mardi 10 juin 2008

Les étranges propos d’un « spécialiste » du terrorisme de l’AFP...

Examen en faits d'un cas largement répandu de pratique journalistique : se tenir du côté de l'officiel, de l'institutionnel, bien droit et bien coi, quelles que soient les circonstances. En l'occurrence, avec le 911, cette pratique est des aberrantes et évidemment risibles.

http://www.voltairenet.org/article157404.html


"La qualité première d’un journaliste devrait être la curiosité, mais lorsque les médias se mettent au service d’une vérité officielle, le journaliste se barde de certitudes et devient aveugle et sourd. L’éditeur Arno Mansouri a rencontré un célèbre journaliste de l’AFP qui a couvert à New York les attentats du septembre 2001 : pour justifier la version bushienne des événements, il est prêt à des contorsions que l’administration Bush elle-même s’interdit.
À l’occasion de l’exposition temporaire [1] du Mémorial de Caen sur les attentats du 11 Septembre, fut projeté le « documentaire de fiction » ( !) Vol 93 de Paul Greengrass au Café des images d’Hérouville Saint Clair, en présence d’un journaliste de l’AFP, qui fit part à l’assistance de son expérience personnelle des attentats à New York et de sa stupéfiante façon de travailler sur un événement aussi extraordinaire… en toute ingénuité ! Voici quelques morceaux choisis de choses entendues lors de cette soirée…

Jeudi 5 juin, j’ai eu l’occasion de rencontrer M. Michel Moutot, qui s’était déplacé à Caen, à l’invitation du Mémorial de Caen, pour intervenir et expliquer par exemple dans quelles conditions il avait travaillé pour l’Agence France Presse sur la couverture d’un événement d’une importance aussi considérable que les attentats du 11 Septembre. Il était en effet en poste au bureau de l’AFP de New York, avec 5 autres confrères.

M. Michel Moutot n’est pas n’importe qui : journaliste à l’AFP depuis 1985, il appartient à la crème de la profession et fut lauréat du Prix Albert Londres en 1999 pour une série de reportages sur le Kosovo.

En me documentant sur le personnage via Internet, j’ai trouvé cette perle que je ne résiste pas au plaisir de vous faire partager. Interviewant la chercheuse norvégienne Anne Stenersen, qui apparemment s’exprime en anglais, il cite ainsi les propos de cette dernière au sujet des apprentis terroristes qui cherchent sur Internet des informations pour fabriquer leurs bombes : « C’est au mieux très basique (...) [le site] explique aussi comment faire une bombe avec du radium et des termites... » Mamma mia ! Notre éminence journalistique n’a semble-t-il jamais entendu parlé de la thermite, cette substance extrêmement exothermique, mélange d’aluminium et d’oxyde de fer qui permet entre autres de faire fondre instantanément de l’acier. C’est vertigineux, car il ne se demande pas une seconde comment l’ajout d’insectes xylophages (sic, fruit de sa mauvaise compréhension d’un terme technique) pourrait rendre un engin explosif plus dangereux !

Je sais, on dirait un canular, mais jugez par vous-mêmes ; l’article au titre douteux « "La bombe atomique dans votre cuisine" : l’apocalypse sur le net » est en ligne ici. Il a été commis par M. Moutot et publié le mardi 11 septembre 2007, pour le 6e anniversaire des attentats.

Cette première anecdote comique (et celles bien moins réjouissantes qui suivent plus bas) illustrent parfaitement la situation impossible à laquelle je suis confronté et dois faire face en tant qu’éditeur de livres extraordinairement documentés sur le sujet du terrorisme en général et du 11 Septembre en particulier. Dans la collection Résistances, j’ai sélectionné ce que je considère être les 10 meilleurs ouvrages traitant du sujet ; il s’agit du travail de personnalités exemplaires pour leur courage, leur rigueur, le sérieux et la qualité de leurs recherches et réflexions à partir d’éléments factuels, authentifiés, documentés… Ces auteurs sont des journalistes (Meyssan, Wisnewski, Thorn) ou des universitaires, (David Ray Griffin, Webster G. Tarpley, Francis A. Boyle, Nafeez M. Ahmed et Daniele Ganser) pour la plupart de renommée internationale.

