L'académisme : en philosophie, cela s'appelle l'histoire de la philosophie. On connaît des centaines d'exemples d'agrégés qui récitent sur le bout des doigts leur Platon, leur Kant ou leur Hegel et qui n'en sont pas pour autant philosophes ou penseurs. Pour penser, il faut produire des idées. Nos historiens de la philosophie sont des perroquets parfois impressionnants (d'érudition), mais des mimes qui ne dépassent jamais leur irréprochable savoir. Pas une goutte de pensée. Des tonnes de répétition.
Tel est le cas d'Enthoven, qui aurait dû se dispenser de distribuer son avis de facture nihiliste (en termes ontologiques) et oligarchique (en termes politiques). Enthoven est du côté du pouvoir, et c'est sans doute l'élément le plus attristant de son académisme forcené. Le moins étonnant aussi. Le monde parisianiste est petit, nous l'allons vérifier. D'où parle Enthoven Jr.? Depuis le magazine réputé de gauche l'Express, qui est dirigé par un proche ami d'Enthoven, Christophe Barbier. Barbier de Gaza. Tout comme Enthoven Jr., Barbier le Juste se distingue par un parcours prestigieux de normalien d'Ulm et par un engagement de gauche très tendance. Barbier le Résistant s'est manifesté récemment par ses envolées sur les crimes de guerre d'Israël ou contre les insurrections des Antilles au nom du travail (un thème éminent de la droite des affaires ultralibérale).
L'alliance est criante. On peut ajouter pour la touche people que Barbier a recueilli les confessions passionnantes de Carla B. quand celle-ci a annoncé qu'elle était tombée sous le charme impérissable de Sarkozy (chez le génial Séguéla, encore un modèle de probité intellectuelle et politique). Enthoven Jr. est l'ancien compagnon de Carla B. Carla B. se réclame aussi de la gauche et partage avec Barbier les mêmes positions sionistes. Enthoven Jr. est le fils de Sr., qui est l'éditeur de BHL. BHL est un sioniste enthousiaste qui ne se cache pas et qui s'est montré aussi intransigeant lors du massacre de Gaza que Barbier. BHL est de cette gauche caviardée, la gauche financière, la gauche milliardaire, la gauche mondialiste, la gauche atlantiste, la gauche ultralibérale. On se souviendra que ce petit milieu artistico-intellectuel qui prend la défense de DSK correspond en tous points à la mentalité de DSK, l'ultralibéral de gauche sioniste et atlantiste devenu directeur du FMI sous Sarkozy. Coïncidence? Nul besoin de rappeler à quelle gauche se rattache ce petit clan de cancans, au sens où Proust dépeint (avec férocité? méchanceté? ironie? humour?) le clan des Verdurin.
Concernant l'intervention d'Enthoven Jr. : notre brillant philosophe de salon reprend la méthode du paradoxe frivole pour présenter sa pensée. Il procède par renversements faux et faussement inattendus, ne ne se rendant pas compte que ses paradoxes n'en sont que pour lui. Je veux dire : ses paradoxes l'amènent à réhabiliter le pouvoir, ce qui est un geste d'une subversion paradoxale. Enthoven du côté de DSK l'institutionnel, c'est un peu comme Barbier du côté d'Israël ou du travail : deux ultralibéraux de gauche, deux soutiens de DSK, deux supporters de gauche du pouvoir de droite. Manipulation très prévisible et très fin de règne.
Enthoven Jr. le croquemort de la pensée est du côté du pouvoir au sens où l'on se situe du côté de ce qui est mort. Rabelais parle joliment et justement de parole gelée pour qualifier les pédants qui oublient la vie pour se concentrer sur la transmission de l'écrit. Sans doute est-ce ainsi qu'il fait interpréter l'intervention d'Enthoven Jr. dans le champ de l'opinion : un croquemitaine des idées au service des pirates de la politique économique. Hic! Tic du toc : Enthoven est de la gauche caviar, de la gauche Saint-Germain, de la gauche Neuilly, de la gauche si proche du président Sarko. Au passage, question proximité inacceptable, souvenons-nous de la liaison quasi incestueuse qu'Enthoven Jr. entretint avec Carla Bruni, la compagne du Président, dont la rencontre chez un publicitaire ressemble à s'y méprendre à un arrangement au sommet.
