mardi 15 janvier 2008

The homme of the devil

Quand comprendra-t-on que le changement profond dans la conception de l'homme, le passage de Dieu à la Raison et toutes les implications, notamment les revendications de liberté et d'accroissement de la puissance, n'est possible que dans un ordre qui se sent assez fort pour revendiquer sa puissance, sans se rendre compte que c'est précisément cette revendication qui signe son déclin? Pourtant on remarquera que tout converge, et que notamment la Raison affirme l'individu et affirme l'homme dans la mesure où tout part de l'homme et où tout revient à l'homme.
Pour que l'homme se sente assez fort et affirme qu'il est le fondement de son ordre, qu'il est en mesure d'être fondement, qu'il n'a plus besoin de Dieu, pour que l'homme ait senti le besoin irrépressible de se poser en fondement et de dépêcher à ces fins troubles la raison transformée en Raison, il faut que l'homme ait sombré à son péché premier et capital, à son péché de démesure, tel que notamment les Grecs l'enseignaient avec le terme d'ubris.
Autrement dit, le fondement de l'homme, la promotion de l'individu et de la Raison, tous ces changements ne sont possibles qu'avec le Changement par excellence, celui qui affirme haut et fort que l'homme peut changer le réel aux fins de réaliser ses propres attentes et intentions. Il est capital de constater que l'effondrement du religieux, son discrédit, va de pair avec l'affirmation de la Raison. Autrement dit, le plan d'affirmation exacerbée de l'homme est diabolique : l'effondrement du religieux est présenté comme une victoire de l'homme et la promesse de lendemains radieux, où la liberté humaine sera enfin comblée et réalisée. Mais c'est l'inverse qui se produira et se produit déjà : l'homme est dupé dans le moment où on le met le plus en valeur, dans le moment où on lui laisse entendre qu'il est en mesure de servir de caution et de fondement au plan de la Raison et à la promesse de liberté.
La montée en puissance de l'individualisme est censée garantir la réalisation de la liberté et de la raison. En fait, seul le remplacement de Dieu par l'Homme est en mesure de cautionner ce changement qui aurait été considéré autrefois comme une grave atteinte à l'équilibre vital de l'homme et une offense aux dieux. Ce n'est pas qu'autrefois l'homme n'existait pas. C'est qu'il existait seulement grâce à Dieu. Dieu étai le fondement de l'homme. Pour supprimer le fondement de l'homme de la seule manière envisageable, c'est-à-dire par l'assassinat, il fallait que l'homme détienne un substitut de nature à rivaliser avec Dieu. L'homme ne pouvait rivaliser avec Dieu.
Par contre, l'Homme était en mesure de rivaliser avec Dieu. La création de l'Homme reposait sur le seul mythe capable d'abattre la puissance tutélaire de Dieu : l'Homme en tant que force capable de servir de fondement à la domination de l'homme sur le réel. Le postulat sur lequel repose l'Homme, c'est : l'homme est capable de dominer le réel, de l'assujettir à son désir. Sitôt que ce postulat est enclenché, la Raison prend le relais et travaille sur le postulat du donné. Mais le donné n'existe pas, pas plus que n'existe l'Homme, ce mythe au sens de création fausse et sortie de l'imagination démesurée de l'homme. C'est-à-dire qu'à un moment, l'homme s'est rendu compte que sa puissance s'étendait et, à l'instar des héritiers présomptifs et jaloux, il s'est dit qu'il n'était pas question de partager cette gloire et cette puissance avec Dieu. L'homme a liquidé Dieu pour s'accaparer toutes les parts du gâteau. Pour ce faire, il a remplacé Dieu par l'homme. Et maintenant, il se plaint déjà des conséquences de son meurtre inouï. Comme s'il n'était pas prévisible pour une raison saine que ces graves dérapages et ces espoirs de changement ne déboucheraient pas sur l'Apocalypse plus que sur la félicité.

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