samedi 13 février 2010

Honeytarisme

On pense quand on dépense?



Nous sommes face à une discipline galvaudée qui se prend pour ce qu'elle n'est pas. L'époque se prend pour ce qu'elle n'est pas. Autrefois, quand on pensait, on pensait dans le giron religieux. Peut-être qu'on philosophait? Il est très récent de philosopher hors du religieux. Est-ce mieux? Au secours, Onfray est de retour! Et le pire, c'est qu'il veut fonder un nouveau capitalisme - libertaire. L'époque a remplacé la pensée classique par la pensée contemporaine : l'Économie. A-t-on progressé? A-t-on fait des économies? A-t-on mieux dépensé?
Quand je parle d'économie, je veux parler de la Science qui se présente comme l'Économie, la Seule, la Vraie, alors qu'elle est une certaine économie, loin d'être l'exclusive - le monétarisme. Monkey talks. Toujours le prisme scientiste camouflé en sciences humaines et en objectivité. Prendre le réel pour un objet, c'est l'objectif d'être objectif? Être objectif, est-ce se montrer crétin? L'économie scientifique : le monétarisme est-il scientifique? Est-on scientifique quand on se trompe de prévisions et qu'on n'est pas capable de jauger des mécanismes de la science qu'on prétend incarner?
Le monétarisme est-il synonyme d'économie? Le monétarisme est-il l'exclusivité de l'économie? Le réel est-il la somme des désirs humains? Quand on accorde la valeur exclusive au monétarisme, ne passe-t-on pas à côté du réel? Question à poser pour distinguer l'orientation monétariste de l'économie réelle qui considère que l'homme est partie d'un processus qui le dépasse et l'intègre. Le monétarisme est-il de l'économie ou n'exprime-t-il pas un symptôme immanentiste?
Une fois de plus, une fois de trop, être académique, c'est ratiociner. Aujourd'hui, malgré l'erreur monumentale des économistes académiques qui ne comprennent rien en matière d'économie, on continue à présenter le monétarisme comme la nouvelle Pensée - la plus haute pensée. Le terme spéculation est désormais un terme économique. On pense quand on dépense. Avant, on faisait de la spéculation métaphysique. Maintenant, on spécule quand on s'adonne à des opérations financières exclusivement physiques...
Le statut de l'économie monétariste comme pensée suprême en dit long sur les opérations de basse réduction auxquelles la représentation s'est adonnée. Pour que la pensée soit économique selon cette conception si engagée dans le désengagement et le desengano, il importe de réduire le réel aux bornes de l'étymologie. Tout un programme, toute une structure. Éco-nomie : le réel réduit à la maison, au patrimoine. Une maison, c'est construit, c'est fini, c'est stable? Un patrimoine, c'est défini ou c'est fini? C'est si fin d'être fini? Dès le départ, nous nous mouvons dans le financier et la spéculation finie.
L'économie pure serait-elle le régime des experts bornés et veules, qui se tiennent à la pointe du progrès dans la mesure où le progrès constitue la régression abyssale? C'est suite à la baisse du niveau, augmentation experte, effondrement du sens, que l'économiste passe pour le Nouveau Penseur - le Spéculateur. L'économie exclusive se débarrasse du réel et sombre dans le monétarisme. La réduction monétariste. La réduction, c'est de se débarrasser du réel pour créer le format de l'Hyperréel.
La nouveauté sanctionne la dégradation, un peu comme la décroissance sanctifie le culte de la mort sous des atours positifs. Les Nouveaux philosophes sont l'appellation publicitaire qui indique que la bêtise propagandiste sera le critère de ce qu'on appelle la philosophie. Logique : la pensée spéculative se situe désormais du côté de l'économie monétariste. On remplace les penseurs par des experts qui morcèlent et décortiquent le réel sous prétexte de le rendre plus objectif et scientifique. L'imbécilité manifeste devient la référence. On se plaint que le niveau baisse, mais on s'en donne les moyens!
Dans cette hiérarchie, l'expert suprême est l'économiste. Le penseur suprême est l'économiste. La spéculation est économique. Si l'on adoube ce raisonnement, la logique interne la plus rigoureuse (terme fort reprisé des répétiteurs académiques et zélés) aboutit à des résultats d'autant plus justes à l'intérieur de la mentalité qu'ils sont faux dans le réel. On crée un réel clos, fini et fixe, monétariste. Résultat : la mentalité est fausse. Le monétarisme passe à côté de l'économie réelle. L'économie monétariste est désaxée. On réalise un grand progrès quand on comprend que l'économie qu'on nous présente est monétariste. Que le monétarisme repose sur la supercherie économique.
On qualifie cette économie pour ce qu'elle est : une pensée réductrice au service de l'impérialisme. Une pensée qui évacue le réel. Rien de nouveau sous le soleil : à chaque fois que la pensée se place au service prostitueur du nihilisme, la pensée se réduit comme peau de chagrin, se dégrade, s'effondre. Le progrès devient de la soupe au chou. Oublions le monétarisme - revenons à l'économie. Vous voulez de l'économie? Comprendre la crise actuelle? Développer le monde? Commencez par connecter l'économie avec la pensée. Pas d'économie sans pensée : pas de partie sans tout. Ce qui est fini n'est qu'une partie, qui n'existe pas sans connexion avec le tout.
Vous aurez une économie qui ne peut se déployer sans religieux, philosophie, histoire, sciences et autres disciplines. Une économie qui ne peut vivre sans référence au réel. Cette économie ne concerne plus la réduction du monde à un ordre délimité et stable. C'est une économie vivante, une économie dynamique, une économie en lien avec la pensée. On rompt avec le monétarisme qui exprime en termes économiques le désordre du désir. Prendre ses désirs pour des réalités : donner à la monnaie une valeur intrinsèque. Complétude du désir : complétude de la monnaie. Incomplétude de la pensée. Excellence de la spéculation. Faillite du sens : triomphe du principe d'irrationalisme.
Contre cette dérive insignifiante (dans tous les sens du terme), revenons au réel. La seule économie qui vaut s'adosse sur le réel. La partie s'adosse sur le tout. L'économie n'est qu'une partie de la pensée. Elle ne vaut pas sans connexion à la pensée. Quand l'économie prend la place de la pensée, elle est l'imposture au service de la dépense. Quand on dépense la pensée, on détruit l'économie. La pensée dépensée parvient au monétarisme. Le monétarisme est le nom économique du déni - de réel.
Le monétarisme est le refus du réel sous prétexte de désir. Le monétarisme est l'expression de l'immanentisme. Il est capital pour l'immanentisme de détruire la pensée classique qui pense le réel pour la transformer en bribes de pensée qui segmentent et déforment - le réel. Il est capital pour l'immanentisme de réduire le réel en le déformant. Il est capital pour l'immanentisme de présenter la pensée sous une forme déformée, différante et morcelée. Le propre du morcelé est d'apparaître sous une forme évolutive et changeante.
Pas de morcèlement sans indéfini changement. Le morcèlement ne renvoie à aucune identité précise, stable. Le monétarisme est l'expression de cette réduction retorse et insaisissable, qui vous fuit entre les mains comme un poisson dans l'eau. Le nihilisme provoque l'éclatement de la pensée en une myriade de pensées expertes dont la forme dominante est l'expertise économique. Cette expertise prend le visage du monétarisme exclusif, totalisant - totalitaire. A l'opposé de cette démarche qui vient d'être invalidée par l'effondrement économique systémique et irrémédiable, il convient de rappeler que l'économie est une démarche scientifique (ce qui ne veut pas dire certaine et vériste), à condition qu'elle soit connectée au réel - à la pensée.

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