Plus que de longs discours, cet épisode décadent montre qui est Enthoven Jr. en tant que figure archétypale de la dégénérescence morale (au sens classique) de notre époque épique. Si je voulais oeuvrer dans le calembour populacier, dont les délicates papilles d'Enthoven fuient les abominables relents, j'oserais que devant l'article que nous pond Enthoven Jr., je suis comme Carla devant une partition : sans voix. Le plus savoureux est que l'intervention presque népotique d'Enthoven Jr. soit relayée sur Internet par un média qui s'appelle Pure people. Mérite de l'ironie : sa franchise. Enthoven est un people de gauche, qui parle au nom des people de gauche, pas du peuple français, de gauche ou de droite. En ce sens, on peut parler d'imposture intellectuelle, comme le firent deux physiciens pour qualifier les délires amphigouriques des philosophes postmodernes (dont Deleuze et Guattari).
http://www.scooppeople.fr/article-5237-raphael-enthoven-tacle-stephane-guillon-dans-l-express.html
Notre Enthoven Jr. serait-il philosophe à la ville comme Cottard est médecin chez Proust et comme Molière convoque des philosophes vaniteux et vains? Des sorbonnards descendants d'Aristote et de la tradition de la scolastique figée et sclérosée? Contre qui s'élève Rabelais si ce n'est contre la démarche (postérieure) d'un Enthoven? Qui trahit Enthoven Jr. quand il se réclame de l'académisme pour n'en retenir que l'aspect le plus conservateur et le plus gelé? Enthoven Jr. se réclame ainsi de l'héritage (indirect) d'un Rabelais pour trahir Rabelais et se servir de Rabelais contre la vraie contestation. Rabelais aurait-il défendu DSK du FMI?
A croire que les cercles germanopratins de gauche sentent la gauche la moins orthodoxe : ils l'infiltrent, mais en fait ils se trouvent du côté de l'atlantisme. Barbier tient des propos ultraconservateurs. Val est un néoconservateur de plus en plus explicite. DSK charrie les effluves du sionisme ultralibéral. Nul socialisme, nul progressisme logiques dans ce fatras idéologique. Comprend-on les réseaux intellectuels qui attaquent Guillon le clown censeur? Comprend-on pourquoi Enthoven Jr. prend la plume comme on lève le coude? Qui est Enthoven Jr.? Réponse : un propagandiste bien plus qu'un penseur ou un honnête homme. Propagandiste : relayer des discours déjà prêts et finis.
Ce n'est plus du savoir gelé. C'est de la parole congelée. Qui fond quand on la vérifie à l'air libre. Je ne dis pas que les interventions de Guillon sont impérissables, tant s'en faut, mais il est clair que les productions d'Enthoven Jr. sont pitoyables. Symptômes de propagandes, c'est seulement en tant que symptômes qu'elles possèdent un intérêt critique. Le reste n'est que flatulences nauséabondes. Quel est le crime de Guillon? Dans ses interventions du matin, notre satiriste forcené s'en prend à certaines personnalités politiques. Ainsi Guillon a-t-il moqué DSK. DSK avait dès sa réponse (immédiate) lancé l'impulsion des attaques en distinguant entre l'humour et la méchanceté. Etre méchant n'est pas un compliment, mais ce n'est pas non plus une tare. Après tout, le satiriste polémiste n'est pas un gentil, sinon il produit de l'hagiographie. Hein, Jr.?
Reprocher à un satiriste sa méchanceté, c'est comme reprocher à un chien d'aboyer. Niveau réflexion, c'est risible. C'est que l'intention poursuivie par Enthoven Jr. le propagandiste au service (latent) de DSK & Co. est de vilaine nature : faire taire Guillon le vilain. Pour tout esprit animé par le bon sens, interdire de parole Guillon parce qu'il serait méchant, haineux, agressif ou que sais-je? reviendrait à de la censure obvie. Raison pour laquelle le faux philosophe Enthoven Jr. n'hésite pas à jouer de son paradoxe bancal et faussé et à renverser l'évidence. Avec lui, cette fois, c'est Guillon le censeur, carrément comparé au procureur Starr dans l'affaire Lewinsky. Au nom de la censure, Guillon est présenté comme le censeur. Apologue de la paille et de la poutre, Enthoven Jr. imite Guillon par les traits qu'il lui reproche. C'est si savoureux que la mauvaise foi transparaît comme la tache derrière les auréoles.