Leurs travaux sont préfacés par un ancien ministre (M. Meacher pour la seconde édition du Nouveau Pearl Harbor de D.R. Griffin) ou le chef de l’état-major des armées russes (M. Leonid Ivashov pour la réédition de L’Effroyable Imposture de M. Meyssan) ; parmi les gens qui les ont appuyés, on trouve pêle-mêle des intellectuels de la trempe d’Howard Zinn, Noam Chomsky, Peter Dale Scott, Richard Falk (Note à l’attention de M. Moutot et de ses confrères journalistes : il ne s’agit PAS de l’acteur qui joue Columbo), Michel Chossudovsky, mais encore bien d’autres professeurs et universitaires, des hommes politiques, des militaires à la retraite, des anciens des services de renseignement et même quelques journalistes.

Jeudi dernier, M. Moutot levait les yeux au ciel, soupirait, haussait les épaules et souriait narquoisement, fort de son évidente supériorité intellectuelle face à quelques personnes pourtant bien mieux informées que lui sur le sujet : pour paraphraser Fernand Reynaud, « ce n’est pas un imbécile, c’est un journaliste » ! Il n’a cependant fait qu’étaler sa plus totale méconnaissance du dossier. En cela, il est malheureusement pas une exception, mais plutôt un révélateur de cet état de fait dans la profession journalistique. Voici quelques exemples :

- Interrogé sur la structure des Tours Jumelles, il a commencé par affirmer qu’elles étaient construites comme des « tubes creux », dont seules les colonnes périphériques assuraient l’intégrité. Cela est faux : les 236 colonnes des façades ne se substituaient nullement aux 47 volumineuses colonnes supports du cœur du bâtiment mais venaient les renforcer, en permettant la mise en place de très vastes superficies de bureaux, plus lucratives. Confronté à cette contradiction, il s’est raccroché au fait que « le cœur du bâtiment ne contenait pas de béton » : c’est certain, mais tous les immeubles de grande hauteur ne sont pas construits de manière similaire à la tour Montparnasse, et il est important de savoir précisément comment étaient construits les trois bâtiments qui se sont effondrés le 11/9. À ce propos, voici le plan d’un étage et deux photos du chantier de construction.

Je lui avais au demeurant envoyé deux de ces éléments par courriel suite à une discussion que nous avions eue par téléphone lorsqu’il m’avait demandé un exemplaire du livre de M. Ahmed, La Guerre contre la vérité. Car déjà à l’époque, il avait soutenu que les tours étaient des « tubes creux ». J’y avais joint un exemplaire du Procès du 11 Septembre (de Thorn & Griffin) qu’il n’a sans doute pas pris le temps de lire…

- Interrogé sur les raisons de l’effondrement du bâtiment WTC7, dont il connaît par ailleurs l’existence (contrairement à une grande majorité de nos concitoyens), il affirme sans rire que « cela n’a rien de surprenant… Que ce qui est surprenant au contraire, c’est qu’aucun autre bâtiment environnant ne se soit effondré ». Que cet effondrement total, vertical et à la vitesse de la chute libre « tient au fait que la structure avait été dévastée par un incendie de près de 7 heures ». J’invite M. Moutot (ainsi que les autres journalistes qui m’ont tenu des propos similaires, car à sa décharge il est loin d’être le seul à penser ainsi) à se rapprocher au plus vite des 300 experts du NIST qui peinent à rendre le rapport définitif sur les causes de l’effondrement du WTC7. Je rappelle en effet pour mémoire que ce rapport n’a toujours pas été publié : le NIST en remet la parution d’année en année et il est maintenant prévu qu’il soit rendu public en août 2008. Voir ici, la traduction en français de l’article du 6 juin paru dans le Financial Times. Pour résumer : n’en déplaise à nos journalistes hexagonaux, à ce jour, AUCUNE explication officielle n’existe sur les raisons de l’effondrement structurel du WTC 7 ; je répète : a-u-c-u-n-e. Et celles mises officiellement en avant pour expliquer les effondrements des Tours Jumelles ne sont pas satisfaisantes au regard de la physique. Il est tout simplement extraordinaire de suffisance que certains journalistes présentent leurs allégations personnelles comme des faits avérés, lorsque les experts sèchent depuis plus de 6 ans sur ce problème !

