Il est fascinant que le fondement du libéralisme repose sur la main invisible, soit sur l"idée que le marché (le donné fini) s'équilibre de manière aussi naturelle qu'inexplicable. Il est tout aussi éclairant que l'argument en bout de course pour empêcher la contestation autour du 911 et de sa famélique version officielle soit en fin de compte que la vérité est introuvable.
Il en va de même avec le concept de différance exposée par les déconstructeurs de l'école de Derrida, selon lesquels finalement le sens est toujours différé et introuvable. Mais ce n'est pas tout : le hasard fait si bien les choses que l'on trouve aussi d'autres illustrations de réalité ou de vérité indécidables. C'est ainsi que l'historien Veyne n'hésite pas à expliquer le plus calmement du monde que la chute de Rome ne résulte pas de la décadence, mais de conjonctions finalement plus ou moins inexplicables!
C'est une véritable mystique que celle du caractère inexplicable des événements, de la main invisible qui meut le réel. Et cette mystique n'est pas n'importe quelle mystique. Elle est proférée au nom de la Raison immanentiste, soit au nom de la sortie de la religion et de son dépassement par le rationalisme supérieur et triomphant. Elle consiste à promouvoir les valeurs du hasard.
Qu'est-ce que le hasard? C'est le postulat qui prétend remplacer Dieu, soit le critère du finalisme et de la décision, par le principe négateur de principe de l'indécidabilité et de l'incertitude. De ce point de vue, le hasard serait encore preuve d'humilité s'il consistait à affirmer que l'homme ne sait pas, un peu comme Socrate; mais tel n'est pas le cas : il s'agit de substituer à un principe rationnel et de ce fait transcendant le rationalisme humain une négation de principe hyperrationnel et de ce fait transcendant le rationalisme par l'irrationalisme.
Tel est l'immanentisme et l'erreur immanentiste dans toute sa splendeur. Pour expliquer que le reél est ce donné fini et défini, l'immanentisme nous pond une doctrine qui veut que toutes les parties de ce donné aient le même pouvoir d'influence et d'intervention. Si le donné pouvait se trouver soumis à la manipulation de quelques parties sur les autres parties, la viabilité pour l'homme de ce donné s'effondrerait instantanément.
Cette vision n'est par conséquent pas admissible. Il faut la distinguer cependant de la domination qu'induit la théorie du désir immanentiste. La domination signale l'accroissement de la puissance dans le jeu du fini tel qu'il est défini par le donné. Au contraire, la manipulation désigne, non cet accroissement de puissance, mais le fait que certaines parties puissent s'allier et ainsi remettre en question leur statut dans le donné et le statut du donné.
On peut manipuler à l'intérieur du donné, mais l'on ne saurait manipuler le donné. Cette constatation explique le refus du complot et son amalgame avec le complotisme. Le complotisme supposerait que des parties peuvent décider du tout, ce qui est impossible, et mérite d'être dénoncé comme aberration. Mais que des parties ne puissent se commuer en tout (véritable complotisme) ne signifie nullement que des parties ne puissent intenter des complots, soit essayer de se commuer en tout, soit encore prétendre dans leur démesure manipuler le réel.
Il est certain qu'à l'aune de cette analyse le complotisme débouche toujours sur des résultats différents de ceux escomptés par ses instigateurs. Mais l'immanentisme réfute le complot parce que le complot signale la fragilité de ses positions, soit la possibilité que des parties complotent tout en ratant leur complot. L'immanentisme amalgame sous le terme de complotisme le complotisme et le complot.
De ce fait, il se cache que son donné repose sur une erreur ontologique de conception et que les complots existent. Mais surtout, il affiche le hasard contre Dieu (immanentisme contre transcendantalisme) parce qu'il est incapable d'expliquer la différence en tant que les choses qui sont sont aussi les choses qui changent. Il est remarquable que le hasard soit l'explication apposée pour expliquer la différence parce que l'immanentisme est incapable d'affronter la différence.
Le recours du transcendantalisme à l'extériorité ou à Dieu s'expliquait par le besoin d'expliquer le devenir par une cause extérieure et capable de contrôler le donné réel (ou le sensible). De ce point de vue, le complotisme est l'exagération paranoïaque qui consiste à attribuer à la partie des pouvoirs démiurgiques et lui conférer des facultés semblables à Dieu. Le complotisme est paranoïaque en ce qu'il résout le problème du transcendantalisme par l'identité de la partie et du tout. C'est en quoi la paranoïa mérite d'être classée au rayon des dérangements mentaux : en ce qu'elle identifie la partie et le tout.