Nous allons voir sur quel argumentaire biaisé s'appuie Enthoven Jr., histoire de démasquer ce clown de la pseudo-pensée, au sens où il présente Guillon en tant que clown moralisateur.
1) Pour commencer, Enthoven Jr. distingue entre rire (de tout) et se moquer (de quelqu'un). Distinction biscornue : si l'on rit de tout, l'on se moque forcément, et de quelqu'un a fortiori. Dès le départ, nous nous situons dans l'argutie de la fausse distinction. Mais Enthoven assène dans le vide : qui se moquerait censurerait au nom de la liberté. Nous sommes fixés : telle est la thèse (ultrastéréotypée type dissertation de bac) que lance notre impérissable auteur. On notera qu'il s'agit d'un postulat et nous prendrons soin de vérifier si Enthoven Jr. dépasse l'indémontré par la suite. S'il ne démontre pas, c'est que sa thèse est indémontrable, soit qu'elle repose sur l'erreur. Immédiatement, il cite trois exemple de moquerie : quand Guillon s'en est pris à DSK, à Aubry et à Apathie. Mais comment Enthoven justifie-t-il sa distinction, démarche sans laquelle il est dans l'arbitraire et dans l'apologie de la loi du plus fort - tout à fait oligarchique?
2) Enthoven Jr. distingue la liberté d'expression de la moquerie. La moquerie n'est pas la liberté d'expression. Premier argument : première analogie. Procédé contestable! La liberté de mouvement est rapprochée de la liberté d'expression. L'on ne peut taper son voisin au nom de la liberté de mouvement. Donc : on ne peut agresser son voisin au nom de la liberté d'expression. Problème : comparaison n'est pas raison. Problème connexe plus gênant : le rapprochement est faux. Car s'il est interdit d'user de violence physique ou verbale contre son voisin, il n'est nullement interdit de lui dire la vérité. La vérité blesse. En l'occurrence, Guillon s'est moqué de DSK pour ses penchants de coureur de jupon invétéré. C'est la vérité factuelle. Enthoven Jr. au nom de la lutte contre la censure voudrait ainsi censurer la moquerie parce qu'elle serait de la censure. Censurer le réel parce qu'il est moqueur. C'est un raisonnement scabreux et absurde. Un raisonnement de censeur.
3) Enthoven Jr. s'inscrit dans la formule célèbre de la liberté, définition issue des Lumières, notamment d'un Kant : la liberté d'un individu s'arrête où commence celle de l'autre. On notera qu'il accumule les citations avec l'application du bon élève, mais qu'il n'a toujours pas démontré le début de commencement de sa thèse. Au contraire, il poursuit son opération de divertissement qui est une opération typiquement nihiliste, au sens où Platon parlait des sophismes de son temps. Quoi qu'il en soit, Enthoven Jr. n'est pas Gorgias, comme nous allons le constater. Il use de grosses ficelles. Reprenant sa manie de la comparaison sans raison, voilà désormais qu'il rapproche la liberté d'expression de la liberté d'entreprendre. Le libéralisme économique et le libéralisme politique? Ce n'est pas très clair comme lien. C'est même passablement embrouillé. Confus. Quelle est la différence?
En tout cas, avec Enthoven Jr., comparaison est carrément déraison. Il compare sans sourciller l'ultralibéralisme à l'outrance de Guillon. L'ultralibéral est le renard dans le poulailler, quand Guillon est le sniper impuni dans la meurtrière. Enthoven Jr. serait-il le libéral modéré et raisonnable? L'ultralibéral raisonnable est raisonneur déraisonnable! Diable! Enthoven Jr. appellerait-il implicitement à des sanctions contre Guillon? Guillon démission! Guillon tête de con! Quel rôle joue Enthoven Jr. avec ce mauvais papier? Celui d'un coupeur de tête? D'un philosophe sans tête? Qui doit boire la cigüe? Le mauvais clown ou le philosophe de cour? En tout cas, cette nouvelle comparaison se révèle tout aussi scabreuse que la première. Si l'ultralibéralisme se caractérise par une fausse liberté sans limite, alors les limites des interventions de Guillon sont évidentes : Guillon ne peut pas tout dire, puisqu'il est assujetti à la vérité factuelle. Il peut se moquer, mais pas à partir d'éléments inventés présentés comme réels. Où l'on constate qu'Enthoven Jr. n'a toujours rien démontré dans son papelard... C'est un aveu éclatant d'absence d'arguments viables.
