger a peut-être évolué vers la critique du nazisme, mais il est toujours demeuré cet adversaire farouche et inexpugnable du libéralisme - qui identifiait le libéralisme comme l'expression quintessentielle du nihilisme. De ce fait, Heidegger est plongé dans le dilemme tragique : d'un côté le nihilisme libéral; de l'autre, l'impossible solution de la violence. Il a cru que le nazisme offrait une rédemption et une alternative viable au libéralisme dépravé et sulfureux (au sens où le soufre dissout); il se rend compte par désespoir que l'échec du nazisme signe l'échec d'une idéologie à contrecarrer l'idéologie libérale.
Effectivement, le destin du libéralisme est de s'effondrer en un fracas systémique sans précédent. Marx l'avait prévu, mais seulement pour le capitalisme qu'il entendait dépasser, sans se rendre compte que son dépassement était faux - appartenait au libéralisme. Nous en sommes à ces heures qui sont proprement apocalyptiques en ce que la fin des temps n'évoque pas la fin de l'homme ou la fin du temps, mais la fin d'un monde. Ce n'est pas la fin du monde, comme nous le prévoient les millénaristes et les films hollywoodiens à gros budgets. Et ce n'est déjà pas si mal.
Pour en revenir au fascisme historique, il désigne "les licteurs, chargés de ces faisceaux, symboles d'autorité, de violence de la loi." (Wikipédia). Le fascisme se greffe sur le nationalisme italien bafoué par la Première guerre mondiale. Le contenu du fascisme est des plus vagues. On s'en doutait. Mussolini et ses amis ont amalgamé les lectures de Hegel sur l'État fort, de Gobineau sur le darwinisme social, de Nietzsche et du pacifiste-collaborateur Sorel. Le boxeur alter-nationaliste et quasi homonymique Alain Soral se revendique de cet héritage-là.
Dès les références, on se doute que le fascisme est un libéralisme extrémiste, dépouillé de sa caution modérée et positive (la main invisible). Fait intéressant, Mussolini vient du journalisme d'obédience socialiste et sera soutenu par des factions anarcho-syndicales quand il sera exclu des rangs socialistes. Loin de se retrouver démuni, il est soutenu par les patrons italiens et les services secrets français quand il fonde un nouveau journal.
Proche des milieux socialistes et capitalistes, Mussolini règne bientôt en Italie grâce à sa nomination à la fonction de premier ministre par le roi Victor-Emmanuel III. Tiens, Le fascisme de l'aristocratie oligarchique? Mussolini fonde bientôt une dictature et invoque la formule révélatrice : "Tout dans l'État, rien hors de l'État, rien contre l'État." Les socialistes et les conservateurs qui révoquent le fascisme au motif de sa violence sont les parents inavouables du fascisme.
Le fascisme est fondé sur le nationalisme et l'impérialisme, ce qui a le mérite de la clarté, contrairement aux promesses amphigouriques du libéralisme. Le fascisme se veut une troisième voie économique entre capitalisme et communisme. Dans cette stratégie de planification, l'économie est inféodée à l'État fasciste dans la mesure où l'État fasciste est au service des corporations de type oligarchique. Cercle vicieux. On retient souvent la première partie de cette phrase et l'on oublie que l'économie n'est sous la tutelle de l'État que dans la mesure où l'État dictatorial est un État oligarchique.
Il est capital de rappeler que Mussolini au pouvoir commence par suivre la politique libérale du gouvernement précédent (sous l'égide du libéral De Stefani) et qu'il rompt avec le libéralisme doctrinal pour embrasser la politique corporatiste qui est typiquement oligarchique : l'État au service des corporations. La politique oligarchique finale de Mussolini en dit long sur le dirigisme de Keynes et la fascination de Keynes pour la politique nazie de l'économiste Schacht. La conception libérale de Keynes finit fatalement en crypto-fascisme. Les libéraux dirigistes sont fascinés par le modèle fasciste parce qu'ils reconnaissent la parenté impérialiste dépouillée derrière le vernis sur la liberté modérée que servent les libéraux - comme les dames de charité servent la soupe aux bagnards.