- Au passage, je regrette qu’une personne membre de l’association ReOpen911 présent à la séance, (un expert travaillant pour une société de certification française mondialement connue), ne lui ait pas expliqué que les cuves de diesel servant aux générateurs électriques devaient être protégées par un système anti-incendie … et que le diesel ne brûle pas ! (Seules les émanations gazeuses du gasoil sont combustibles, sous pression, pas le liquide lui-même).

- M. Moutot pousse l’argumentaire jusqu’à dire que le WTC7, à l’instar d’autres gratte-ciel new-yorkais, n’était pas « construit pour durer ». Voilà un scoop : le bâtiment 7 ayant été inauguré en 1987, il n’avait que 14 années d’existence lorsqu’il s’effondra… et il avait été choisi par le cabinet du maire de New York pour abriter le poste de commandement des situations de crises : il est donc peu probable que le maire ait choisi un bâtiment insalubre pour y établir son bunker. L’immeuble était quasiment neuf !

- Sortant de New York, M. Moutot nous a fait la démonstration que sa méconnaissance des attentats du 11/9 s’étendaient à presque tous les domaines : sur les procédures en vigueur pour intercepter un avion détourné par exemple. Ou sur les images vidéos des pirates de l’air du vol AA11, dont il a affirmé à 3 reprises, et avec certitude, qu’elles provenaient des caméras de sécurité de l’aéroport de Boston. Non, M. Moutot, elles ne proviennent pas de Boston Logan, d’où a décollé le vol AA11, mais uniquement de la salle d’embarquement de Portland. Ceci n’est pas anecdotique : ces images ont effectivement été présentées de manière à ce que le grand public pense qu’elles montrent les pirates de l’air embarquant dans l’avion détourné, mais elles montrent les pirates montant dans l’avion qui les emmène à Boston. L’aéroport de Boston ne disposait PAS de caméras de sécurité.

On pourrait continuer longuement sans doute la liste des erreurs ou des contrevérités que ce journaliste (qui se pense bien informé) considère comme avérées et ne nécessitant donc pas d’être remises en cause.

Mais il me semble intéressant de vous faire part de la manière dont M. Moutot nous a dit avoir travaillé à la couverture des attentats. Je rappelle qu’il travaillait alors au desk de l’AFP à New York. Ce matin-là, il prend connaissance d’un incendie dans l’une des tours du WTC par l’intermédiaire de la chaîne d’information en continu new-yorkaise NY1. Très vite, CNN montre les images en direct et M. Moutot va tout simplement écrire ses premières dépêches en regardant la chaîne de télévision US. Voilà qui réjouira sans doute nos décideurs politiques que de savoir que l’AFP (première agence de presse francophone dans le monde et l’une des 3 grandes agences de presse avec Reuters et Associated Press) s’informe et se nourrit de programmes télés états-uniens… M. Moutot explique en effet qu’« Ils ont plus de moyens que nous et filment tout, il est donc plus efficace de regarder la télé que d’aller sur le terrain ». Décidément très en verve ce soir-là, il a poussé l’indiscrétion jusqu’à confier qu’« ensuite, pendant près de 6 semaines, j’ai quasiment écrit le même article », à savoir que les espoirs de retrouver des survivants étaient minces, s’amenuisaient, devenaient improbables, étaient nuls… Sa franchise l’honore, mais son travail (tel que décrit par lui) me semble d’un intérêt excessivement limité, face aux enjeux soulevés par les attentats du 11/9. On reste en effet dans l’émotionnel et on s’y complait, 6 semaines durant ; M. Moutot travaillait alors pour l’AFP, pas Gala ni Paris-Match : on était en droit de s’attendre à des articles de fond plus substantiels.