4) Quand on est un normalien digne de son rang, il faut bien à un moment ou à un autre ramener sa science. Enthoven Jr. n'oublie pas de le faire en citant Weil, qui était récemment louée partout pour le centenaire de sa naissance, et surtout dans Le Monde des livres, l'officine emblématique de la république des lettres française, jadis tenue par Savigneau la Douce. Weil est un penseur mineur d'ores et déjà. C'est une manie de l'académisme que d'exhumer des auteurs assez contemporains pour leur rendre leur hommage douteux, alors qu'on sait qu'ils ne tiennent pas la rampe. Weil la chrétienne appartient à cette catégorie de faux penseurs ou de penseurs mineurs. Enthoven Jr. la cite à la barre des témoins pour corroborer sa distinction non démontrée entre liberté d'expression légitime et moquerie illégitime.
Selon Weil, "la liberté d'expression totale, illimitée, pour toute opinion quelle qu'elle soit, sans aucune restriction ni réserve, est un besoin absolu pour l'intelligence." On ne peut qu'approuver. Et ajouter, outre que selon cette remarque les propos d'Enthoven Jr. ressortissent manifestement de la bêtise, que c'est le temps qui se chargera de disqualifier les opinions injustifiées, comme les opinions seulement moqueuses. Weil au demeurant s'en tient à une ligne en gros proche de la tradition américaine de liberté d'expression. Mais, dans son effort pour dupliquer fallacieusement la liberté d'expression et ses abus, l'humour et la moquerie, Enthoven Jr. apporte la distinction suivante, toujours selon Weil : "Les publications destinées à influer sur ce qu'on nomme l'opinion ne doivent porter aucun préjudice illégitime à aucun être humain."
Là on reste sans voix. Elève Enthoven Jr. : votre propos est particulièrement faible. Élevez un peu le niveau, sans quoi vous ne serez jamais qu'un symptôme de diplôme. Vous ne pouvez être un ennemi au sens nietzschéen, vous êtes trop bas et trop médiocre pour jouer au postnietzschéen. Vos arguties sont de la sous-propagande pathétique et puéril. En effet, on ne peut qu'approuver cette nouvelle remarque de Weil, mais outre qu'elle est particulièrement moralisante et angélique, elle n'apporte rien au débat, car les notions qu'elle propose engendrent un surcoût d'interprétation. Qu'est-ce qu'un préjudice illégitime? On ne le saura jamais. Donc les considérations de Weil sont inutiles.
Au nom de sa condamnation (prévisible et à venir) de la morale, Enthoven Jr. le défenseur du puissant et de l'officiel invoque le respect pour légitimer sa liberté d'expression. Le respect. Qu'est-ce que le respect? Aïe, aïe, aïe! Enthoven Jr. se garde bien d'apporter un commencement de définition à son propos ultraconformiste. Toujours l'indémontré, le postulé. Le postulant ultramoralisateur. Quoi qu'il en soit, Enthoven Jr. n'a toujours pas apporté un iota d'argument à sa pseudo démonstration. Echec sur toute la ligne. Dépense inconsidérée. Réaction agressive de censeur.
5) Ajoutant l'imposture à la dérobade, Enthoven Jr. fait comme s'il avait démontré son assertion initiale alors qu'il s'est contenté d'analogies fausses et fumeuses en lieu et place d'une démonstration logique. Voilà maintenant qu'il conclut : "En d'autres termes, il n'y a pas davantage de liberté sans loi qu'il n'y a de liberté d'expression sans respect". Phrase généraliste et passe-partout qui veut tout dire et ne rien dire à la fois. De surcroît, cette sentence sentencieuse (et moralisante) est fausse : car si la liberté implique la loi, Guillon se conforme à la loi platonicienne du vrai : se moquer en satiriste (bon ou mauvais) à partir d'éléments factuels. Sans doute Enthoven Jr. aimerait ajouter une pincée d'oligarchie dans sa recette de percepteur scolastique et ordonner que la loi du plus fort est toujours la meilleure. Enthoven Jr. substitue aux faits des intentions programmatiques assez inquiétantes. Il fait disparaître les faits derrière ses interprétations et c'est en quoi il est bien un petit nihiliste postmoderne disciple de Nietzsche (à sa sauce avariée).