La parenté idéologique du fascisme avec les autres idéologies permet de regrouper l'ensemble des idéologies sous la coupe de l'idéologie centrale, fédératrice et inspiratrice - le libéralisme. Ceux qui refusent de voir la réalité en face feraient bien de s'aviser s'il en est besoin de la destinée fasciste du libéralisme par temps de crise. Quand les néo-fascistes contemporains sous la coupe de Fini entrent au gouvernement de l'inénarrable Berlusconi, l'alliance du néo-fascisme et du néo-libéralisme est devenue criante : la parenté n'est pas forcée, mais se retrouve dès les prémisses d'évolution, qui sont certes des prolongements extrémistes, mais en aucun cas des trahisons.
J'ai déjà brossé le tableau de ce médecin du travail qui défendait la guerre en Afghanistan sous le principe du droit à la démocratie pour les Afghans (qui selon les benêts atlantistes méritent toujours toutes affaires cessantes d'être libérés des talibans!). Cette position pourrait être considérée comme naïve - elle l'est. Mais si l'on ajoute que notre énergumène, avant de m'envoyer en guise d'aveu de sa faiblesse une bordée d'insultes stupides et puériles, trouva le moyen d'expliquer que le fonctionnement humain repose sur la loi du plus fort, nous tenons là un spécimen du fascisme mou, soit l'ultra-libéral qui se considère de la gauche socialo-libérale ou des Verts libéro-libertaires.
Si l'on se remémore que le fascisme est avant tout une conception économique de la société (le corporatisme et l'oligarchisme), notre petit facho illustré entre dans la catégorie des conservateurs qui oscillent entre l'ultra-libéralisme décomplexé et la violence complexée. Pas encore fasciste explicite, notre ultra-libéral vert qui milite pour des principes ouvertement fascistes comme la loi du plus fort est un bourgeois de classe aisée qui milite pour la mainmise des plus forts sur le pouvoir politique et la richesse économique. Cette position implique le recours à la violence politique quand la crise survient.
Sentant monter l'orage de la rage, notre petit facho mou parle d'investir dans des armes de défense (drolatiques quand on connaît son caractère faiblard et son ressentiment de classe); se passionne pour les investissements immobiliers; suit les intérêts de classe qui l'arrangent sans se rendre compte qu'il sera récupéré par les intérêts politiques qui le couvent; estime appartenir au niveau des privilégiés sans se rendre compte qu'en tant que bourgeois moyen il n'est au mieux qu'un bras aveugle et lâche des vrais oligarques, soit des véritables classes dominantes; estime se cacher dans la médecine du travail conçue comme un travail de prestige et une niche oligarchique; disjoncte quand il est démasqué - se répand en injures de cour de maternelle.
Tel est le profil de celui qui n'a pas supporté que je lui rappelle ses oediperies de blanc-bec famélique et frustré. Par temps d'aristocratie, une paire de claques aurait suffi à souffler l'inopportun. Par ces temps de christianisme, je lui ai pardonné sa bêtise et sa violence. Dieu sait ce qui attend les égarés médiocres. Reste que d'un point de vue idiosyncrasique, nous tenons le profil du nouveau petit facho par temps de crise, qui appartient au milieu de la bourgeoisie médicale, qui est manipulable par les grands bourgeois et qui ne comprend rien à la situation politique dans laquelle il se meut.
Ce sont dans ces rangs moyens et moyennement favorisés que se recrutent les soutiens idéologiques qui estiment appartenir à un rang social et intellectuel supérieur à leur moyenne effective. Ce sont parmi ces imbéciles fieffés et prétentieux que l'on trouve les meilleurs relais propagandistes. Les fachos ne se recrutent pas parmi les thuriféraires fanatiques de l'extrême-droite institutionnalisée et labellisée. Ceux-là sont les nostalgiques d'un certain ordre nationaliste dépassé et réactionnaire. Les fachos actifs et vicieux sont les dés masqués qui se trouvent dans les rangs des ultra-libéraux. Les plus dangereux ne sont ni les théoriciens qui scrutent la vague et retirent les marrons du feu; ni les victimes qui servent d'hommes de larcin dans les bas-fonds; ce sont les bourgeois bornés qui soutiennent la lame de fond et qui sont persuadés que la haine et la violence serviront leurs intérêts individualistes, consuméristes et vulgaires. Moralité : les moyens ne sont jamais fins. Au mieux - aigres-fins.
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