Le complotisme est la réponse hyperrationnelle (paranoïaque donc) à l'impéritie immanentiste. L'immanentisme repose sur l'incohérence comme principe, soit la négation du principe en tant que principe. L'immanentisme nie Dieu au nom de son extériorité et voudrait introduire une cohérence totale dans le réel en le déclarant totalement un, unique et sans extériorité. Mais de ce fait, il est contraint de nier l'explication absolue, aussi empreinte de problèmes soit-elle, ce fameux Dieu dont on voudrait tant qu'il soit mort, alors que c'est l'homme qui l'a tué dans sa furie immanentiste.
Le remplacement de Dieu par le hasard découle de la nécessité de ne pas expliquer le donné ou d'expliquer le donné par son caractère inexplicable. Pourtant, rendre tout fait inexplicable le réel est raisonnement encore plus faible et aberrant que d'expliquer le réel par Dieu. Le hasard est un concept qui ne tient pas la route et qui ne remplacera certainement pas de manière avantageuse Dieu. Au contraire, il sert à dénoncer les faiblesses de Dieu pour en instaurer en lieu et place de plus grandes encore.
C'est aussi la caractéristique de l'immanentisme : remplacer le transcendantalisme au nom de ses faiblesses et apporter en lieu et place des faiblesses plus importantes encore. La faiblesse du hasard tient précisément au fait que l'on peut tout expliquer si l'on ne peut rien expliquer, un peu comme Deleuze expliquait que tout ce qui fait sens (tout concept) a du sens et que les postmodernes affirmaient le relativisme des valeurs comme la grande révolution de la pensée contemporaine.
Révolution immanentiste, oui. Révolution chaotique, aussi! L'immanentisme en vient à nier l'extérieur au nom de la totalité panthéiste dans le sens où le hasard expliquerait l'inexplicable. L'examen du hasard suffit à montrer la faiblesse de l'immanentisme, le fait que le hasard repose sur un château de cartes, selon son étymologie propre d'ailleurs, et que l'immanentisme exprime l'ordre de la crise, soit le désordre du chaos.
Sans doute cette crise signale-t-elle que le transcendantalisme est en crise et qu'il doit être remplacé par l'homme pour que l'homme poursuive sa route. Mais ce ne saurait être l'immanentisme qui remplace le transcendantalisme, car la crise ne saurait remplacer l'ordre. Tout au plus exprime-t-elle l'expression nécessaire de la transition. Le prochain ordre sera celui en mesure de produire un remplacement efficace. Pas celui de Dieu par le hasard famélique et nihiliste. Celui de l'ailleurs par le néant.
Il en va de même avec le concept de différance exposée par les déconstructeurs de l'école de Derrida, selon lesquels finalement le sens est toujours différé et introuvable. Mais ce n'est pas tout : le hasard fait si bien les choses que l'on trouve aussi d'autres illustrations de réalité ou de vérité indécidables. C'est ainsi que l'historien Veyne n'hésite pas à expliquer le plus calmement du monde que la chute de Rome ne résulte pas de la décadence, mais de conjonctions finalement plus ou moins inexplicables!
C'est une véritable mystique que celle du caractère inexplicable des événements, de la main invisible qui meut le réel. Et cette mystique n'est pas n'importe quelle mystique. Elle est proférée au nom de la Raison immanentiste, soit au nom de la sortie de la religion et de son dépassement par le rationalisme supérieur et triomphant. Elle consiste à promouvoir les valeurs du hasard.
Qu'est-ce que le hasard? C'est le postulat qui prétend remplacer Dieu, soit le critère du finalisme et de la décision, par le principe négateur de principe de l'indécidabilité et de l'incertitude. De ce point de vue, le hasard serait encore preuve d'humilité s'il consistait à affirmer que l'homme ne sait pas, un peu comme Socrate; mais tel n'est pas le cas : il s'agit de substituer à un principe rationnel et de ce fait transcendant le rationalisme humain une négation de principe hyperrationnel et de ce fait transcendant le rationalisme par l'irrationalisme.
Tel est l'immanentisme et l'erreur immanentiste dans toute sa splendeur. Pour expliquer que le reél est ce donné fini et défini, l'immanentisme nous pond une doctrine qui veut que toutes les parties de ce donné aient le même pouvoir d'influence et d'intervention. Si le donné pouvait se trouver soumis à la manipulation de quelques parties sur les autres parties, la viabilité pour l'homme de ce donné s'effondrerait instantanément.
Cette vision n'est par conséquent pas admissible. Il faut la distinguer cependant de la domination qu'induit la théorie du désir immanentiste. La domination signale l'accroissement de la puissance dans le jeu du fini tel qu'il est défini par le donné. Au contraire, la manipulation désigne, non cet accroissement de puissance, mais le fait que certaines parties puissent s'allier et ainsi remettre en question leur statut dans le donné et le statut du donné.