6) "A force d'oublier ces distinctions essentielles" : peut-être parce qu'il projette d'embrasser la carrière d'humoriste (sur Arte? France Culture?), Enthoven verse dans l'humour involontaire. Enthoven Jr. se distingue par son absence de distinction. Jr. n'a rien distingué du tout. Il nous a diverti en lieu et place des fantomatiques distinctions invoquées. Il a passé son temps à faire semblant. Enthoven Jr. ne se rend pas compte que son jeu de dupes ne dupe que lui. "C'est la loi de la jungle" : qui est le roi de la jungle, entre Enthoven Jr. et Guillon? Le faux penseur qui divertit sans démontrer ou le vilain moqueur? Corrigeons Jr. sur sa phrase erronée : "A force d'oublier ces postulats et ces diversions essentielles." C'est mieux, mais c'est moins présentable.
7) "La chronique de Guillon relève du jugement de valeur sur un adultère" : c'est faux. Guillon se moque d'un travers connu de tous (DSK le coureur de jupons), qui ne peut qu'influer sur l'action politique de son auteur. Sortir avec une employée du FMI quand on en est à la tête n'est pas un acte anodin. Il donne lieu à des manipulations évidentes - dont la publication de cette affaire de moeurs. Par ailleurs, Guillon a le droit de faire du jugement de valeur sur un adultère puisque l'affaire a donné lieu à un scandale retentissant et embarrassant. Enthoven Jr. dit tout bonnement n'importe quoi. Serait-ce qu'il prend la défense de DSK parce qu'il a lui-même donné dans le scandale people en sortant avec Carla B., réputée maîtresse d'Enthoven Sr. le père, avant d'avoir un enfant avec le fils, puis, depuis, de devenir la femme de (du Saint Esprit)?
8) Après avoir versé dans le moralisme en citant Weil et en appelant au respect (comme les rappeurs capitalistes frustrés), Enthoven Jr. condamne sans ciller le moralisme de Guillon! Pour ce faire, il a recours à une dernière pétarade grotesque dans son feu d'artifices analogiques faussement logique et vraiment mouillé : il compare (encore!) le procureur Starr au chroniqueur Guillon. Une nouvelle fois : aucun rapport. Starr utilisait des moyens officiels et juridiques, qui se retourneront peut-être bientôt contre Guillon. Guillon est un trublion radiophonique, un clown du crique médiatique. Qui est le puissant? Qui détient le pouvoir? Guillon ou Starr? Guillon la guille dondaine s'est moqué de puissants, c'est très mal. La Cour le lui rappelle. On espère qu'aucune cour de justice ne s'en mêlera. Starr a exagéré sans aucun doute ses prérogatives, mais n'oublions jamais que Clinton a parjuré, ce qui est un délit officiel, et que cette affaire de sexe impudique a précédé de peu deux faits : la guerre de Serbie et l'abrogation du Glass-Steagal Act, qui encadrait la spéculation financière. L'ultralibéralisme est décidément pavé d'érotomanes et de jupons mités. La boucle est bouclée sur cette mascarade de comparaison, où Starr et Guillon ont à peu près autant à voir qu'un éléphant et un dauphin.
Afin d'éviter tout malentendu, précisons qu'Enthoven Jr. n'est pas un fan inconditionnel de rap hardcore. En conséquence, il ne mentionnait pas Joey Starr du groupe NTM, mais bel et bien Kenneth Starr, procureur zélé et hardcore de l'affaire NTL (Nique Ta Lewinsky). Quoi qu'il en soit, la qualité consternante de la réflexion d'Enthoven Jr. pourrait se résumer à sa dimension de démon people. Enthoven Jr. dit tout haut ce qu'une certaine frange de l'oligarchie pense tout bas. Cette gauche ultralibérale qui s'est alliée à la droite financière, Enthoven en est l'un des porte-paroles, notamment en compagnie de son complice Barbier le Barde, également surnommé Barbier le Barbare par les Antillais, mais aussi le Barde express - par les amateurs de chanson.
