samedi 13 mars 2010

L'individu à liste



Pendant qu'on nous bassine les oreilles avec un faux débat, une diversion d'ébat, quel est le vrai débat? Le vrai débat porte sur la crise financière systémique mondialisée, dont on aimerait nous faire oublier la réalité primordiale. Quel est le faux débat? L'identité nationale. Alors que l'homme mondialisée devrait se porte vers l'espace pour continuer son histoire d'expansion et de croissance, voilà qu'il se replie sur lui, petite plante frileuse et fragile, qu'il dresse l'apologie de la décroissance harmonieuse et maîtrisée (n'est-ce pas). Entre l'espace et le repli, tu choisis quelle voie? Quel sens? La sclérose ou l'expansion? L'immobilité ou le changement?
L'individualiste n'est pas capable de comprendre les termes du problème parce que l'individualisme l'empêche d'accéder au domaine politique. L'individualiste est dépolitisé. La politisation est réservée au groupe. L'individu politique présente un sens collectif. L'individualiste est dénué de sens collectif. Pour lui les problèmes politiques sont des chimères et il se montre très fier de dénoncer les chimères politiques. A l'heure actuelle, les gens sont incapables de comprendre le problème politique central, pourtant écrasant et majeur : c'est que c'est un problème politique et que l'individualiste est incapable d'envisager un problème politique.
L'individualiste est rivé sur des problèmes privés. Problèmes limités. Problèmes fixes. Problèmes stables. Problèmes personnels. C'est le personnalisme chrétien, qui réduit la personne à l'individu. L'individualisme rend incapable de comprendre un problème collectif. L'individualisme rend incapable de comprendre un problème tout court. La conséquence individualiste n'est pas à chercher. Elle n'existe pas. L'individualiste est inconséquent. Il n'est besoin que d'écouter sa conversation limitée et fragmentaire.
La crise systémique actuelle, qui prévoit rien moins que d'engendrer la destruction du système, n'existe pas pour un individualiste puisque l'existence de l'individualiste est cantonnée à l'immédiateté. L'individu est l'indivisible dans l'acception réduite du réel. Réduction à l'immédiateté. La définition ontologique de l'immédiateté aboutit à nier l'infini pour mieux délimiter le réel. Dans ce prolongement, le fondement de ce fini est l'individu. Dans l'ordre de l'immédiateté, l'individu est la base qui ne se divise pas.
L'individualisme exprime le réductionnisme le plus fallacieux. L'erreur de définition du réel engendre l'erreur de définition de l'homme. Le réel est un monde clos et figé, l'homme un individu clos et figé. Pour l'individualiste, il est étrange de se préoccuper de problèmes qui ne sont ni privés, ni individualistes. Les problèmes politiques sont des problèmes passés et dépassés. La crise systémique est un problème caduc. Les questions essentielles passent au secondaire. Quand on écoute la conversation de l'individualiste, on est frappé de sa superficialité quasiment stupide.
On discute de cuisine, de mode, de décoration, de bricolage. Si l'on est intello, on aborde des sujets de savoir répétitifs et académiques. Quoi qu'il en soit, pas question d'aborder des question de création, de changement, d'infini ou de groupe. Tabou! Le groupe renvoie à la politique! C'est ringard. C'est hideux. C'est un gros mot. C'est un mal. L'individualiste ne comprend du réel que l'immédiat. Il ne faut pas lui en vouloir. Il est déconnecté. Il est largué. Il est bon pour la casse. Il lui manque une case. L'individualisme enferme dans un cercle vicieux : impossible de sortir du piège individualiste une fois qu'on y est entré.
L'impossibilité s'explique par le vice de l'immanentisme : pour sortir de ce vice, la seule vertu n'est pas impossible en tant que telle. Mais elle conduit à détruire radicalement les limites mentales de l'individualiste. L'individualiste se renie ou s'exaspère. Le fait qu'il se renie rarement et qu'il s'exaspère souvent indique que c'est sans doute hors de l'Occident individualiste que la fin du symptôme individualiste va prendre forme. L'individualisme est le symptôme politique empoisonné de l'immanentisme religieux. L'homme sortira de l'immanentisme mais ce ne sera pas l'Occident qui réalisera ce salut. Gardons de l'Occident ses meilleures réalisations, son apogée chrétienne, et pardonnons-lui sa dérive terminale : l'Occident n'est pas individualiste; c'est l'Occident terminal qui l'est - laid.

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