On peut manipuler à l'intérieur du donné, mais l'on ne saurait manipuler le donné. Cette constatation explique le refus du complot et son amalgame avec le complotisme. Le complotisme supposerait que des parties peuvent décider du tout, ce qui est impossible, et mérite d'être dénoncé comme aberration. Mais que des parties ne puissent se commuer en tout (véritable complotisme) ne signifie nullement que des parties ne puissent intenter des complots, soit essayer de se commuer en tout, soit encore prétendre dans leur démesure manipuler le réel.
Il est certain qu'à l'aune de cette analyse le complotisme débouche toujours sur des résultats différents de ceux escomptés par ses instigateurs. Mais l'immanentisme réfute le complot parce que le complot signale la fragilité de ses positions, soit la possibilité que des parties complotent tout en ratant leur complot. L'immanentisme amalgame sous le terme de complotisme le complotisme et le complot.
De ce fait, il se cache que son donné repose sur une erreur ontologique de conception et que les complots existent. Mais surtout, il affiche le hasard contre Dieu (immanentisme contre transcendantalisme) parce qu'il est incapable d'expliquer la différence en tant que les choses qui sont sont aussi les choses qui changent. Il est remarquable que le hasard soit l'explication apposée pour expliquer la différence parce que l'immanentisme est incapable d'affronter la différence.
Le recours du transcendantalisme à l'extériorité ou à Dieu s'expliquait par le besoin d'expliquer le devenir par une cause extérieure et capable de contrôler le donné réel (ou le sensible). De ce point de vue, le complotisme est l'exagération paranoïaque qui consiste à attribuer à la partie des pouvoirs démiurgiques et lui conférer des facultés semblables à Dieu. Le complotisme est paranoïaque en ce qu'il résout le problème du transcendantalisme par l'identité de la partie et du tout. C'est en quoi la paranoïa mérite d'être classée au rayon des dérangements mentaux : en ce qu'elle identifie la partie et le tout.
Le complotisme est la réponse hyperrationnelle (paranoïaque donc) à l'impéritie immanentiste. L'immanentisme repose sur l'incohérence comme principe, soit la négation du principe en tant que principe. L'immanentisme nie Dieu au nom de son extériorité et voudrait introduire une cohérence totale dans le réel en le déclarant totalement un, unique et sans extériorité. Mais de ce fait, il est contraint de nier l'explication absolue, aussi empreinte de problèmes soit-elle, ce fameux Dieu dont on voudrait tant qu'il soit mort, alors que c'est l'homme qui l'a tué dans sa furie immanentiste.
Le remplacement de Dieu par le hasard découle de la nécessité de ne pas expliquer le donné ou d'expliquer le donné par son caractère inexplicable. Pourtant, rendre tout fait inexplicable le réel est raisonnement encore plus faible et aberrant que d'expliquer le réel par Dieu. Le hasard est un concept qui ne tient pas la route et qui ne remplacera certainement pas de manière avantageuse Dieu. Au contraire, il sert à dénoncer les faiblesses de Dieu pour en instaurer en lieu et place de plus grandes encore.
C'est aussi la caractéristique de l'immanentisme : remplacer le transcendantalisme au nom de ses faiblesses et apporter en lieu et place des faiblesses plus importantes encore. La faiblesse du hasard tient précisément au fait que l'on peut tout expliquer si l'on ne peut rien expliquer, un peu comme Deleuze expliquait que tout ce qui fait sens (tout concept) a du sens et que les postmodernes affirmaient le relativisme des valeurs comme la grande révolution de la pensée contemporaine.
Révolution immanentiste, oui. Révolution chaotique, aussi! L'immanentisme en vient à nier l'extérieur au nom de la totalité panthéiste dans le sens où le hasard expliquerait l'inexplicable. L'examen du hasard suffit à montrer la faiblesse de l'immanentisme, le fait que le hasard repose sur un château de cartes, selon son étymologie propre d'ailleurs, et que l'immanentisme exprime l'ordre de la crise, soit le désordre du chaos.
Sans doute cette crise signale-t-elle que le transcendantalisme est en crise et qu'il doit être remplacé par l'homme pour que l'homme poursuive sa route. Mais ce ne saurait être l'immanentisme qui remplace le transcendantalisme, car la crise ne saurait remplacer l'ordre. Tout au plus exprime-t-elle l'expression nécessaire de la transition. Le prochain ordre sera celui en mesure de produire un remplacement efficace. Pas celui de Dieu par le hasard famélique et nihiliste. Celui de l'ailleurs par le néant.
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