Ex people de Carla et défenseur people de DSK. Censeur people au nom de la démocratie. Définition du people : la pensée oligarchique au nom de la démocratie. Définition d'Enthoven Jr. : le nihilisme décadent au nom de la philosophie people. Travers inquiétant qui en dit long sur notre époque de tares. Enthoven Jr. s'est contenté d'asséner, de divertir et de cultiver, dans le sillage de son papa éditeur, de BHL et de Bruckner. Au moment de la crise, où l'on a le plus besoin de critique, de pamphlets et de contestations, de satires, Enthoven Jr. se lève pour censurer la critique dès qu'elle dérange. Enthoven Jr. joue le rôle d'un avocat du pouvoir, pour excuser ses dérives et ses mensonges. Au lieu de se concentrer sur les vrais problèmes, dont DSK serait une emblème, Enthoven nous divertit en s'en prenant à Guillon, qui est le prétexte à une mascarade de procès. Que l'on comprenne la démarche d'Enthoven Jr. le fauxlosophe, relais trouble d'une propagande dégénérée, dont le véritable moteur est l'atlantisme tardif et terminal et dont le sionisme n'est qu'un auxiliaire poussif. Ce qui caractérise l'idiosyncrasie de l'oligarque pris la main dans le sac : la fausse distinction. Le coup de force. Le clou de farce?
"Raphael Enthoven tacle Stéphane Guillon dans l'Express
16/03/09 à 10:04 Les chroniques de Stéphane Guillon sur DSK, Martine Aubry et Jean Michel Apathie n'ont pas fini de faire couler de l'encre. Chroniqueur à l'Express, l'ex de Carla Bruni Sarkozy s'en prend avec virulence au trublion.
Vous pouvez lire en intégralité la chronique de raphael Enthoven ci dessous :
On peut rire de tout, bien sûr. Mais il y a une différence entre rire de tout et se moquer de quelqu'un. Ceux qui l'oublient fabriquent de la censure en croyant célébrer la liberté. Quand l'humoriste Stéphane Guillon, sur France Inter, tout à l'unisson d'une opinion cannibale, s'éclate sur la "braguette rapide" de Dominique Strauss-Kahn, le "physique de petit pot à tabac" de Martine Aubry ou le "balai dans le cul" de Jean-Michel Aphatie, il parle non pas en homme libre, mais en censeur.
Le fait de brandir la "liberté d'expression" pour justifier les sketchs de Guillon n'a aucun sens; autant invoquer la liberté de mouvement pour se donner le droit de taper sur son voisin. On dit, à juste titre, que la liberté d'un individu s'arrête où commence celle de l'autre. Mais ce qui est vrai de la liberté d'entreprendre ne l'est pas moins de la liberté d'expression: de même qu'un libéralisme sans limite ressemble à la liberté du renard dans le poulailler, l'outrance de Guillon ressemble à la liberté du sniper à l'abri derrière sa meurtrière.
Dans L'Enracinement, la philosophe Simone Weil écrit: "La liberté d'expression totale, illimitée, pour toute opinion quelle qu'elle soit, sans aucune restriction ni réserve, est un besoin absolu pour l'intelligence." Elle ajoute un peu plus loin (et sans se contredire en rien) que "les publications destinées à influer sur ce qu'on nomme l'opinion ne doivent porter aucun préjudice illégitime à aucun être humain". En d'autres termes, il n'y a pas davantage de liberté sans loi qu'il n'y a de liberté d'expression sans respect. A force d'oublier ces distinctions essentielles, on en vient à confondre l'audace et la haine, l'insolence et les mauvaises manières, et c'est la loi de la jungle.
Pis, c'est le retour de la morale. Si, pour ne citer que lui, le directeur du FMI avait été mis en cause pour abus de pouvoir ou harcèlement sexuel, l'ironie serait légitime. Mais, en l'absence avérée de toute confusion des genres, de la part de DSK, entre la sphère publique et la sphère privée, la chronique de Guillon relève du jugement de valeur sur un adultère. L'Amérique avait le procureur Kenneth Starr, au temps de l'affaire Clinton-Lewinsky. La France a désormais Stéphane Guillon. Ce sont deux versions de la censure: l'une est officielle et inquisitoriale ; l'autre, plus sournoise, plus drôle, moins identifiable et donc plus dangereuse, porte le masque grimaçant d'un clown."
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