Je n’ai appris la présence de M. Moutot à Caen qu’une fois sur place, sans quoi j’aurai pris avec moi ce fil de l’AFP qui indique « URGENT : Un avion détourné se dirige vers le Pentagone. » (AFP, 10h51 – 10h54 – 11h02) et lui aurai demandé comment une telle brève pouvait avoir été écrite, et diffusée par 3 fois et ce qu’il fallait en penser. Mais le pauvre homme avait déjà fait preuve d’une telle méconnaissance des événements qu’ajouter à sa peine à ce moment précis eut été cruel. Ceci étant, 5 jours après cette rencontre, estimant que la question mérite d’être adressée, je la lui pose, ainsi que d’une manière générale à toute l’équipe du bureau de l’AFP à Washington : comment peut-on savoir qu’un avion détourné, qui a disparu des écrans radars « se dirige vers le Pentagone » ? Et une question supplémentaire : si l’AFP savait (grâce à un « responsable du FBI ») que le vol UA93 se dirigeait vers le Pentagone, est-il envisageable que les militaires du Pentagone eux-mêmes l’ignoraient ? Les lecteurs de L’Effroyable Imposture savent aussi que l’AFP avait relayé plusieurs fois l’information selon laquelle deux (2) explosions avaient été entendues au Pentagone : comme eux, j’aimerais savoir pourquoi la version officielle de l’attentat contre le ministère de la Défense US a évacué les témoignages sur ces 2 explosions distinctes et n’a retenu que l’invraisemblable crash d’un Boeing 757.

Enfin, même sur des faits qui ne sauraient plus offrir un sujet de polémique, comme le scandale sanitaire relaté dans le livre Les Héros Sacrifiés du World Trade Centre par sa consoeur Jacqueline Maurette, M. Moutot ne semble pas mieux informé. C’est un fait que les personnes ayant été exposées aux émanations toxiques de la « pile » (la montagne des décombres du WTC) payeront un lourd tribu pour leur héroïsme. C’est un fait que Mme Christine Todd Whitman, la directrice de l’EPA (l’agence pour la protection de l’environnement) a menti en affirmant que « l’eau et l’air de New York sont sains ». Ce mensonge aura pour conséquence un nombre de victimes plus important que celui des attentats ce jour si funeste du 11 septembre 2001. C’est un fait encore que les « Truthers » (que M. Moutot appelle de façon méprisante « les tenants de la théorie du complot » sans même être conscient qu’il est lui-même un adepte de la théorie officielle du complot islamiste d’al-Qaida véhiculée par tous les médias de masse !) furent les premiers en septembre 2004 à tirer la sonnette d’alarme sur ce scandaleux et criminel mensonge de l’administration Bush. (Voir le débat au début du DVD Confronting the Evidence).

Il est notable les spectateurs présents à cette soirée se sentaient mal à l’aise face à une telle incompétence. Et lorsque l’on voit sa méconnaissance de toutes ces questions, il semble tout à fait légitime de douter des analyses de M. Moutot, lorsqu’il nous dit, par exemple : « Étant un spécialiste du terrorisme islamiste, aussitôt que j’ai compris qu’il s’agissait d’un attentat, j’ai été sûr qu’il s’agissait d’Oussama ben Laden et d’al-Qaida ». Pour en savoir plus sur la « nébuleuse » terroriste, je pense qu’il devrait suivre l’exemple de M. Jean-Pierre Chevènement et lire Comment le Djihad est arrivé en Europe du journaliste allemand Jurgen Elsässer ; j’ai peine à croire qu’il ait réellement lu La Guerre contre la vérité, dont le grand écrivain Gore Vidal dit : « À ce jour, l’ouvrage le plus objectif sur les circonstances et les raisons de l’attaque lancée contre l’Amérique le 11 Septembre 2001 est sans conteste celui de Nafeez Mosaddeq Ahmed – et c’est le meilleur... »

J’invite les responsables du Mémorial de Caen à choisir à l’avenir des personnes mieux informées pour venir parler au public du sujet de leur longue exposition temporaire : il en va de la crédibilité de leur prestigieux lieu de mémoire et de paix.
Arno Mansouri
Directeur des Éditions Demi-Lune."

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